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Vivre en français en Amérique  du Nord: la maison au Québec

Vivre en français en Amérique du Nord: la maison au Québec

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e Québec se débrouille avec ses voisins anglophones tellement plus nombreux, plus riches et plus puissants que lui, comme il le peut, depuis des siècles. Et sa langue française vit au rythme du continent : elle conserve, adapte, traduit, emprunte, invente, frémit, frétille, tourne et vire pour montrer qu’elle est toujours là. Parfois, les grandes marées anglophones la rejoignent, la tirent, la poussent, comme nous rejoignent, nous tirent et nous poussent les décisions politiques et économiques de nos voisins, leurs chansons, leurs hamburgers et leur bois d’œuvre. Mais nous restons, parlant plus ou moins la langue que parlaient nos parents, et leurs parents, et les parents de leurs parents. Nous restons ; d’autres viennent nous rejoindre, avec de nouvelles choses et de nouveaux mots. Nous partons aussi, vers des ailleurs où, de plus en plus, on communique en anglais ; nous partons parfois vers la douce France, où nous sommes souvent décontenancés en voyant les emprunts relativement récents que les Français ont faits à l’anglais, emprunts qui ne sont parfois justement pas les nôtres.

« Ce n’est pas simple de parler français en Amérique du Nord, pas simple de vivre en français à l’américaine. Dans l’ensemble, le français des Canadiens doit à chaque instant décrire des modes de vie qui ont d’abord été pensés en anglais et qui résultent d’un autre découpage de la réalité que celui qu’opère le français en France. C’est pourquoi il est à peu près impossible au français de se préserver des atteintes de l’anglais[1]. »

C’est vrai, et plusieurs linguistes québécois sont là pour débusquer et éradiquer les « anglicismes » et autres « impropriétés » qui « déparent » notre langue. Ont-ils toujours raison ?

Le thème de la maison m’a semblé adéquat pour entamer une étude de la langue quotidienne des Québécois. La maison se situe en effet entre le territoire public et l’espace privé, entre la rue, qui appartient à tout le monde, et l’intimité d’un chez-soi à la fois français et américain.

Où habitez-vous ?

« Sans anglicismes, dans les rues de Montréal, je suis perdu, tout simplement[2] », écrit Jean Forest. En effet, vivre au Québec, c’est demeurer dans un duplex, un triplex ou un bloc à appartements ; c’est posséder un split level, un bungalow, un condominium, un loft ! Nos habitations ont été pensées, bâties, alignées à l’anglaise, puis à l’américaine, et portent, en conséquence, des noms anglais. Et si la cour intérieure ou l’hôtel particulier sont absents du vocabulaire quotidien des Québécois, c’est qu’ils sont absents de leur environnement. Or, l’Office québécois de la langue française (OQLF) et plusieurs linguistes d’ici condamnent certains des usages québécois dans le domaine de l’habitation. De quels mots s’agit-il ? De mots que seuls les Québécois ont empruntés à l’anglais (ils sont suivis d’un astérisque dans le tableau en page 9). L’origine anglaise des mots aussi utilisés par les Français – et qui, pour cette raison, entrent au dictionnaire – ne semble pas, par ailleurs, leur poser de problème…

À quel étage ?

La division en étages n’est pas non plus partout la même. Au Québec, il y a peu de véritables rez-de-chaussée dans les maisons, sans doute parce que la neige empêcherait d’ouvrir la porte en hiver… On arrive à la porte d’entrée après avoir monté quelques marches : c’est le perron. Ce premier niveau de la maison est-il appelé étage ? Au Québec, oui, comme en français classique où, au XVe siècle, on appelait premier étage le rez-de-chaussée.

Dans les grands immeubles, par contre, on entre souvent au niveau de la rue (au rez – ras – de la chaussée), et les plus vieux d’entre vous se rappelleront les grands magasins où les garçons – et filles – d’ascenseur[3] annonçaient à l’étage : « First floor – Premier plancher ». On a fait des efforts de francisation au Québec, et le plancher a disparu. Mais, dans les bâtiments à plusieurs étages, il reste parfois compliqué de savoir à quel niveau on est. Dans les ascenseurs, on trouve ainsi premier étage ou RDC (ou RC) pour le niveau où l’on entre, suivi soit du premier ou du deuxième[4] étage selon que l’on compte à l’américaine (les planchers) ou à la française (les étages).

