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De l’expérimentation à l’épreuve du réel: bilan (et surprises) d’une étude sur l’aide à distance dans les CAF

« Pendant deux semaines, tout s’est arrêté. Alors on a utilisé ce temps-là pour développer intensivement nos compétences technopédagogiques de manière à pouvoir continuer d’aider les étudiants du CAF. C’est une chance dans cette grande malchance… Ça permet de mieux répondre aux besoins que la recherche voulait combler. Pour le CAF, ça va avoir eu un impact bénéfique. »

Propos recueillis auprès d’un responsable de CAF lors d’une entrevue réalisée au printemps 2020

Au cours de l’année scolaire 2019-2020, une étude PAREA liée à l’implantation de services d’aide à distance dans des CAF du réseau collégial a été menée[1]. L’intention était de rendre les services d’aide accessibles pour les étudiants, tant en présence qu’à distance. Cette stratégie découlait de travaux de recherche antérieurs (notamment Cabot, 2017; Facchin, 2018) ainsi que de suggestions d’étudiants pour optimiser l’offre de services des CAF (Cabot et Facchin, 2020). En effet, dans une étude préalable, plusieurs raisons de non-fréquentation des CAF avaient été exprimées par des étudiants et étudiantes de niveau collégial (allant de problèmes de gestion du temps à des difficultés d’ordre émotionnel, comme la honte à demander de l’aide et la peur d’être jugé ou jugée négativement). Pour que ces obstacles puissent être contournés et que du soutien en français puisse être offert aux étudiants concernés, un sous-échantillon de ceux-ci avaient suggéré des pistes de solution, dont la principale était de rendre les services accessibles à distance, par des stratégies synchrones et asynchrones.

Le présent article vise à revisiter le déroulement de l’étude quasi expérimentale qui en a découlé, et ce, à travers le point de vue des responsables de CAF qui y ont participé. Pour des raisons éthiques, ils et elles ne sont pas identifiés, mais tous les propos cités dans cet article proviennent des entrevues effectuées auprès des responsables des services d’aide en français à distance, mis sur pied dans le cadre de la recherche. Toutefois, avant de rapporter ici leurs propos, je tiens à m’exprimer au sujet de ces collaborateurs et collaboratrices d’exception. Après avoir travaillé plus d’une année avec eux alors qu’ils imaginaient, créaient, développaient des idées pour « hybrider » leurs CAF dans le cadre de cette étude, après avoir été témoin de leur capacité à gérer les imprévus de toutes sortes durant l’implantation de ces idées à l’automne 2019, puis à l’arrivée de la crise sanitaire à l’hiver 2020, j’ai redoublé d’estime à leur endroit. Les responsables des CAF qui ont accepté de se lancer dans l’aventure que je leur proposais sont des personnes brillantes, dévouées, complètement engagées dans l’aide qu’elles apportent aux étudiants. Ils et elles suivent leurs convictions, ayant toujours dans leur mire l’apprentissage, la réussite et le bienêtre des étudiants. Tout au long de l’étude, toutes sortes de difficultés, d’imprévus, d’irritants… (et même une pandémie!) ont entravé leur chemin. Mais on dirait que rien ne peut les arrêter. Ils et elles ont toujours réussi à s’adapter aux situations, à maintenir le cap et à offrir un soutien indéfectible aux étudiants, en gardant le sourire et une patience pleine de douceur et de bienveillance. Si j’étais une étudiante qui avait de la difficulté à réussir au cégep, je voudrais être mise en contact avec ces personnes.

