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La dyslexie développementale au collégial: un premier profil

La dyslexie développementale au collégial: un premier profil

La dyslexie développementale[1] est-elle présente au collégial ? Ses manifestations chez l’enfant persistent-elles jusqu’à un âge plus avancé ? Le cas échéant, comment ces aspects résiduels affectent-ils la performance du cégépien ou de la cégépienne ? Y aurait-il des dyslexiques non diagnostiqués parmi les étudiants qui éprouvent des difficultés de lecture ? Ces questions ont guidé notre réflexion sur la question de la dyslexie au sein de la population collégiale et sur les effets qu’elle peut avoir sur leur performance scolaire. Afin que cette population particulière puisse bénéficier des mesures d’aide les plus adéquates et les plus éclairées dans son cheminement, nous avons entrepris de mener une recherche[2] sur ces troubles langagiers et sur les processus qui les sous-tendent. Nous présentons dans cet article les résultats de la première partie de cette étude qui porte sur deux volets : la recension exhaustive des indicateurs de la dyslexie qui caractérisent la population dyslexique du collégial ; la comparaison de trois types de population : des dyslexiques diagnostiqués, des étudiants non dyslexiques ayant des difficultés de lecture et d’écriture, et des étudiants n’éprouvant pas de difficultés langagières.

La dyslexie développementale et les difficultés d’apprentissage de la lecture

Les difficultés d’apprentissage de la lecture peuvent avoir des origines diverses. Elles peuvent être causées par des déficits intellectuels, des déficits sévères de la vision ou de l’audition, des troubles psychologiques graves, un environnement social défavorable et une scolarisation perturbée et peu assidue, ou encore, une mauvaise maîtrise de la langue de l’école par des enfants dont la langue maternelle est différente.

Au contraire, la dyslexie développementale, dont l’origine est neurologique, se manifeste en dehors de tous ces facteurs d’échec. Elle renvoie à un trouble d’apprentissage de la lecture et d’acquisition de son automatisme chez un enfant en bonne santé, dont les capacités cognitives sont intactes et qui jouit d’un environnement scolaire et éducatif totalement adéquat (Lyon, 2003). Selon l’International Dyslexia Association, environ 15 % des enfants scolarisés éprouvent des difficultés dans l’acquisition de la lecture et de l’écriture, et de 3 à 6 % d’entre eux peuvent être considérés comme des dyslexiques.

Les manifestations de la dyslexie développementale

La dyslexie développementale se caractérise par des difficultés persistantes et spécifiques à acquérir les mécanismes d’identification des mots écrits sans atteinte des processus non spécifiques de compréhension langagière (Braibant, 1994). Certaines des conséquences des difficultés à identifier les mots écrits des dyslexiques sont la présence de nombreuses erreurs en lecture orale, une lecture lente et ardue (Gombert et Colé, 2000) et des difficultés orthographiques qui peuvent être parfois plus sévères que le trouble de lecture lui-même (Alegria et Mousty, 1999). Certains auteurs ont également fait la démonstration qu’un trouble de l’orthographe, sans trouble apparent de la lecture, cache toujours des difficultés à identifier les mots écrits (Bruck et Waters, 1990). Le manque de précision et l’absence d’automatisation des mécanismes d’identification des mots écrits semblent constituer les deux principaux marqueurs de la dyslexie développementale. À ceux-ci sont associés les troubles de l’orthographe.

La dyslexie développementale au collégial

Un des aspects qui ressort des recherches sur la dyslexie développementale concerne la perpétuation des troubles à un âge plus avancé et la présence de la dyslexie parmi la population collégiale (Pennington et autres, 1990 ; Apthorp, 1995 ; Wilson et Lesaux, 2001). Les caractéristiques généralement observées chez l’enfant se retrouvent chez l’adulte, à savoir la lenteur de la vitesse de lecture, les difficultés de lecture à voix haute, les difficultés en orthographe et les erreurs grammaticales à l’écrit.

Par ailleurs, on rapporte l’existence de cas d’adultes diagnostiqués comme dyslexiques dans leur enfance, mais qui ont « compensé » leurs difficultés de lecture et d’orthographe. Lefly (1991) compare la performance d’adultes dyslexiques avec celle d’adultes « compensés » sur différentes tâches et remarque que le seul aspect résiduel de la dyslexie chez ces derniers est la lenteur de lecture. On remarque, également, qu’en dépit d’une lecture déficiente attribuable à des difficultés spécifiques et persistantes à identifier les mots écrits, de nombreux enfants parviennent à compléter des études collégiales et universitaires (Ehri, 1989).

