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Cachez ce prédicat que je ne saurais voir

Cachez ce prédicat que je ne saurais voir

Pour une terminologie grammaticale rigoureuse

Le prédicat de la phrase : une notion essentielle, mais méconnue

La notion de prédicat de la phrase[1] désigne la fonction du groupe verbal (GV) dans une phrase ; elle est encore rarement exposée dans les manuels et cahiers d’exercices de français et peu utilisée en classe. Pourquoi ? Le mot prédicat serait trop difficile pour les élèves ? Voyons donc ! Que dire des termes épithète et circonstanciel, qu’on rencontre encore souvent ? En quoi sont-ils plus faciles à comprendre et à retenir ?

Si la notion est peu employée, c’est qu’elle est nouvelle en grammaire scolaire. Pourtant, elle est essentielle pour permettre de comprendre l’organisation d’une phrase (entendue comme une unité syntaxique – et non comme une unité de ponctuation). Une phrase syntaxique (symbolisée par P) n’est pas un assemblage de mots, c’est une construction faite de groupes qui sont en relation les uns avec les autres. Cette relation peut être de dépendance ou d’interdépendance syntaxique.

Une analyse syntaxique de la phrase

La phrase P (nommée aussi phrase de base ou phrase canonique ou phrase modèle) est constituée de deux groupes obligatoires, appelés aussi constituants obligatoires de la phrase. Ces deux groupes sont le groupe nominal (GN), fait d’un GN ou de toute structure qui peut être remplacée par un GN (un pronom, un GV à l’infinitif, une subordonnée sujet), et le GV. Ils sont interdépendants sur le plan syntaxique.

Dans une P, chaque groupe a une fonction syntaxique, c’est-à-dire qu’il joue un rôle et qu’il est en relation avec les autres groupes. Si le GN L’enfant de ma voisine dans la phrase L’enfant de ma voisine joue très bien de la clarinette a la fonction de sujet de la phrase (et non sujet du verbe, puisqu’il s’agit d’une fonction phrastique), le GV joue très bien de la clarinette, lui, a la fonction de prédicat de la phrase[2].

Depuis des lustres, on fait étiqueter des fonctions syntaxiques, mais lorsque vient le temps de nommer la fonction du verbe, ou plutôt du GV, les élèves n’auraient pas d’étiquette à apposer. Trou noir ! Comment peuvent-ils comprendre qu’il n’y ait pas de nom pour désigner la fonction syntaxique d’un des deux constituants obligatoires de la phrase, alors qu’on leur répète depuis la tendre enfance que le verbe est l’élément le plus important d’une phrase ? Et dire qu’on prétend les former à la rigueur, par l’analyse grammaticale…

Un peu plus de rigueur

Il est donc essentiel de nommer la fonction du GV pour des raisons de rigueur certes, mais aussi, et surtout, pour permettre aux élèves de comprendre la structure d’une phrase où chaque constituant est une unité qui a une fonction. Et, comme une fonction syntaxique désigne une relation, il faut nommer les deux termes de la relation, d’où les étiquettes de sujet de P et de prédicat de P, et non pas seulement de sujet et de prédicat. Nommer correctement les fonctions syntaxiques prend quelques secondes de plus, certes, mais les élèves gagneront en compréhension du système de la langue. N’est-ce pas pour cela aussi qu’on fait de la grammaire ?

* * *

  1. Prédicat vient du verbe latin praedicare : « ce qu’on affirme ou nie à propos de quelque chose » ; pensons au prédicateur et à son prêche. [Retour]
  2. Pour plus d’informations sur la notion de prédicat, voir Chartrand, S.-G. et Simard, Cl. (2000). Grammaire de base, ERPI, p. 50-51 ou Chartrand, S.-G. et autres (1999). Grammaire pédagogique du français d’aujourd’hui, GRAFICOR, p. 106-109. [Retour]

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