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«Surmonter sa dyslexie pour les nuls»

«Surmonter sa dyslexie pour les nuls»

Graphisme simple et percutant, couverture jaune, noire et blanche, approche simplificatrice et humoristique : tout le monde connaît cette collection qui s’autoproclame destinée « aux nuls » et qui compte des centaines de titres. En effet, il semble – consternante découverte – que la nullité n’ait guère de limites et qu’elle se décline dans bien des sujets : cuisine, feng shui, photo numérique, traitement de texte, économie… Il existe même, tenez-vous bien, des titres tels Léonard de Vinci pour les nuls, La littérature française pour les nuls (eh oui !), et celui-ci, particulièrement savoureux : Les thérapies comportementales et cognitives pour les nuls. Se surprendra-t-on alors qu’une série avec de telles prétentions à l’exhaustivité (ou de telles visées mercantiles) se soit penchée sur les troubles d’apprentissage ? Cela donne (en anglais, car la traduction n’existe pas encore) Overcoming dyslexia for dummies[1].

Ce livre s’adresse principalement aux parents d’enfants dyslexiques, mais aussi aux dyslexiques eux-mêmes et aux professeurs qui doivent intervenir auprès d’eux, nous annonce l’auteure, Tracey Wood, dans son introduction. Dans les faits, seuls les parents d’enfants dyslexiques fréquentant une école primaire dans le système scolaire américain seront intéressés par l’ensemble du livre, mais les autres pourront y glaner des stratégies et des trucs intéressants et, en prime, souvent ludiques.

Une fois les faits et les définitions d’usage établis – rapidement et sans trop de nuances : la dyslexie est d’ordre neurologique ; elle modifie le rapport au texte écrit d’une personne et la rend moins performante en lecture et en écriture ; elle ne peut être guérie, mais il est possible, par des stratégies efficaces et beaucoup de travail, de compenser ses effets –, Tracey Wood entreprend d’accompagner les parents d’un enfant atteint de ce trouble d’apprentissage dans son parcours scolaire. Si les premiers chapitres traitent des enfants d’âge préscolaire et de leur entrée au primaire, les suivants parlent plutôt des adolescents dyslexiques, puis, brièvement, des défis que présente la dyslexie dans la vie adulte. Le livre se clôt sur des listes, dont celle, très terre à terre, des dix outils qui rendent la vie d’un dyslexique plus simple (parmi ceux-ci : un crayon à l’encre effaçable et un bon traitement de texte) et de dix programmes de lecture. Viennent aussi, en annexes, des listes de ressources spécialisées, dont plusieurs se retrouvent dans Internet : associations, cliniques de lecture, groupes de défense des droits de la personne, etc.

On ne peut que regretter le fait que presque toutes ces ressources soient destinées aux dyslexiques américains, car on constate par le fait même que le dossier des troubles d’apprentissage, chez nos voisins du sud, semble avoir progressé plus rapidement que chez nous. C’est particulièrement vrai dans les écoles primaires publiques, où le processus de diagnostic et de prise en charge des enfants souffrant de troubles d’apprentissage semble infiniment plus rodé qu’au Québec. Mais, justement, le recours aux démarches judiciaires – une autre spécificité américaine – est assez fréquemment évoqué dans les quelque 350 pages de ce manuel…

Par ailleurs, l’auteure, qui a déjà dirigé une clinique de lecture, possède une incontestable expérience en enseignement et un sens très développé de la pédagogie. Plusieurs conseils méthodologiques qu’elle offre aux élèves dyslexiques bénéficieraient, en fait, à tous les étudiants : prise de notes efficace, lecture proactive, carte mentale, etc. Elle vante également les mérites d’une pédagogie multisensorielle, c’est-à-dire d’une pédagogie qui sollicite le plus de sens possible chez l’apprenant ; le mouvement et le toucher, particulièrement, ne sont pas exploités dans la salle de classe, et pourtant ceux-ci aideraient les élèves dyslexiques à intégrer certaines notions.