Le contexte de l’étude

Depuis plus de 10 ans, j’ai mené quelques travaux de recherche sur la motivation des collégiens éprouvant des difficultés à maitriser la langue. Cette réalité m’a menée à développer de nombreuses relations avec des enseignants et enseignantes de français du réseau. Lors de discussions, certains d’entre eux déploraient le fait que de nombreux étudiants qu’ils dirigeaient vers le CAF ne s’y présentaient pas. Spontanément, je me suis demandé : « Pourquoi? » Plusieurs réponses informelles étaient émises : ils n’ont pas le temps, ils ont honte, ils ont d’autres priorités… Comme j’avais déjà exploré l’utilisation des TIC dans des études antérieures, je me suis dit qu’il s’agirait peut-être d’une avenue intéressante à explorer pour atteindre certains des étudiants en difficulté qui ne se présentaient pas au CAF. Avec l’aide du CCDMD, j’ai fait parvenir une invitation aux responsables des CAF du réseau pour évaluer la faisabilité d’une étude qui aurait pour objectif d’expérimenter la mise sur pied d’une branche virtuelle d’aide dans les CAF et d’en mesurer l’efficacité auprès des étudiants. Quatre CAF ont répondu à l’appel. En parallèle, comme il s’agissait d’étudier « la distance » dans le soutien pédagogique, j’ai consulté une collègue chercheuse, Stéphanie Facchin, qui travaillait au Cégep à distance et qui avait fait une étude spécifique à ce contexte d’enseignement. Je lui ai raconté que j’avais l’intuition que des étudiants pouvaient être mal à l’aise par rapport au contact direct avec l’aidant ou l’aidante, et que c’est pour cette raison que je voulais « mettre un peu de distance » dans la relation entre la personne aidante et la personne aidée… pour voir ce qui se passerait. Stéphanie m’a spontanément répondu : « C’est drôle, ici, c’est l’inverse. Tu me dis que pour certains étudiants de cégeps offrant des services d’aide en présence, il y a peut-être un besoin de distance alors qu’ici, j’ai l’impression que pour certains étudiants, il y a plutôt un manque de présence! » C’est ainsi que quatre cégeps « en présence » et un cégep « à distance » se sont engagés dans le projet. D’un côté, on a ajouté de la distance, et de l’autre, on a créé un service d’aide à distance synchrone, de manière à y insuffler « une dose de présence ».

Les points de vue des responsables de CAF participants…

Sur la création des stratégies d’aide à distance

Comme il s’agissait d’une étude en contexte naturel, chaque responsable (ou équipe de responsables) de CAF pouvait créer ses propres formules de soutien à distance, en fonction des réalités de son établissement et de son centre d’aide. L’étude visait notamment à explorer l’efficacité de ces services, de manière indépendante entre les établissements, étant donné la grande diversité des réalités et des modes de fonctionnement des CAF du réseau collégial. La création des stratégies d’aide à distance a été beaucoup plus compliquée que ce que j’avais imaginé d’emblée, d’un point de vue extérieur (et naïf?). Plusieurs questions de logistique ont rapidement émergé. Je me souviens d’avoir participé à un remue-méninge avec les responsables d’un CAF, dont l’objectif était justement de réfléchir aux modalités d’implantation d’un service d’aide à distance. J’ai été déconcertée par tous les problèmes de logistique soulevés au fur et à mesure du processus de création. Par exemple, dans un CAF où certains tuteurs sont rémunérés, comment arriver à témoigner de leurs heures de travail… à distance? Et si trop de demandes nous sont acheminées par courriel, comment arriver à répondre à tout le monde? Éthiquement, nous ne pouvons quand même pas laisser une demande d’aide sans réponse! En même temps, j’ai été subjuguée par la capacité d’adaptation des gens autour de la table : des solutions étaient émises, discutées, mises de côté, remplacées par d’autres… jusqu’à ce qu’un plan de match se dessine enfin. Dans un autre établissement, il était impossible de créer le service d’aide à distance à même la structure du CAF : il a donc fallu faire autrement. Une personne du service du cheminement scolaire a pris le projet sous son aile et a œuvré à son développement, avec le soutien et les conseils de gens du CAF et de divers services de l’établissement. Dans un autre cégep, de l’aide en français était déjà offerte à distance, mais réservée aux étudiants qui vivaient loin du cégep et suivaient leurs cours à distance. L’accès aux services a donc été élargi à l’ensemble des étudiants de ce cégep. Tous les établissements participants semblaient avoir pensé à tout. Des instruments de suivi des aidés avaient été créés et mis en place. Des tuteurs étaient formés et préparés. Tout semblait donc faisable et prêt à être implanté. Mais une première surprise est apparue.

