Un «CAF volant» pour soutenir les élèves footballeurs du collège de Valleyfield
Q – Dans quel contexte est né le CAF volant du collège de Valleyfield ?
R – Cette formule de CAF est née dans le contexte d’une augmentation sensible de la demande d’aide en français. Alors que nous avions l’habitude de réaliser environ 60 heures d’encadrement en français par session, ce sont 160 heures d’aide qui ont été offertes à la session d’hiver 2010. Notre CAF reçoit maintenant 125 étudiants de tous les programmes par session, donc 250 par année, soit environ un étudiant du collège sur huit.
Pour répondre à cette demande accrue, Karine Landry est venue travailler au CAF comme coresponsable, chacune de nous recevant une allocation de 0,4. Ainsi, Karine et moi avons pu former deux groupes de relation d’aide de 23 moniteurs. À ces ressources s’ajoutent des moniteurs expérimentés et rémunérés qui encadrent les étudiants faisant face à des défis plus grands.
En plus de l’élargissement de nos ressources humaines, plusieurs innovations ont permis de répondre aux besoins grandissants. Des mesures d’aide additionnelles, en effet, ont été créées : le CAF+ (syntaxe et encadrement de deux heures par semaine), le CAF sénior (allophones, anglophones, retour aux études, orthopédagogie, TDA, etc.), et enfin, le CAF volant.
Q – Racontez-moi les débuts de ce CAF volant…
R – C’est le taux d’inscription faible, voire nul, des étudiants footballeurs au CAF qui m’a donné l’idée de fonder un CAF « volant », c’est-à-dire un service offert dans les locaux de ces élèves qui ne font pas la démarche de venir demander du soutien en français, alors que leurs besoins sont importants. Ainsi, un vendredi soir, tout de suite après l’entrainement de football, je suis allée rencontrer les joueurs « chez eux », au gymnase. La réponse a été immédiate et excellente : alors qu’aucun ne s’était montré intéressé à venir au CAF lors de la tournée régulière des classes, six se sont inscrits au cours de cette visite. Puis, le mardi suivant, durant la période dédiée à la réussite et bloquée à l’horaire de tous les étudiants du cégep depuis 2005, je me suis présentée dans la salle d’études supervisée avec six moniteurs, dont une étudiante en sports intenses connue et appréciée des joueurs. Là encore, l’effet a été extrêmement positif : des douze joueurs de football présents dans la salle, quatre se sont inscrits, portant le total d’inscriptions à dix. Deux semaines ont passé, et les deux autres joueurs se sont à leur tour inscrits. La mission était accomplie : tous les étudiants footballeurs qui devaient être présents en salle d’études, parce qu’ils étaient considérés comme « à risque d’échec », étaient inscrits au CAF !
Q – De quelle façon recrutez-vous les moniteurs du CAF volant ?
R – Tous les moniteurs se trouvent devant un défi de taille : la tâche de réviser des notions théoriques et d’apprendre à s’en servir afin de fournir des explications grammaticales claires à des élèves en difficulté. Aussi, jamais nous ne leur imposons de défis pédagogiques supplémentaires. Toutefois, pendant leur formation créditée, ils sont invités à remplir un questionnaire sur leurs centres d’intérêt, leurs objectifs de carrière et les défis pédagogiques particuliers qu’ils souhaiteraient relever, s’il y a lieu. À l’aide des réponses à ce questionnaire, nous avons choisi pour le CAF volant des moniteurs dynamiques qui, vraisemblablement, ne se sentiraient pas intimidés dans le contexte de la salle d’études des joueurs de football. Ce recrutement à l’hiver 2010 a été un succès, l’évaluation qualitative par les étudiants inscrits en faisant foi : 92 % des répondants estiment que l’aide du moniteur leur a permis d’acquérir une plus grande autonomie, 94 % que leur moniteur leur a facilité la compréhension des notions complexes et que leur moniteur maitrise les notions à enseigner, 95 % que la relation d’aide leur a permis de faire des progrès et 97 % que leur moniteur a démontré de l’intérêt pour sa tâche.
Q – Les enseignants du programme visé (Sport intense intégré aux études) offrent-ils leur appui au CAF ?
R – La salle d’études des joueurs de football est supervisée à tour de rôle par l’entraineur-chef de football, Patrick Lauzon, ainsi que par l’aide pédagogique des athlètes inscrits en Sports intenses, Marie-Claude Théorêt. Figures d’autorité, mais aussi de confiance, pour les joueurs, ils sont tous deux d’un soutien inestimable.
Q – Il y a certainement, à travers le réseau, des responsables de CAF qui souhaitent développer une formule d’aide en français mieux adaptée à un groupe d’élèves de leur cégep. Sur la base de votre expérience, quels conseils pourriez-vous leur adresser ?
R – Dans le cas d’un CAF adapté aux besoins des étudiants d’un programme, il est selon moi primordial que la salle d’études soit supervisée par des professeurs du programme en question, en plus de la personne responsable du CAF. Nous avons tenté une expérience peu concluante où aucun professeur du programme visé n’assurait de supervision lors des séances de travail : la motivation et la discipline des étudiants ont été moindres, malheureusement.
Enfin, je recommande la formule du CAF volant aux responsables de centres fortement achalandés : en plus de motiver grandement les étudiants, cet aménagement est une façon de libérer les locaux du CAF.
La contribution du CAF volant au succès de l’équipe de football collégiale Noir et Or
« La réussite scolaire est la clé du succès dans un programme sportif comme celui du Noir et Or. En effet, Football Québec exige que chaque joueur réussisse un minimum de huit cours par année. Le service de CAF volant a contribué à ce que l’on puisse répondre à cette exigence. Certains joueurs trouvent difficile d’aller chercher du soutien de leur propre initiative, soit par paresse, soit par gêne ou par peur de la perception négative liée à la demande d’aide.
« Le CAF a proposé aux joueurs de les rencontrer dans un lieu plus commode pour eux. Cette offre a eu un effet positif sur eux, elle a changé la perception qu’ils avaient de leurs difficultés individuelles : ils n’étaient plus seuls à avoir besoin d’aide ! Cela a eu un effet boule de neige ! Plusieurs étudiants-athlètes ont profité de ce service. Et nos collègues du programme sont reconnaissants de cette belle initiative ! »
Propos de Patrick Lauzon, entraineur-chef de l’équipe de football du collège de Valleyfield, recueillis par Mélanie Dutemple.
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