Les pratiques à impact élevé: une boite à outils pour un cours défi
Le premier cours de formation générale en littérature, Écriture et littérature, lourd de sa réputation de cours défi, ne séduit pas d’emblée la communauté étudiante. La Fédération des cégeps (2021) souligne d’ailleurs qu’« [a]u secteur francophone, les cours de français et littérature et de philosophie sont moins bien réussis que les autres cours de première année » (p. 31). Par ailleurs, dans notre cégep, les groupes, assez grands, sont souvent composés d’individus venant de différents programmes. J’y voyais le terreau idéal pour mettre en place les pratiques à impact élevé (PAIE), c’est-à-dire des pratiques reconnues par la recherche qui facilitent le chemin menant à la réussite des étudiantes et étudiants.
En effet, ces pratiques ont une incidence directe sur leur engagement. Et ce n’est pas un secret : la réussite du premier cours de littérature au collégial demande un grand degré d’engagement de la part des étudiantes et étudiants.
Bienvenue dans le récit de la petite révolution des gestes simples!
En quoi consiste le programme PAIE du cégep de Shawinigan?
Pour plusieurs, enseigner est un métier plutôt solitaire : seul dans sa classe, seul avec ses copies à corriger, seul avec ses réflexions et ses remises en question. Le programme PAIE de notre établissement vient, à sa manière, briser cette solitude. Il se veut un moment de partage, une communauté d’apprentissage, comme le définit si bien Linda Cormier, ancienne conseillère pédagogique au service d’animation et de développement pédagogiques (SADP) du cégep de Shawinigan et initiatrice de ce projet innovateur.
Imaginons avoir un espace-temps commun pour s’arrêter et poser un regard réflexif sur notre métier. À cette réflexion s’ajoutent des échanges avec une dizaine de collègues qui enseignent différentes disciplines, collègues que nous croisons dans les corridors de notre cégep, mais avec qui nous n’avons jamais vraiment eu l’occasion de discuter. Nous sommes maintenant assis à la même table une demi-journée par semaine pendant toute une année scolaire. Dans un climat bienveillant, chaleureux, empreint d’humilité et d’ouverture, nous échangeons et, bien que tout semble nous éloigner, que ce soit la matière enseignée ou les années d’ancienneté, nous réalisons que nous partageons les mêmes questionnements, les mêmes incertitudes, des défis semblables et une même passion pour notre travail. Julie Provencher, conseillère pédagogique au SADP qui anime dorénavant le groupe, le nourrit en lectures, suscite des réflexions et l’accompagne dans cette plongée vertigineuse dans les pratiques à impact élevé.
Quatre volets sont couverts au fil de l’année de formation, qui correspondent aux axes des pratiques à impact élevé en enseignement mis en avant dans le rapport La réussite au cégep : regards rétrospectifs et prospectifs (Fédération des cégeps, 2021), mené par Carole Lavoie :
- la relation pédagogique (caractéristiques de la relation professeurs-étudiants);
- les stratégies pédagogiques (caractéristiques des méthodes pédagogiques);
- la planification (structuration de l’enseignement);
- l’évaluation (caractéristiques de l’évaluation des apprentissages).
Synthèse des pratiques à impact élevé en enseignement selon la recherche (Fédération des cégeps, 2021, p. 54)
Ces quatre volets ont été approfondis et répartis tout au long de la formation, ce qui a permis aux personnes participantes d’échanger, d’expérimenter et de transposer ces découvertes pédagogiques dans leur pratique.
La posture réflexive et la révolution des gestes simples
Carole Lavoie le souligne dans son rapport : pour le professeur ou la professeure, la pratique réflexive devient un atout de taille, car elle permet d’évaluer et de réajuster en continu la portée de ses interventions.