Sur l’implantation des services

Durant l’implantation, à l’automne 2019, nous avons réalisé que très peu d’étudiants optaient pour les nouveaux services d’aide à distance qui leur étaient offerts. Il y a même un cégep où personne n’a choisi l’aide à distance. J’ai été trrrrrrès surprise, car il s’agissait de la principale solution émise par les étudiants eux-mêmes pour répondre à l’enjeu de la non-fréquentation des CAF (Cabot et Facchin, 2020). Certaines situations rendaient les tuteurs et les responsables particulièrement perplexes :

« Les étudiants qui étaient intéressés par l’aide à distance, même avec eux, ça fonctionnait mal. Par exemple, on leur envoyait des choses et ils ne répondaient pas ou ne regardaient pas tous leur vidéo de rétroaction personnalisée. »

Des responsables de CAF ont rapporté que pour certains étudiants, une partie du problème semblait relever du caractère nouveau ou inconnu de la distance dans la relation de soutien :

« Quand on leur offrait le service, des étudiants nous disaient : “En ligne, je suis moins à l’aise.” »

Dans d’autres cas, des étudiants se présentaient au CAF, puis acceptaient cette option lorsque l’aide en présence était impossible, comme par dépit. Alors, qu’en était-il de ceux et celles qui ne se présentaient tout simplement pas? Ceux-là et celles-là mêmes que je désirais atteindre par cette nouvelle formule d’aide? En plus, cette situation faisait en sorte que je me retrouvais avec trop peu d’utilisateurs pour arriver à évaluer l’impact des nouvelles mesures implantées.

« C’est comme si le besoin était là, identifié et exprimé clairement, sans qu’on arrive à mettre les choses correctement en place et sans que les étudiants, même ceux intéressés, soient efficaces à l’utiliser [la nouvelle formule d’aide]. »

Un des cégeps a même demandé à poursuivre la démarche d’évaluation à l’hiver suivant, en annonçant la mise en place d’un service d’aide à distance spécifique à la préparation de l’épreuve uniforme de français, espérant ainsi intéresser plus d’étudiants et faire connaitre le CAF. J’ai accepté de refaire une collecte de données, et le comité d’éthique a approuvé la démarche. La première collecte de données a eu lieu en janvier… puis une deuxième surprise est arrivée : la pandémie de COVID-19 (rien que ça!).

Sur l’arrivée de la pandémie… et la généralisation de l’aide à distance

Pendant deux semaines, tout s’est arrêté. Effectivement! C’est ce qui s’est passé. À la grandeur du pays. De la planète. Comme un état de surprise, mêlé de peur, mêlé de contentement coupable devant ce petit congé imprévu. Puis, le petit congé s’est prolongé, le contentement qu’il a pu apporter au début s’est transformé en inquiétude, la situation s’est aggravée, mais la vie devait continuer. Les cours ont repris, et la réalité des difficultés à maitriser la langue était toujours présente. Il fallait continuer à soutenir les étudiants qui en avaient besoin pour réussir. Les responsables et tuteurs ont retroussé leurs manches :

« On a utilisé ce temps-là pour apprendre de manière intensive. Je n’aurais jamais eu le temps, en temps normal, de faire tout ce que j’ai fait à ce moment-là. »

Les intervenants des CAF ont appris, concrètement, à utiliser tous les outils disponibles pour favoriser la transition en ligne. Le développement de leurs compétences technopédagogiques a été au centre de leur vie professionnelle, comme pour tous les acteurs du domaine de l’éducation, y compris les étudiants.

« Tu sais, des fois, un conseiller pédagogique te fait de bonnes suggestions mais “tu l’vois pas”, ou d’autres fois, il peut faire des suggestions plus ou moins adaptées à notre réalité, car il est de l’extérieur et ne voit pas précisément nos besoins et réalités… Maintenant, je comprends comment tout ça [les outils technologiques] fonctionne, alors je serai plus en mesure de proposer des solutions [ajustées aux besoins]. »

Les stratégies élaborées au cours de l’année précédente par les responsables de CAF participant à l’étude, et qui étaient jusqu’alors sous-utilisées en raison de l’absence d’étudiants optant pour l’aide à distance, sont tout à coup devenues une base de travail très intéressante.