DuplexDuplex vient de l’anglais, qui l’a emprunté au latin. En anglais, on a un duplex house, un immeuble à deux logements – c’est dans ce sens que les Québécois emploient duplex – ou un duplex flat, un logement à deux étages – c’est ce sens que les Français ont emprunté à l’anglais.
TriplexLe mot et la chose sont empruntés à l’anglais. Ce terme est utilisé ici, mais pas en France.
Split-level* ou split*Voilà une réalité typiquement nord-américaine avec un nom bien anglais. L’OQLF propose plutôt maison à demi-niveaux.
Cottage*Au Québec, un cottage est une maison à deux étages. L’OQLF propose plutôt les termes maison individuelle isolée, maison à deux étages ou maison à étage mansardé.
Bungalow*Ce mot d’origine bengali a été adopté par les Anglais, à qui les Québécois l’ont repris. Ce n’est qu’au Québec que ce mot désigne exclusivement une maison de plain-pied. L’OQLF considère qu’il est abusif d’employer le terme bungalow pour désigner toute maison d’un seul étage et fait cette nuance : « On ne doit pas confondre le terme maison de plain-pied avec le terme bungalow, qui désigne une petite maison de plain-pied de construction simple. »
Condominium* ou condo*Condominium et condo sont des termes empruntés à l’anglais. Au Québec, ils désignent à la fois un appartement dans un immeuble et un mode de copropriété.
LoftLe mot et la chose viennent des États-Unis. Ils se sont également implantés en France.
Bloc à appartements*Il s’agit de la traduction littérale d’apartment block, ce dernier mot venant du bloc français.

Et nous entrons…

Au Québec, il y a deux portes d’entrée, comme à la campagne. On les a toujours appelées porte d’en avant et porte d’en arrière et, pour entrer, on utilise plus souvent la seconde que la première. Les Français emploient plutôt, pour les pavillons de banlieue, la porte de derrière ou porte du jardin.

En façade et à l’arrière de la maison, souvent à chaque étage, il y a le balcon (en saillie) ou la galerie, laquelle est, pour les Québécois, une « sorte de balcon qui fait le tour, ou longe la façade des habitations[5] ». On emploie au Québec souvent indifféremment l’un et l’autre terme. Les galeries ayant tendance à prendre des dimensions plus importantes, surtout dans les immeubles neufs, on les appelle aussi des terrasses au Québec. En France, dans les immeubles résidentiels, il y a moins de balcons, et la terrasse n’existe qu’au dernier étage ; en retrait, elle s’appuie sur l’étage inférieur.

À l’intérieur de la maison, la réalité n’est pas, là encore, tout à fait la même. Dans une demeure québécoise, il y a souvent un portique, sas entre la porte d’entrée et l’habitation proprement dite, bien utile l’hiver. Le mot portique est le doublet savant de porche, et l’usage qu’on en fait ici rapproche notre portique du porche français. Est-ce à cause du portico anglais (qui désigne autre chose) que certain linguiste a cru qu’il s’agissait d’un anglicisme[6] ?

En entrant dans l’espace habitable, on se trouve, comme en France, dans une entrée ou, dans les plus riches demeures, devant un hall d’entrée. Ensuite, avec les longs appartements qui ont tous portes et fenêtres sur rue (ou sur ruelle), on a un passage ou corridor qui mène aux autres pièces. Encore ici, il est arrivé que, bizarrement, l’on classe passage parmi les anglicismes[7].

La salle à dîner

On peut ensuite passer à la salle à dîner, expression qui doit bien sûr beaucoup au dining room anglais, au point qu’on parlera, avec raison, de calque, c’est-à-dire la traduction littérale d’un syntagme d’une autre langue. Les Québécois, pour dire en français une réalité qui vient des anglophones, ont ainsi intégré dans leur langue beaucoup de calques. Comme l’anglais a emprunté plus de la moitié de son vocabulaire au français, beaucoup de mots anglais ressemblent aux mots français, ce qui en facilite l’emprunt. Bloc à appartements et salle à dîner sont des calques québécois ; gratte-ciel est un calque français qui, de ce fait, n’entre pas dans la colonne anglicismes des linguistes québécois.