Dès les premières rencontres du programme PAIE, j’ai eu la sensation d’être frappée par un éclair de lucidité, comme si, à partir de ce moment, surgissait à mon esprit chacun des gestes pédagogiques posés dans le cadre de mes fonctions d’enseignante. D’abord prise de vertige devant la profondeur et l’ampleur de mon rôle, j’ai dû accepter de ne pas pouvoir tout faire, prendre conscience de mes limites, de mes forces, de mes faiblesses. Avec une bonne dose d’humilité, puis avant de céder à la panique, j’ai appris à me ramener à l’essentiel.
La révolution, ici, qui se construit à coup de petits gestes (parfois nouveaux, parfois coutumiers), vient du fait que nous comprenons leur raison d’être et leur portée. Ils prennent tout leur sens pour nous, enseignantes et enseignants, et auront probablement plus d’effet sur les étudiantes et étudiants, qui en sentiront davantage l’intention. De plus, derrière ces gestes s’enracine une pratique, et c’est à ce moment que notre rôle acquiert de la profondeur : là débute la petite révolution.
Bien que les quatre volets des pratiques à impact élevé soient imbriqués et interreliés, j’ai tenté ici de les traiter un à la fois.
La relation pédagogique : une classe où l’on se sent chez soi
Dès le début d’une session avec un tout nouveau groupe, je me dis qu’avant même de penser à la matière à couvrir, je dois créer un lien significatif avec ces individus. Je veux les connaitre. Pourquoi? Parce que je sais pertinemment que plusieurs ont besoin de se sentir reconnus et concernés pour ensuite s’investir et finalement avoir une chance de réussir ce cours. Je l’avoue, je mise beaucoup sur la relation pédagogique, particulièrement dans ce cours de première session…
Par des gestes simples, parfois prévus, parfois spontanés, je m’intéresse à mes étudiants et étudiantes, à leur parcours, à leurs difficultés. Pendant notre première rencontre, je leur soumets quelques questions par écrit : « Raconte-moi ton histoire avec la langue française. Est-ce une histoire d’amour, de peine? Quelles sont tes attentes par rapport à ce cours? Quel est ton niveau de motivation sur 10? » Je les invite aussi à me nommer ce qui pourrait m’aider à mieux les aider.
Avec une trentaine d’individus dans un groupe, il est difficile de nouer, de personnaliser et d’entretenir toutes ces relations à la fois. En fait, c’est impossible. Je construis donc un espace commun, qui leur appartient aussi. Ma classe, c’est notre classe; c’est un chez-soi où il fait bon être. Pour ce faire, je descends du traditionnel piédestal de l’enseignante, je fais partie intégrante du groupe, je sillonne les rangées pour offrir mon aide, je montre ma vulnérabilité – je fais des erreurs, je ne connais pas tout non plus –, je prends le temps d’écouter mes étudiantes et étudiants, je les respecte. Dans cette posture, les personnes qui auront besoin d’aide hésiteront peut-être moins à venir vers moi.
Je me dis aussi que Montaigne, précurseur de l’éducation humaniste[1], avait raison : et si la solution était de les convier à la littérature? Aujourd’hui, cette classe idéale de Montaigne prendrait peut-être la forme d’un environnement sécurisant et bienveillant où chaque personne se sent respectée et écoutée. Les questionnements ou les inquiétudes passent bien avant la matière. De ce fait, je n’hésite pas à interrompre une explication pour prendre le temps de jaser avec mes étudiantes et étudiants. Je leur laisse la liberté de prendre la parole ou non, de travailler en équipe ou non. À la fin du cours, je quitte toujours le local la dernière; les plus timides attendent souvent ce moment pour poser leurs questions. Et surtout, je les accepte comme ils et elles sont avec leurs regards endormis, leurs opinions franches ou leur faible motivation. Nous savons qu’un apprentissage de qualité passe par la dimension affective et qu’un individu sera beaucoup plus ouvert à s’engager s’il évolue dans un environnement bienveillant, comme l’a mis en lumière Kozanitis (2015). Le plus beau poème de la Renaissance n’aura aucun écho auprès des étudiantes et des étudiants si celui ou celle qui le leur présente n’a pas gagné leur confiance ni si la classe constitue un lieu inhospitalier et froid.