La dyslexie développementale dans le système collégial québécois

Près de nous, au Québec, où le système collégial attire une population d’environ 150 000 étudiants, les études s’intéressant aux aspects cognitifs et linguistiques de la dyslexie développementale auprès de cette population sont inexistantes. Pourtant, nous assistons ces dernières années au Québec à l’arrivée au collégial d’un nombre croissant d’étudiants désignés comme ayant des troubles de lecture. Selon Senécal (2000), au cours de l’année 1999, 192 étudiants ayant des diagnostics documentés de troubles d’apprentissage étaient inscrits dans six cégeps québécois (quatre francophones et deux anglophones). Parmi les troubles d’apprentissage répertoriés, le trouble de la lecture est celui dont la prévalence est la plus élevée dans la population collégiale : 53 % des élèves qui se sont présentés aux services d’aide et qui ont remis un rapport d’évaluation établi par un professionnel de la santé avaient un diagnostic de dyslexie. En fait, ce chiffre pourrait être encore plus élevé si l’on considérait que les données recueillies ne s’appliquent qu’aux seuls étudiants qui se présentent aux services d’aide et qui peuvent se prévaloir d’un rapport d’évaluation du trouble.

La lecture au collégial

La lecture est non seulement un outil en soi, mais également une compétence transversale sollicitée dans toutes les disciplines scolaires en vue de permettre l’acquisition de connaissances. Cela est d’autant plus vrai qu’au collégial, la lecture implique généralement des textes plus longs et plus complexes qu’au secondaire et qu’elle doit être effectuée dans des temps très restreints. De plus, la réussite à une épreuve uniforme de la langue maternelle est une condition d’obtention du diplôme d’études collégiales dans tous les programmes d’études.

Or, plusieurs études attestent de réelles faiblesses des étudiants francophones du collégial en matière langagière, faiblesses qui se répercutent aussi bien sur le plan de la maîtrise de la langue française (Gouvernement du Québec, 2000) que sur celui d’autres disciplines telles que les mathématiques (Chbat et Groleau, 1998).

L’étudiant du collégial doit démontrer par ailleurs des capacités de maîtrise raisonnable d’une langue seconde, en l’occurrence l’anglais pour les collèges francophones, pour l’obtention du diplôme d’études collégiales. Selon Downey et autres (2000), les difficultés rencontrées par les étudiants avec trouble de la lecture dans l’acquisition de langues étrangères sont bien présentes et touchent tant la compréhension (lecture et écoute) que l’orthographe.

La combinaison de ces exigences langagières au collégial pourrait donc mettre l’étudiant qui présente des troubles de la lecture dans une situation à risque d’échec plus élevé.

Objectifs de recherche

Deux objectifs ont guidé notre recherche :

  1. dresser une liste d’indicateurs comportementaux de la dyslexie susceptibles d’aider dans le dépistage de cas potentiels de dyslexie ;
  2. vérifier si la dyslexie est un facteur d’échec parmi les étudiants qui éprouvent de réelles difficultés en français.

Méthodologie

Le questionnaire

Nous avons construit un questionnaire en nous basant sur les différents indicateurs de la dyslexie qui sont rapportés dans les publications scientifiques. C’est ainsi que nous avons élaboré 78 questions, dont 16 portent sur les aspects sociodémographiques de l’étudiant, 18 sur son parcours scolaire, 7 sur le type de soutien reçu pendant la scolarité, 31 sur les aspects du langage tels que l’acquisition du langage oral, l’apprentissage de la lecture, de l’écriture et des mathématiques ; enfin, 6 sur l’organisation spatiale et temporelle, qui peut également être perturbée chez les dyslexiques. Vingt de ces questions requièrent des réponses courtes, alors que 58 ne requièrent que oui ou non comme réponse.

Les participants

La population de l’étude a été recrutée dans quatre collèges francophones du Québec : le collège Montmorency, le cégep André-Laurendeau, le cégep du Vieux Montréal et le cégep Lionel-Groulx. Au total, 509 étudiants ont accepté de répondre au questionnaire. Les données de sept étudiants ont été retirées des évaluations finales en raison d’absence de réponses ou d’ambiguïtés dans les réponses.