« Pour nous, ça a été possible, parce qu’on était déjà préparés à ça, par notre participation à l’étude. C’était un projet pilote, mais au final, ça a permis d’être déjà prêts pour être opérationnels en deux semaines avec l’arrivée de la COVID […] C’est un beau hasard. »

Les compétences développées pour les fins de l’étude ont été reconnues par des collègues ainsi que par des services externes aux CAF qui savaient que cette initiative se déroulait dans leur cégep :

« Étant donné mon expérience dans le projet, à l’arrivée de la pandémie, moi, j’étais déjà prête à fonctionner en virtuel. J’ai fait ce switch en claquant des doigts. Et même que, comme le projet était connu par plusieurs personnes dans le collège, qui regardaient ça de loin, tout à coup, il y a des gens avec qui je n’avais jamais collaboré qui m’ont contactée, par exemple la Formation continue : j’ai pu partager mes outils déjà prêts [grâce à l’étude]. J’ai tout à coup senti comme une reconnaissance des compétences que j’avais développées dans le cadre de l’étude… À ce moment-là, j’avais une longueur d’avance. »

Sur ce qu’ils ont créé, concrètement

Les responsables de CAF interviewés sont fiers de ce qu’ils ont mis sur pied durant la pandémie. Et il y a de quoi l’être! Une grande diversité de solutions ont été trouvées en un temps record. Ce foisonnement a été constaté dans l’ensemble du réseau des cégeps et des universités. En effet, le CCDMD a organisé deux Intercaf virtuels auxquels plus d’une cinquantaine de responsables de CAF collégiaux et universitaires ont participé (Boudreau, 2020). Des initiatives de collaboration ont été mises en œuvre pour rendre les CAF encore plus efficaces dans l’élaboration de mesures de soutien à distance et pour favoriser l’échange d’expertises (par exemple, une communauté de pratique Intercaf a été constituée via la plateforme Teams[2]). Ces rencontres et échanges ont été très profitables pour tous. Les CAF ayant participé à l’étude ont aussi nourri ce bouillonnement créatif, tirant notamment parti des ressources offertes par les plateformes collaboratives en ligne pour déployer l’aide à distance.

« Dans Teams, on a ouvert des canaux. Chaque canal porte le nom d’un aidé… Ça pourrait [dorénavant] être pour tous les aidés du CAF. L’accès pourrait être pour un prof, un tuteur et l’aidé. Donc je n’aurais pas besoin d’être toujours là, mais j’aurais accès à tout, au besoin. »

Avant la crise, un des besoins exprimés par les étudiants était de pouvoir obtenir du soutien en dehors des heures d’ouverture du CAF, surtout les soirs et les fins de semaine. Ce besoin était très difficile à satisfaire, notamment en raison des difficultés que posait la gestion du travail à distance des tuteurs et des tutrices (suivi des heures rémunérées, encadrement pédagogique, etc.). Aujourd’hui, cette option est beaucoup plus facilement envisageable!

« Le tuteur peut enregistrer ses entrevues avec l’aidé et toutes les preuves, les exercices envoyés… On aurait donc la possibilité de valider au besoin. »

Bref, les solutions étaient là, mais on ne les voyait pas, malgré tous les remue-méninges d’équipe et les efforts déployés durant la planification de l’étude. On dirait qu’il fallait la situation d’urgence pour que ces possibilités apparaissent plus nettement. J’ai remarqué cela aussi dans ma propre pratique d’enseignante : toutes sortes de pratiques efficaces ont été développées alors qu’elles auraient aussi été les bienvenues avant l’état d’urgence. À titre d’exemple :

« Avec un texte et Teams, ils peuvent prendre en photo leur texte et nous l’envoyer : nous, on peut les annoter… »

Un CAF a conçu un guide de « l’étiquette du savoir-être » en mode virtuel, car durant l’implantation de l’étude, des tuteurs avaient remarqué que l’attitude de plusieurs étudiants aidés n’était pas appropriée.