La Fédération des cégeps (2021) rappelle d’ailleurs que les meilleures pratiques en matière de relation pédagogique mènent à l’établissement d’un climat de classe sécurisant et à des relations solides avec les groupes et les individus, le tout alimenté par la conviction que chaque personne a tout ce qu’il faut pour réussir. Finalement, favoriser la réussite des étudiantes et étudiants grâce à la relation pédagogique, c’est les accompagner lentement mais surement et croire en leurs capacités. C’est leur donner notre confiance et leur faire savoir qu’on a misé sur eux!
Les méthodes pédagogiques : ce n’est pas parce que nous enseignons l’époque classique que notre enseignement doit l’être!
L’importance que j’accorde à la relation pédagogique a donné le ton dans ma classe : je préfère quitter la place du maitre pour me mêler à mon groupe. D’une part, cette posture de la spécialiste de contenu transmettant la matière comme une grande oratrice ne me convenait pas. D’autre part, j’y voyais un frein supplémentaire à la construction d’une passerelle entre mes étudiantes et étudiants et le corpus à explorer, soit des œuvres des 16e et 17e siècles. Je me dis que, pour convier les jeunes à cette littérature, aussi bien marcher à leurs côtés.
Passer du paradigme de l’enseignement à celui de l’apprentissage : ce sont de belles paroles, mais les défis sont considérables. Comment, par ailleurs, rendre significative la littérature française des 16e et 17e siècles pour des jeunes de 17 ou 18 ans? Comment se rapprocher de leur réalité tout en atteignant la compétence du cours? Comment susciter leur motivation? Leur engagement? Comment calmer leur insécurité face à ce cours qui traine avec lui sa triste réputation? Loin d’être complètement satisfaite de mes méthodes pédagogiques (que je cherche à améliorer continuellement), je présente tout de même quelques exemples de celles que j’ai mises en place.
L’idée de l’atelier que je décrirai ici ne vient pas de moi, mais de collègues qui avaient vu juste. Je ne suis donc pas la seule à le mettre en pratique. Dans un exercice formatif, les étudiants et étudiantes choisissent une chanson de langue française, et ce, peu importe son origine. Individuellement ou en équipe, ils et elles amorceront le processus de son analyse. Je les mets ainsi en contact avec les deux premiers éléments de la compétence (analyser des textes littéraires) : « reconnaitre le propos du texte », puis « repérer et classer des thèmes et des procédés stylistiques » (Ministère de l’Éducation et de l’Enseignement supérieur, 2017, p. 12). Je forge leurs prochains réflexes d’analyse à partir d’un texte choisi, donc un texte qui leur parle. Je fais d’une pierre deux coups : je donne un espace à leur univers musical dans notre cours de littérature tout en abordant la compétence. Je me rapproche de mes étudiantes et étudiants, de leurs centres d’intérêt, de leur réalité. Et une fois ma présence légitimée dans leur univers, je leur tends la main et je les amène, à mon tour, dans un autre univers. Nous voyageons dans le temps et dans l’espace et nous nous retrouvons à la Renaissance française, dans l’univers poétique de différents auteurs et autrices. D’ailleurs, je prends aussi le temps de leur faire comprendre ce fossé entre ces œuvres et nous, un fossé géographique, temporel et culturel.
Puis, dans le corpus qui nous est alloué, je choisis des œuvres qui résonnent encore aujourd’hui : la déforestation avec le poème « Écoute bûcheron » de Pierre de Ronsard, la jeunesse folle et l’urgence de vivre avec « J’ai l’esprit tout ennuyé » du même auteur, etc. Nous étudions également les contes de Charles Perrault, contes que mes étudiantes et étudiants ont connus enfants, mais qui gagnent à être relus avec leur regard de jeunes adultes. Comment les œuvres du passé nous portent-elles à réfléchir sur notre présent? Même si l’analyse littéraire s’éloigne un peu d’une situation authentique, le propos, du moins, aura peut-être un écho.
