" />
2024 © Centre collégial de développement de matériel didactique
Un intercaf cohérent

Un intercaf cohérent

Le cégep Marie-Victorin accueillait, le 31 mai 2002, une centaine de participants venus de quelque 38 collèges au second intercaf de l’année 2001-2002. Dans la continuité de l’intercaf de l’automne[1], cette rencontre a été l’occasion de préciser le profil grammatical de nos futurs élèves, de découvrir les nouvelles — et les anciennes — parutions relatives à la grammaire nouvelle et de se familiariser avec l’une de ses « expansions » : la grammaire du texte.

Une race en voie d’apparition

Professeure à la polyvalente Calixa-Lavallée, Claudine Martel a confirmé certains de nos préjugés, voire certaines de nos inquiétudes, en traçant le portrait de notre futur étudiant type. Ce mutant, comme elle le surnomme, aura reçu une formation grammaticale très inégale. Il aura rencontré des professeurs plus ou moins « confortables » avec la nouvelle approche et dont la formation à la nouvelle grammaire sera aussi très variable selon leur âge — les plus jeunes enseignants auront pu profiter d’une formation dans le cadre de leurs études universitaires — ou leur intérêt. Au gré des professeurs, il aura été ballotté entre la grammaire traditionnelle et la grammaire nouvelle. Malgré l’approche préconisée et faute du temps suffisant, on lui aura donné la matière plus qu’on ne la lui aura fait découvrir par l’expérimentation. Il la comprendra et l’appliquera dans des exercices ponctuels, mais sera incapable d’effectuer des transferts. Ainsi, en orthographe, les progrès seront très lents ou inexistants. L’essentiel de sa formation grammaticale aura été concentré au 1er cycle du secondaire. Sur le plan de la lecture, il présentera de graves lacunes : il excellera dans le repérage, mais ses capacités d’inférence et d’anticipation seront faibles. Cependant, tout n’est pas négatif. Sur le plan de l’écriture, comme l’accent est désormais mis sur les textes à caractères argumentatif, ce mutant sera plus habile à argumenter et à réfuter. Il sera aussi plus habile à faire des manipulations linguistiques, qu’il trouvera stimulantes, et un meilleur observateur et critique de ses propres structures de phrase. Autre aspect positif à souligner : la motivation des jeunes enseignants en particulier à s’engager dans cette pratique renouvelée de l’enseignement grammatical.

Rétrospective

Karine Pouliot, auteure de nombreux livres et en particulier de L’essentiel et plus, a commenté les principaux ouvrages qui, au cours des 30 dernières années, ont constitué des jalons significatifs dans l’évolution des modèles grammaticaux. Les participants ont ainsi pu reconnaître, dans cette genèse de ce qui a mené au renouvellement grammatical, des ouvrages familiers auxquels ils n’associaient pas nécessairement l’étiquette de « grammaire nouvelle ». Ce survol bibliographique a permis de rappeler que le modèle de la nouvelle grammaire s’est élaboré progressivement, qu’il n’est pas le résultat d’une création spontanée mais qu’il s’inscrit dans un continuum théorique et didactique dont l’évolution se poursuit.

Une contribution significative

En janvier 2002, le Programme de français du CCDMD a reçu du MEQ le mandat de préparer du matériel adapté au cours de mise à niveau, et aisément accessible. À cet effet, une équipe intercollégiale composée de Michèle Frémont, Huguette Maisonneuve, Frédérique Izaute et Magda Sayad a livré une véritable course contre la montre pour que, dès la session estivale, les enseignants disposent d’outils « grammaire nouvelle » pertinents et suffisants. Michèle Frémont a présenté les cinq documents produits par cette équipe[2]. Elle a, par la suite, suggéré quelques pistes d’utilisation dans les autres cours de français et dans les centres d’aide.

La cohérence textuelle : deux approches complémentaires

Une importance particulière a été accordée, lors de cette journée, à la grammaire du texte. Lorraine Pepin, chercheuse, professeure au Département de l’éducation de l’Université du Québec à Rimouski et auteure de La cohérence textuelle : l’évaluer et l’enseigner a expliqué et illustré, dans sa communication intitulée « Élargissement du champ de la grammaire : la grammaire du texte », les marques de la cohérence. Elle a proposé une typologie de ces marques qui distingue, en particulier, les procédés de cohésion (la reprise de l’information, le parallélisme sémantique…) et les procédés de hiérarchisation (l’ordre des énoncés, le parallélisme syntaxique…). Définissant un texte peu cohérent comme « un texte qui demande au lecteur de faire beaucoup d’inférences », elle a illustré les défauts liés à différents procédés de liaison. D’ailleurs, dans son approche, elle souligne les limites qu’il y a à observer la cohérence dans un texte bien fait et insiste sur l’importance de montrer au rédacteur des défauts de ce type pour qu’il comprenne les besoins du lecteur et l’utilité des outils de cohérence. Malgré leur diversité et leur complexité, la connaissance de ces procédés offre un intérêt évident pour l’écriture et la lecture, mais aussi pour la correction des textes d’élèves. Elle a finalement proposé des pistes d’analyse et de correction des fautes liées à différents procédés de cohésion et de hiérarchisation, ce qui montre la pertinence de la connaissance de ces procédés non seulement pour l’écriture et la lecture, mais aussi pour la correction des textes d’élèves.

Quant à Michel Duffy[3], il privilégie, dans son logiciel Quand le texte file doux [4], une approche fondée sur l’observation de textes corrects sur le plan de la cohérence textuelle.

L’objectif est d’aider l’élève dans la lecture et la rédaction de textes en le rendant sensible aux éléments qui assurent la cohérence textuelle, puis en le rendant apte à intégrer ces éléments dans ses propres textes. Autre caractéristique de cet outil : l’étude de la cohérence ne se limite pas aux textes d’exposition, mais s’étend aux oeuvres littéraires. Ce logiciel vise à aider l’élève dans la lecture et la rédaction de textes en le rendant sensible aux éléments qui assurent la cohérence textuelle, et en le rendant apte à intégrer ces éléments dans ses propres textes.

« Je vous ai compris »

La conclusion de cette journée a été assumée par Jean-Denis Moffet, responsable de la formation générale et des épreuves en langue d’enseignement au ministère de l’Éducation. Il nous a humoristiquement souligné que le Ministère avait bien compris les besoins des enseignants de l’ordre collégial et qu’il continuerait d’être réceptif aux projets qui permettraient d’enrichir la banque d’outils disponibles actuellement.

  1. Vous trouverez un résumé de cette rencontre dans le numéro 3, volume 7 de Correspondance. Retour
  2. Pour plus de renseignements sur ces fascicules et sur la façon de les consulter ou de vous les procurer, reportez-vous à l’article de Charles Gravel, dans le présent numéro. Retour au texte.
  3. L’auteur, maintenant à la retraite, était professeur de français et responsable du centre d’aide au collège de Valleyfield. Retour
  4. Ce logiciel fait l’objet d’une présentation par son auteur, dans le présent numéro de Correspondance. Retour

Télécharger l'article au format PDF

UN TEXTE DE