« Être carrément couché sur son lit, ou texter dans la face de la tutrice qui est en train de te parler… C’est comme si l’ordinateur faisait une barrière, comme s’il n’y avait plus ce côté plus respectueux ou professionnel dans l’attitude. Comme s’il n’y avait plus de “bulle”. »

En somme, de nombreuses idées mijotées ou actions entreprises en phase d’expérimentation (dans le cadre de l’étude) ont trouvé leur concrétisation effective à cause de (ou plutôt grâce à) la pandémie.

« La pertinence du besoin à la base de l’étude a pris une dimension tout à fait inattendue… Ça aurait pu tomber, on aurait pu se décourager et revenir dans nos anciennes bottines. Tout ce que j’aurais mis sur pied pour le projet n’aurait peut-être pas autant servi. Mais là, étant donné le contexte imprévu, ça a vraiment été profitable. »

Sur la suite…

En cette année scolaire 2020-2021, les établissements postsecondaires ont eu les deux pieds dans l’enseignement à distance. Tout le monde, étudiants comme enseignants, a pris de l’expérience. À l’hiver 2021, certains profs ont même eu le luxe de se sentir à une étape de peaufinage des pratiques à distance développées depuis avril 2020. Pour les étudiants, les pratiques pédagogiques à distance n’ont plus de mystères.

« Là, ils vont avoir vécu un long moment leur scolarité à distance et vont avoir développé les habiletés qui vont permettre de répondre aux besoins qui avaient été soulevés par la recherche sur les raisons de non-fréquentation… »

« Ça va nous avoir permis de développer nos compétences et ça va avoir permis aux étudiants d’apprivoiser la distance dans l’apprentissage… J’imagine que ça va convenir à plus de monde après ces évènements-là. »

Lors de l’étude préliminaire sur les raisons de non-fréquentation des CAF, les étudiants consultés croyaient déjà que ce type de service « conviendrait » à un grand nombre de leurs pairs, alors que cela ne s’est pas observé dans les faits, une fois ces services rendus accessibles à l’automne 2019. On peut imaginer que cette année scolaire complète passée en mode virtuel aura permis de démystifier une bonne fois pour toutes les modalités d’aide à distance et de vaincre les réticences de certains étudiants à y recourir pour obtenir un soutien en français.

« Les résultats [de l’étude préliminaire] montraient qu’il y avait un besoin en ce sens-là, pouvoir recevoir de l’aide à distance et de manière hybride et variée. Là, ça va se déployer. »

Un des responsables explique qu’aujourd’hui, ayant acquis plusieurs compétences technopédagogiques durant le printemps et l’été 2020, les responsables des CAF postsecondaires se sentent eux-mêmes plus légitimes de former les tuteurs de leur CAF afin qu’ils et elles puissent donner de l’aide à distance :

« Dans la formation de nos tuteurs, [on a ajouté] des heures pour les préparer à donner de l’aide en ligne. Jusque-là… tu ne [pouvais] pas te mettre à enseigner quelque chose que tu ne connais pas ou que tu n’as pas expérimenté. Là on peut. »

Vers la fin des entrevues, j’ai demandé aux responsables comment ils entrevoyaient les prochaines sessions. Tous considèrent qu’il va y avoir un « avant » et un « après » [pandémie], dans les CAF. Une des responsables m’a affirmé croire que la recherche aurait bénéficié d’un échantillon très différent si elle avait eu lieu après la pandémie :

« J’ai hâte de voir, disons à l’automne 2021, quand la situation sanitaire sera redevenue normale. Selon moi, on va continuer à offrir le choix, à tous les étudiants, du service tant en présentiel qu’en virtuel, maintenant que tout est bien mis en place. Et même, je serais curieuse de voir si les étudiants vont choisir plus une formule que l’autre, maintenant que tous connaissent bien les deux possibilités. Car là, ils auraient vraiment le choix, car ils auraient testé les deux formules, même au niveau de l’enseignement. Là, ce sera intéressant de voir vers quoi ils iraient plus naturellement… C’est comme si avant [la pandémie], c’était un choix entre quelque chose de connu et quelque chose d’inconnu, sans qu’on y ait pensé… c’était donc un choix biaisé, en quelque sorte. Alors que là, ce sera un vrai choix. »