Nous plongeons ensuite dans le contexte sociohistorique par de courtes lectures (de deux ou trois pages) à partir desquelles le groupe constituera, avec mon aide, un réseau de concepts qui permet de comprendre l’époque étudiée (son origine, ses caractéristiques, etc.). C’est à l’aide de ce réseau que mes étudiantes et étudiants pourront rédiger leur sujet amené. Je m’assure ainsi de rendre cet apprentissage plus actif, ce qui représente une des caractéristiques des pratiques à impact élevé.
Je leur propose aussi un voyage dans ma tête pour l’analyse d’un premier poème grâce à une activité de modelage. Je leur parle alors de mes hésitations et des moyens que je mets en avant pour contrer les impasses, j’insiste sur mes questionnements, je leur montre les outils utilisés pour m’aider, etc. Mes étudiantes et étudiants reconnaissent les principales étapes, car je reprends les mêmes que celles de l’analyse de leur chanson.
Puis, je les invite à choisir un poème parmi ceux du recueil et à plonger individuellement dans son analyse. Un peu plus tard, les jeunes partageront leurs découvertes en équipe, ce qui leur permettra de valider certaines informations, de se remettre en question et de profiter de ces échanges entre pairs. La dernière étape se fera en plénière, où chaque personne bénéficiera des trouvailles des autres.
L’apprentissage plus formel de la structure de l’analyse littéraire est abordé sous forme de casse-tête. En sous-groupes, les étudiantes et étudiants doivent remettre dans l’ordre les différentes parties d’une analyse et observer les indices leur permettant de reconnaitre l’ordre des pièces de ce casse-tête (les organisateurs textuels, les procédés langagiers, etc.). Cette activité, en plus de garder tout le monde actif, favorise du même coup l’apprentissage collaboratif, une autre composante des pratiques à impact élevé.
Partir de leur personnalité, de leurs centres d’intérêt, leur donner des choix, les mettre en action, varier les méthodes pédagogiques : voici des gestes qui encouragent l’adhésion des jeunes à la littérature et qui les mènent vers l’acquisition de la compétence.
Cependant, mettre en avant les pratiques à impact élevé, c’est vivre avec le doute qui nait de ce vieux réflexe de vouloir reproduire l’enseignement qu’on a soi-même connu comme élève il y a plus de 25 ans. C’est aussi accepter de se tromper dans nos expérimentations et d’apprendre de nos erreurs, exactement comme on le demande à nos étudiantes et étudiants.
La structuration de l’enseignement : et si on mettait un peu d’ordre?
Les pratiques à impact élevé en matière de structuration de l’enseignement englobent la planification de l’enseignement en fonction des objectifs à atteindre et des acquis ainsi que les attentes envers les apprenants et apprenantes, qui se doivent d’être non seulement explicites et élevées, mais également réalistes. Dans cet aspect de mon rôle, je me donne un peu moins droit à l’erreur. Sans planifier dans le moindre détail chacune des leçons ou les dates précises des évaluations, j’ordonne avec minutie les étapes (ateliers, exercices, lectures, etc.) menant progressivement à la rédaction de la première analyse. Je connais la séquence des petits pas qui conduiront à ce grand objectif, mais j’ignore la longueur des enjambées. Je me permets donc une souplesse dans le temps accordé aux apprentissages – je m’adapte au rythme de mon groupe, mais je respecte l’ordre prévu des apprentissages.
La matière de ce cours de littérature peut sembler assez abstraite pour plusieurs personnes dans ma classe. Je m’efforce donc de rendre explicite l’ordre dans cet apparent chaos. À quoi sert cet exercice? Que nous permettra-t-il de faire ensuite? En saisissant la logique derrière les activités, en comprenant ce qu’ils et elles sont en train de faire, mes étudiants et étudiantes pourront plus facilement s’investir dans la tâche.