L’expérience de l’auteure transparaît aussi dans le souci qu’elle a, tout au long de l’ouvrage, de commenter les effets négatifs de la dyslexie sur l’estime de soi d’un élève, ainsi que les conséquences dévastatrices des commentaires excédés d’un professeur ou d’un tuteur sur un élève dépassé par l’ampleur de la tâche à accomplir. La dyslexie, trop souvent, passe pour de la paresse ou de l’imbécillité aux yeux des personnes qui ne connaissent pas la réalité des troubles d’apprentissage et, de fait, se traduit parfois par les mêmes symptômes : devoirs non faits, incapacité à comprendre des instructions simples ou des textes pourtant faciles, graphie illisible, etc. Tracey Wood insiste donc sur l’importance de revaloriser les élèves aux prises avec la dyslexie, mais aussi de les responsabiliser par rapport à leurs besoins spécifiques ; elle montre que la famille, les amis et les intervenants du milieu scolaire ont un rôle crucial à jouer dans le parcours de ces élèves éprouvés.

Ce livre n’est malheureusement pas encore offert en français, mais on peut aisément comprendre ce retard : plusieurs sections d’exercices phonologiques suggérés ne doivent pas seulement être traduits, mais plutôt totalement adaptés pour les apprenants dyslexiques francophones. Par ailleurs, les références (de méthodes, d’organismes, de sites Internet), généreusement fournies tout au long du livre, ainsi que les parcours d’études suggérés, s’adressent à un public anglophone, voire à un lectorat spécifiquement américain.

On pourra aussi être agacé par les redondances fréquentes, l’hypersimplification de quelques concepts, l’abus de listes synthèses et les conseils un peu naïfs qui se retrouvent parfois dans le manuel, même s’il s’agit là, à l’évidence, de travers assumés, liés à une politique éditoriale adaptée à cette nullité du lectorat cible, et aussi au fait que plusieurs parents d’enfants dyslexiques sont eux-mêmes dyslexiques. Finalement, les professeurs sourcilleront sans doute devant certains passages du chapitre 10 (« Working productively with your child’s teacher[2] »), où l’auteure, dans ses conseils aux parents, semble parfois perdre de vue la lourdeur de la tâche des enseignants, qui doivent composer avec des classes nombreuses.

Néanmoins, Overcoming dyslexia for dummies se lit aisément et constitue une façon simple de s’initier à la réalité des dyslexiques ; les professeurs (même s’ils ne sont pas nuls !) y trouveront des informations claires, des stratégies inventives et quelques pistes inspirantes.

  1. WOOD, Tracey, Overcoming dyslexia for dummies, Hoboken, Wiley Publishing Inc., 2006, 362 pages. Retour
  2. Que l’on pourrait traduire par : « Travailler en collaboration avec le professeur de votre enfant ». Retour
Apprendre sur les troubles d’apprentissage (TA)

Vous voulez en savoir plus sur les troubles d’apprentissage, la dyslexie, la dysorthographie ? Vous devez enseigner à des élèves atteints de tels troubles, ou encore, vous les recevez dans votre centre d’aide en français ? Vous voudriez mieux comprendre leurs problèmes et employer les méthodes pédagogiques les plus appropriées pour leur venir en aide ?

Dans le cadre d’un projet du service d’aide à l’intégration des élèves (saide) du cégep du Vieux Montréal, une orthopédagogue et une professeure de français vous offrent une formation sur mesure portant sur ces élèves et leurs besoins particuliers. Les séances de formation auraient probablement lieu le mercredi.

Deux ateliers, l’un sur le soutien à la correction et l’utilisation du logiciel antidote, l’autre sur la lecture assistée par ordinateur et l’utilisation de l’application readplease, particulièrement utiles pour les élèves qui présentent des troubles d’apprentissage, sont également offerts.

Si la formation concernant les TA et la pédagogie vous intéresse, communiquez avec M. Daniel Fiset, au 514 982-3437, poste 2199. Pour les ateliers informatiques, communiquez avec M. Marc tremblay, au 514 982-3437, poste 2009.

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