Nous avons ciblé trois types de population.

  1. Des étudiants dyslexiques diagnostiqués : ils présentent un diagnostic formel de dyslexie sur la base d’un rapport établi par un professionnel de la santé ou de l’éducation – orthophoniste, neuropsychologue, psychologue ou orthopédagogue. Nous les avons recrutés par la voie des services d’aide aux étudiants des différents cégeps. Trente-huit étudiants dyslexiques diagnostiqués ont accepté de participer. Ils représentent 7,5 % de la population retenue dans cette étude.
  2. Des étudiants n’ayant pas de diagnostic de dyslexie, mais vivant des situations de difficultés de lecture et d’écriture en langue française réelles. Ce type de population se trouve généralement dans les cours de mise à niveau en français (MAN) et d’anglais langue seconde (ALS), niveau débutant. Nous les avons rejoints par l’intermédiaire des enseignants de ces cours ainsi que par des annonces invitant les étudiants aux prises avec des troubles de lecture, et d’écriture à répondre au questionnaire. Nous avons également fait appel à des étudiants en situation d’échec de l’épreuve uniforme de français.
  3. Des étudiants n’ayant pas de difficultés de lecture, pour constituer notre groupe témoin. Ces derniers proviennent des cours de français 1 et d’anglais langue seconde 2.

La collecte des données

La collecte des données s’est effectuée sur une base volontaire, en classe ou individuellement. Au moment du dépouillement des données, un score de un point a été attribué à chaque réponse correspondant à un indicateur de la dyslexie. Ces indicateurs représentent 50 des 70 réponses au questionnaire.

Résultats et profils de la population évaluée

Répartition de la population selon les scores

Tableau 1 – Regroupement des étudiants selon le score au questionnaire (% sur le total de la population évaluée)
 DD
N=38
ND
N=274
NM
N=190
Score 1-90,2 %41 % (N=190)
Score 10-387,37 %59 %

Les étudiants dyslexiques diagnostiqués (DD) qui ont obtenu des scores allant de 9 à 38 (sur un total de 50) constituent 7,5 % de l’ensemble des participants. Les scores des autres étudiants varient de 1 à 35. Sur la base de ces scores, nous avons procédé au regroupement de tous les étudiants ayant des scores similaires à ceux obtenus par les DD afin de les comparer à ces derniers. Nous les avons regroupés sous le nom de ND. Ils représentent 59 % de la population non dyslexique. Les étudiants ayant obtenu un score inférieur à 10 constituent le groupe témoin de normolecteurs (NM) ; ils forment 41 % de la population non dyslexique.

Répartition du groupe ND selon la population ciblée

Tableau 2 – Répartition des étudiants ND selon la population ciblée
 N%
MAN13047,5
ALS5018
Français 13111,5
Tous les autres5921,5

Le tableau 2 nous donne un aperçu de la population constituant le groupe dont les scores sont similaires à ceux des dyslexiques. Nous remarquons qu’une partie importante des étudiants qui la composent suit des cours de mise à niveau en français. Nous observons également la présence dans ce groupe de 11,5 % des étudiants recrutés dans les cours de français 1 qui devaient former, initialement, le groupe des normolecteurs. Ces données démontrent la pertinence du recours aux scores au questionnaire pour dégager les différents groupes aux fins de comparaison des profils.

Incidence du sexe sur la dyslexie

Tableau 3 – Nombre d’étudiants selon le sexe
 DD
N=38
ND
N=274
NM
N=190
F20137102
M1813788

Les garçons dyslexiques sont-ils plus nombreux que les filles ? Nos résultats ne montrent pas de différence de prévalence selon le genre, même si le recrutement des participants n’a pas été équilibré selon le sexe. En effet, tous les étudiants et étudiantes qui se sont présentés ont été retenus dans l’étude, quel que soit leur sexe. La prévalence des garçons dyslexiques est une source de débat dans la recherche sur la dyslexie sans qu’aucun consensus n’ait été atteint à ce jour. Cependant, même si de nombreuses études rapportent des taux de dyslexie plus élevés chez les garçons que chez les filles, une étude récente de Shaywitz et autres (2001) montre que cette prévalence serait liée à un biais de recrutement et au fait que les garçons ont plus de troubles de comportement que les filles et font donc l’objet de plus de demandes d’évaluations psychologiques de la part des enseignants auprès des écoles. Elle en conclut que la vulnérabilité des garçons aux troubles de lecture ne serait qu’un mythe.