La peur de niveler vers le bas tenaille tout le monde, moi la première. Cependant, depuis un certain temps, en parlant de mon cours Écriture et littérature, j’ose dire : moins, mais mieux! En replongeant dans le plan-cadre et en essayant d’échapper aux vieilles habitudes héritées d’un enseignement plus traditionnel, j’ai décidé de laisser tomber les grands parcours dans les dédales historiques afin de me concentrer sur la compétence centrale du cours : analyser des textes littéraires. Au lieu d’ensevelir mes étudiants et étudiantes de dates, de noms et d’anecdotes historiques, je cible les éléments essentiels pour qu’ils et elles puissent situer le texte et en approfondir leur compréhension. Cette restructuration laisse le champ libre pour l’analyse et pour les gestes significatifs qui y mènent. Je réduis le nombre d’auteurs et d’autrices à étudier, je détermine quelques œuvres seulement, mais je déploie l’arsenal des éléments d’analyse nécessaires à l’acquisition de la compétence. Ma posture d’enseignante devient celle d’une guide, qui marche tout près des apprenantes et apprenants, prête à tendre la main, à les ramener dans le droit chemin ou à les pousser un peu plus vers l’avant.
L’évaluation : contrôler ce qui est en notre pouvoir
La Fédération des cégeps (2021) a recensé plusieurs caractéristiques des pratiques à impact élevé en lien avec l’évaluation : une rétroaction fréquente qui donne l’heure juste sur les apprentissages, des moyens mis en place pour stimuler la métacognition, une évaluation critériée et équitable. Néanmoins, ce volet du programme est celui sur lequel j’ai l’impression d’avoir le moins de contrôle, car la nature des évaluations du cours Écriture et littérature est choisie par le département et respectée par toute l’équipe enseignante. Nous partageons aussi la même grille d’évaluation. Bref, tout tourne autour de l’analyse littéraire. Cependant, la réflexion est de mise. Avec mon collègue Jean-François Richard, également participant à la cohorte 2022-2023 du programme PAIE, je travaille à un projet de grille critériée. La réflexion est entamée et la discussion départementale est ouverte. Les travaux sont laborieux, mais combien stimulants!
Je rêve de cette grille critériée commune à tout notre département, mais en attendant, je concentre mes efforts sur ce que je peux contrôler. Je travaille plus précisément sur une rétroaction de qualité. Le programme PAIE m’a permis de prendre conscience de ce moyen puissant. Je peux maintenant, intentionnellement, améliorer cette rétroaction : je cherche à la diversifier (grille d’évaluation, commentaires oraux, commentaires écrits, le tout transmis parfois individuellement, parfois en groupe) afin de toucher un plus grand nombre d’individus (vive l’inclusion!); je cherche aussi à la personnaliser (chaque personne risque de se sentir beaucoup plus concernée et encouragée) pour que tout le monde puisse mieux se situer par rapport à l’acquisition de la compétence.
Puis, je travaille de plus en plus sur la prise de conscience, chez mes étudiantes et étudiants, des bons gestes à poser, ce que l’on nomme la métacognition. Au départ, je travaillais cette prise de conscience surtout chez ceux et celles qui perdaient facilement leur temps ou leur concentration durant une rédaction afin de leur donner un outil pour s’évaluer et s’autoréguler. Mais depuis que le programme PAIE m’a ouvert les yeux sur cette puissante pratique, j’ai bonifié mes actions : je propose à mes groupes des moyens pour la prise de notes (réseau de concepts, schéma, annotation, tableau, etc.), je les questionne sur leur méthode d’autocorrection, sur les changements à y apporter, etc. Ces pratiques métacognitives deviennent un outil précieux à réinvestir dans toutes sortes de circonstances (scolaires ou autres).