* * *

J’avoue que cette étude m’aura donné bien du fil à retordre! J’ai l’habitude de planifier des recherches de manière très détaillée, pour parer à tous les imprévus (il y en a TOUJOURS en recherche!) et pour livrer au réseau collégial des réponses aux questions de recherche qui puissent être utiles à divers niveaux, jusqu’aux étudiants, ma principale source de motivation à faire ce travail. Dans le cas de cette étude, bien que beaucoup d’énergie ait été déployée dans sa planification, les deux « surprises » relatées précédemment m’ont dépassée. En effet, je ne peux pas répondre à la question initiale de la recherche et fournir aux CAF des résultats qui permettent de savoir si leurs services à distance sont efficaces pour les étudiants qui n’auraient pas eu tendance à se présenter sur place. Toutefois, en mijotant tout cela durant l’été 2020, j’ai réussi à trouver une question pertinente à laquelle mes données de recherche pouvaient répondre. Ainsi, j’ai pu fournir des résultats fiables qui contribuent à confirmer l’efficacité des CAF, constat établi par l’observation d’une performance plus élevée en français de leurs utilisateurs, comparativement à celle de non-utilisateurs au profil équivalent (Cabot, soumis). J’arrive donc, malgré tout, à fournir des résultats probants au réseau des CAF. Fiou! Il était moins une! On dit que la réussite d’une tâche perçue comme étant très difficile mène à un sentiment d’accomplissement plus gratifiant que celui associé à une tâche qui se déroule sans trop de difficultés. Eh bien laissez-moi vous dire que je suis particulièrement fière de cette étude!

* * *

Références

BOUDREAU, J.-P. (2020). « Les CAF au temps du confinement : retour sur une rencontre virtuelle mobilisatrice », [En ligne], Correspondance, vol. 26, no 1. [https://correspo.ccdmd.qc.ca/index.php/document/les-caf-au-temps-du-confinement-retour-sur-une-rencontre-virtuelle-mobilisatrice/].

CABOT, I. (soumis). Utilisateurs et non-utilisateurs des centres d’aide en français au postsecondaire : une étude comparative par la méthode d’appariement cas-témoin. [À paraitre en 2021].

CABOT, I. (2017). Application et évaluation du feedback audiovidéo personnalisé, [En ligne], Rapport de recherche PAREA, Cégep Saint-Jean-sur-Richelieu. [https://eduq.info/xmlui/bitstream/handle/11515/35238/cabot-feedback-audiovideo-personnalise-cstj-PAREA-2017.pdf?sequence=2&isAllowed=y].

CABOT, I., et S. FACCHIN (2020). « Identification des raisons de non-fréquentation des centres d’aide en français du postsecondaire au Québec », [En ligne], Revue internationale de pédagogie de l’enseignement supérieur, vol. 36, no 1. [https://journals.openedition.org/ripes/2406].

FACCHIN, S. (2018). La rétroaction traditionnelle ou technologique? Impact du moyen de diffusion de la rétroaction sur la persévérance et la réussite scolaires, [En ligne], Rapport de recherche PAREA, Cégep à distance. [https://cegepadistance.ca/wp-content/uploads/2018/02/La-retroaction-traditionnelle-ou-technologique_Impact-du-moyen-de-diffusion-de-la-r%C3%A9troaction-sur-la-pers%C3%A9v%C3%A9rance-et-la-reussite-scolaires.pdf].

  1. I. CABOT, De l’aide virtuelle ou en présence? Le spectre des possibles d’un centre d’aide hybride. Effets sur la motivation, la réussite et la persévérance scolaires, rapport à venir en 2021. [Retour]
  2. Pour joindre cette communauté de pratique, veuillez contacter Dominique Fortier, chargée de projets au CCDMD, à l’adresse suivante : dfortier@ccdmd.qc.ca. [Retour]

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