Hérédité en dyslexie

Tableau 4 – Étudiants ayant un membre de la famille avec difficultés de lecture ou d’écriture
 DD
N=38
ND
N=274
NM
N=190
Lecture73,68 %31,75 %8,9 %
Écriture76,31 %42 %14,73 %

Comme l’indique le tableau 4, 74 % des DD rapportent la présence d’un membre de leur famille éprouvant des difficultés de lecture alors que 76 % d’entre eux rapportent un cas de difficultés d’écriture. Nous trouvons un profil similaire dans le groupe ND, même si les taux ne sont pas aussi élevés. On constate assez souvent qu’un enfant dyslexique appartient à une famille dans laquelle on compte une ou plusieurs personnes dyslexiques. En effet, de nombreuses études rapportent une incidence de l’hérédité dans la manifestation de la dyslexie. Dans une importante étude menée en 1990 sur 32 familles de dyslexiques, Scarborough constate que dans ces familles, qu’elle a évaluées et suivies pendant plusieurs années, 65 % des enfants qui en sont issus développent à leur tour une dyslexie. Cette composante génétique de la dyslexie est confirmée par des données relevées auprès de jumeaux monozygotes et dizygotes. DeFries et Alcaron (1996) remarquent que l’incidence de la dyslexie est plus élevée chez les jumeaux issus du même œuf et, par conséquent, partageant le même patrimoine génétique, que chez les jumeaux qui n’en partagent que la moitié.

Cheminement scolaire

D’après le graphique 1, le cheminement scolaire des DD est caractérisé par des reprises de cours à l’école primaire et au collège ; 31,5 % d’entre eux n’ont pas complété leur études en cinq ans alors que 34 % ont dû fréquenter une école de l’éducation des adultes pour terminer leur scolarité. Près de la moitié des dyslexiques diagnostiqués (47,5 %) ont pris, au moins une fois, un cours de mise à niveau en français.

On observe un profil similaire, si ce n’est plus accentué, chez les étudiants ND. En effet, les taux de complétion des études secondaires en plus de cinq ans et de fréquentation d’écoles pour adultes sont bien plus élevés dans ce type de population. Ces retards et perturbations scolaires pourraient s’expliquer par l’absence de soutien et d’intervention pédagogiques, puisque ces étudiants n’ont jamais bénéficié d’une évaluation langagière formelle, et par conséquent, ne peuvent pas se prévaloir d’un diagnostic formel de dyslexie qui les autoriserait à bénéficier des mesures d’aide disponibles dans les écoles.

Consultations et soutien

Les enfants éprouvant des difficultés langagières sont renvoyés à des orthophonistes, des neuropsychologues, des psychologues ou des orthopédagogues pour subir des évaluations et, éventuellement, recevoir des services de thérapie clinique ou d’intervention pédagogique, selon les cas. Il n’est donc pas surprenant de constater que 100 % des DD ont reçu l’aide d’au moins un des professionnels que nous venons d’évoquer, d’autant que, comme nous l’avons déjà souligné, les DD sont des étudiants qui présentent un diagnostic formel de dyslexie. Cependant, le point qui suscite notre intérêt dans le graphique 2 concerne le taux d’étudiants non diagnostiqués qui ont rencontré au moins un de ces professionnels. Ce taux démontre qu’il existe une population dont les difficultés langagières pourraient cacher des cas de dyslexie non diagnostiquée et qui nécessiterait des évaluations linguistiques complémentaires. Il serait très intéressant d’en savoir plus sur les raisons qui ont amené à la consultation et sur le type et la durée d’intervention ou de suivi reçu. Il y a lieu de mentionner que quelques-uns des étudiants nous ont dit avoir été évalués dans leur milieu scolaire et avoir parfois reçu des mesures d’aide.