Quand, ensemble, nous formons le plus solide des filets
Dans son rapport, la Fédération des cégeps (2021) discute aussi des pratiques à impact élevé relatives à l’environnement éducatif. On fait référence non seulement à la classe et à l’enseignement, mais également à tout le reste du personnel de l’établissement (intervenants et intervenantes, personnel professionnel et de soutien, etc.), aux services offerts (centres d’aide, bibliothèque, etc.) et même aux activités parascolaires. Le programme PAIE m’a rappelé la richesse du travail d’équipe. Je cogne aux portes des intervenantes et intervenants. Je dirige mes étudiantes et étudiants vers les services. Je cherche par tous les moyens à tisser un filet pour favoriser leur réussite. Je veux que mes groupes comprennent que tout le cégep forme une équipe. Ma classe est, en quelque sorte, un espace commun. Même si ces intervenants et intervenantes n’y entrent pas nécessairement (quoique parfois oui), ces gens savent ce qu’il s’y passe. Ces collègues connaissent les défis que je rencontre et ceux que mes étudiantes et étudiants vivent. Nous cherchons ensemble une solution. Dorénavant, dans mon cas, l’enseignement n’est plus un métier solitaire. Je multiplie les collaborations et je discute plus que jamais avec mes pairs : ma motivation et mon degré d’engagement augmentent naturellement.
Le programme PAIE est en réalité un laboratoire sur les pratiques à impact élevé nous faisant vivre à nous, enseignantes et enseignants, ce que nous devrions à notre tour faire vivre à nos étudiantes et étudiants : un milieu sécurisant, une formation bien structurée, des stratégies variées, une posture réflexive. À mon avis, ce dernier aspect est la clé. Ce regard tourné vers soi, à la fois vif (parfois troublant) et bienveillant, est le début de notre petite révolution.
Références
CORMIER, Linda (2023). « Le projet PAIE : un programme de formation pour les enseignants et les enseignantes sur les pratiques à impact élevé », Éductive. [En ligne]. [https://eductive.ca/ressource/le-projet-paie-un-programme-de-formation-pour-les-enseignants-et-les-enseignantes-sur-les-pratiques-a-impact-eleve] (Consulté le 20 juin 2023).
FÉDÉRATION DES CÉGEPS (2021). La réussite au cégep : regards rétrospectifs et prospectifs, [En ligne], Montréal, La Fédération, 151 p. [https://fedecegeps.ca/wp-content/uploads/2021/10/rapport-la-reussite-au-cegep.pdf] (Consulté le 20 juin 2023).
KOZANITIS, Anastassis (2015). « La relation pédagogique au collégial : une alliée vitale pour la création d’un climat de classe propice à la motivation et à l’apprentissage », Pédagogie collégiale, vol. 28, no 4, p. 4-9. Également disponible en ligne : https://eduq.info/xmlui/bitstream/handle/11515/37481/Kozanitis-28-4-2015.pdf.
MINISTÈRE DE L’ÉDUCATION ET DE L’ENSEIGNEMENT SUPÉRIEUR (2017). Composantes de la formation générale. Extraits des programmes d’études conduisant au diplôme d’études collégiales (DEC), Québec, Gouvernement du Québec, 45 p. Également disponible en ligne : https://cdn-contenu.quebec.ca/cdn-contenu/adm/min/education/publications-adm/cegeps/services-administratifs/Composantes-formation-generale-cegeps.pdf.
MONTAIGNE, Michel de (1967). « De l’institution des enfants », dans Œuvres complètes, Paris, Gallimard, p. 147-177.
- Dans son essai « De l’institution des enfants », Montaigne dénonce, entre autres, l’enseignement traditionnel et l’autorité excessive. Par ailleurs, il promeut le développement du corps autant que celui de l’esprit, une souplesse dans l’enseignement et un environnement d’apprentissage agréable : « Combien leurs classes seroient plus decemment jonchées de fleurs et de feuilles que de tronçons d’osier sanglants! » (1967, p. 165). [Retour]
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