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L’analyse littéraire et l’enseignement de la langue au collégial

L’analyse littéraire et l’enseignement de la langue au collégial

Point de vue
Marie-Josée Dion enseigne la littérature au cégep de Saint-Laurent depuis huit ans. Elle vient de publier, chez Modulo éditeur, un ouvrage rédigé en collaboration avec Marie-Thérèse Bataïni : L’analyse littéraire, un art de lire et d’écrire. Dans cet article, elle nous expose en quoi, selon elle, l’analyse littéraire contribue à l’approfondissement des habiletés linguistiques.

En application depuis septembre 1994, la réforme Robillard a fourni, dans le domaine de l’enseignement de la langue à tout le moins, les balises nécessaires à l’élaboration d’activités correspondant véritablement à l’ordre collégial. Devenues depuis peu des « objectifs », les compétences associées à chacun des cours obligatoires remettent à l’honneur la formation de l’intellect en permettant à l’élève de peaufiner ses techniques de lecture et d’écriture, appliquées à l’objet linguistique le plus complexe qui soit : le texte littéraire. Nous nous attarderons ici plus longuement sur la compétence liée au premier cours, l’analyse littéraire, pour préciser ce qu’elle apporte à l’enseignement de la langue au collégial.

Mais qu’entendons-nous exactement par « analyse littéraire » ? Ratissant large, cette expression laisse place à l’interprétation, comme en témoigne la disparité des méthodes présentées dans les ouvrages récemment publiés. Proche pour nous de ce que d’autres traditions scolaires appellent le « commentaire composé », l’analyse littéraire exerce à des activités de lecture et d’écriture complémentaires qui, outre les connaissances qu’elles suscitent dans le domaine strictement littéraire, développe au maximum des capacités d’analyse et de mise en forme de la pensée qu’il suffira d’adapter, le cas échéant, à des textes forcément moins complexes et moins touffus que le texte littéraire.

En tant qu’étude de texte, l’analyse littéraire habitue l’élève à une lecture fine et détaillée visant au repérage de procédés caractérisant le style d’un auteur. Cette approche méticuleuse intègre, depuis quelques années, un vocabulaire précis fournissant les instruments adéquats pour déterminer les caractéristiques stylistiques d’un texte, qu’il s’agisse de la présence d’un champ lexical, de la récurrence de certaines figures de style ou de particularités syntaxiques. L’élève qui devient conscient de ces réalités et apprend à les repérer peut se les approprier et les utiliser lui-même dans ses textes ultérieurs. En plus d’initier à un lexique propre aux études littéraires, l’analyse littéraire affine ainsi la perception de tout ce qui constitue un texte et, par imprégnation, transmet à l’élève la connaissance de procédés stylistiques pouvant améliorer ses propres productions.

En tant que travail écrit, l’analyse littéraire permet d’accroître l’aptitude à organiser le fruit de ses observations en un texte cohérent. Il convient d’ailleurs d’insister longuement et patiemment sur cet aspect de l’épreuve : plus familiers avec les opinions livrées au fil de la plume, les élèves connaissent rarement la technique du paragraphe et sont encore plus réfractaires à l’élaboration d’un plan. C’est pourtant là un savoir-faire essentiel, transférable à n’importe quel domaine d’étude et qu’il faut maîtriser au même titre que le pianiste s’astreint aux gammes et aux arpèges quotidiens. Ne gommons pas la difficulté en fournissant d’emblée à l’élève des indications précises sur le contenu de chaque paragraphe, du genre : premier paragraphe = résumé ; deuxième paragraphe = lien avec le courant littéraire, etc. Le temps d’incertitude ou de passage entre le relevé des procédés et la construction du plan, les tâtonnements que cela suppose constituent l’étape la plus formatrice de ce travail malgré les renâclements que cela ne manque pas de susciter chez les élèves.

On constate que, tant sur le plan de la lecture que sur celui de l’écriture, l’analyse littéraire développe – ou confirme, dans les meilleurs cas – des habiletés fondamentales. Qu’il s’agisse d’un exercice difficile, cela est tant mieux. Notons par ailleurs que les nouvelles exigences du programme de français au secondaire, programme qui entrait en vigueur le 1er juillet de cette année, préparent de façon plus adéquate les élèves. La lecture de quatre oeuvres narratives par année, auxquelles doivent s’adjoindre des textes poétiques et dramatiques, de même que le renversement de la proportion en faveur de l’écrit devraient, dans quelques années,nous amener des élèves mieux formés.

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