Habiletés en langage oral

Le graphique 3 nous présente des profils semblables de la performance orale des DD et des ND. Les deux groupes rapportent avoir eu des difficultés à s’exprimer durant la prime enfance, chercher péniblement leurs mots et hésiter sur les mots longs dans une conversation, et enfin, transposer des sons – produire « statrégie » au moment de dire « stratégie ». Ces résultats sont compatibles avec les preuves expérimentales recueillies dans la littérature et qui supportent particulièrement l’hypothèse selon laquelle les dyslexiques manifesteraient des déficits dans le langage oral (Sprenger-Charolles et Colé, 2003). Ces types de difficultés dans le langage oral sont souvent associés aux indicateurs de la dyslexie.

Habiletés en lecture

La lecture constitue clairement le domaine dans lequel aussi bien les DD que les ND éprouvent le plus de difficultés. Nous remarquons dans le graphique 4 des taux élevés d’étudiants rapportant des comportements de déficience face à des activités liées à la lecture comparativement au groupe des NM. Entre 30 et 90 % des participants des deux groupes relatent avoir connu des difficultés d’apprentissage de la lecture, lire de manière lente et hésitante lorsque cette activité est effectuée à voix haute, éprouver de la fatigue même lorsque la lecture implique des textes courts, déployer beaucoup d’efforts pour parvenir à comprendre ce qu’ils lisent et parfois ne pas y parvenir après une première lecture. Par ailleurs, beaucoup d’entre eux expriment le besoin de temps additionnel par rapport au reste de leurs pairs pour compléter des tâches de lecture en classe. On voit donc que les difficultés à identifier les mots écrits sont telles qu’elles mobilisent une part importante des ressources du système cognitif et, par conséquent, affectent les processus de compréhension. Il reste, en effet, peu de ces ressources disponibles lorsque survient la tâche de compréhension, ce qui entraîne inévitablement des difficultés plus ou moins importantes de compréhension en lecture.

Habiletés en écriture

Les données présentées dans le graphique 5 confirment que des difficultés orthographiques accompagnent systématiquement la dyslexie développementale. Mais ce qui ressort également de ces données, ce sont les taux élevés du groupe control NM. Tout comme les DD et les ND, les NM rapportent connaître des difficultés avec l’orthographe des mots et la grammaire. Si nous considérons les trois groupes, nous constatons que les taux varient de 25 à 100 % en ce qui concerne les difficultés en orthographe et de 40 à 57 % pour ce qui est des problèmes en grammaire. D’autres déficits associés à l’activité d’écrire apparaissent dans ces données : les étudiants mentionnent des problèmes avec les temps des verbes, et une incapacité à voir leur fautes lorsqu’ils se relisent et à terminer leur activités dans les temps impartis.

Conclusion

Les données obtenues à l’aide du questionnaire nous donnent un premier profil des comportements cognitifs et langagiers des étudiants dyslexiques diagnostiqués. Dans leurs réponses, ces derniers expriment des difficultés aussi bien dans la lecture que dans l’expression orale et dans l’écriture. Ces données nous permettent également d’identifier un type de population dont le profil des difficultés langagières semble s’apparenter à celui des dyslexiques et qui nécessiterait des évaluations linguistiques complémentaires et plus approfondies. Cet aspect constitue la deuxième étape de notre recherche, étape déjà entamée. À titre indicatif, nous avons invité, parmi les ND, les étudiants dont les scores sont élevés à passer une série de tests de langage visant le dépistage de la dyslexie. Nous avons fait passer ces mêmes tests à un groupe de DD et à un groupe de NM. Les premiers résultats sont très prometteurs.

* * *

  1. À distinguer de la dyslexie acquise, qui se manifeste à l’âge adulte à la suite d’un accident vasculaire cérébral. Retour
  2. Cette recherche a été financée par le ministère de l’Éducation, du Loisir et du Sport du Québec dans le cadre d’une recherche PARÉA. La préparation du protocole expérimental ainsi que la collecte des données ont été effectuées avec la collaboration de Laura King, enseignante au cégep André-Laurendeau et co-chercheuse dans ce projet, et de Chantal Courtemanche, orthopédagogue au collège Montmorency et consultante dans ce projet. La collecte des données a été facilitée par le soutien de nombreux enseignantes, enseignants et membres du personnel administratif et technique du collège Montmorency et des cégeps André-Laurendeau, du Vieux Montréal et Lionel-Groulx. Cette recherche n’aurait pas été possible sans la participation des étudiants. Je remercie tous ceux et celles qui m’ont apporté leur soutien. Retour

Bibliographie

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