Le syntagme salle à manger est apparu assez tardivement en France ; il n’est attesté qu’en 1636. À l’époque, la chose et le mot étaient inconnus aux paysans et artisans de la France et du Québec : ils mangeaient dans la cuisine. Tout porte à croire que nos anciens Canadiens n’ont connu cette pièce qu’au moment où les maisons sont devenues plus grandes ; les Anglais leur ont alors soufflé les mots. Salle à dîner n’est pas un syntagme employé en français international, mais son utilisation ne provoque pas de confusion dans la communication.

Les cuisines

Il y a déjà eu au Québec deux cuisines : la cuisine d’hiver et la cuisine d’été. La dernière était un genre de remise où l’on cuisinait l’été afin d’éviter de surchauffer la maison. On l’appelait également bas-côté. Ne reste du concept de cette cuisine d’été (et de la cuisson à l’extérieur de la maison) que le barbecue – mot que nous avons emprunté aux Américains, qui l’avaient pris des Haïtiens. Le terme de bas-côté (d’origine saintongeaise) n’est plus utilisé aujourd’hui que de façon plaisante.

Souvent, on mange dans la cuisine, traditionnellement autour de la table ou, dans nos cuisines modernes, autour d’un comptoir assez élevé que les Français appellent bar américain. La petite cuisine, qui n’est séparée de la salle à manger que par ce bar américain, devient donc pour eux une cuisine américaine. On ajoute parfois en France l’adjectif américain à certains termes pour marquer un emprunt, réel ou imaginaire, aux façons de vivre des États-Unis.

Un coin-cuisine dans un tout petit appartement, dans un motel québécois ou dans une roulotte[8] sera souvent appelé kitchenette (emprunt intégral à l’anglais) ou cuisinette, au Québec comme en France.

Le et les salons

Le salon vient de l’italien salone, qui signifie salle. À partir de 1920, il a reçu le titre de living ou living room (terme évidemment emprunté à l’anglais) quand il a perdu le lustre qu’il avait dans les maisons bourgeoises. Maintenant, on parle de séjour, de salle de séjour (calque du living room). Mais on revient, surtout au Québec, au salon, et on semble avoir oublié notre vivoir, terme d’origine québécoise (fin XIXe siècle) qui a tout à la fois traduit et contré l’influence de living room – pour ces inventions québécoises, Jean Darbelnet emploie le terme d’« anti-anglicisme[9] ». En France, les agences immobilières utilisent parfois le terme pièce à vivre, qui reste bien près du calque.

Au Québec, spécialement dans les maisons en rangées, les appartements ont souvent une forme de rectangle allongé dont les faces étroites donnent respectivement sur la rue et sur la ruelle ; c’est alors que l’on peut trouver un salon double. Cette pièce en longueur est séparée à peu près en son centre par un mur tronqué en hauteur et en largeur : c’est un grand espace symboliquement divisé en deux parties par d’étroits pans de murs plus ou moins ornés. Le salon est donc double, en général pour que la fenestration de la pièce en façade permette d’éclairer la partie du fond. On donne souvent deux fonctions au salon double : salon et chambre, salon et salle à manger, bureau et chambre… Je n’ai pas trouvé l’équivalent de ce salon double en anglais. Peut-être existe-t-il uniquement dans les grandes villes du Québec, ce qui expliquerait que c’est ici qu’on lui a donné ce nom. Il peut y avoir un double séjour ou double salon chez les Français quand on a abattu la cloison qui séparait deux pièces, chacune possédant des fenêtres. Ce n’est donc pas notre salon double.

Les chambres, et surtout la fameuse chambre de bain !

En France, on parle de salle de bains ou de salle d’eau, selon qu’il y a, ou non, une baignoire dans la pièce. Au Québec, on utilise encore souvent le terme chambre de bain (sans s). Nous reproche-t-on assez ce terme, le qualifiant d’anglicisme, puisque, dit-on, il traduit directement le bathroom anglais !

L’OQLF dit d’un même souffle : « Dans un sens ancien, le mot chambre servait à désigner n’importe quelle pièce d’une habitation. Il n’a gardé le sens général de »pièce », »salle« que dans le vocabulaire de la marine… » (Banque de dépannage linguistique) et « Le terme chambre de bain, de même que sa variante chambre de bains, est un anglicisme » (Grand dictionnaire terminologique). Voilà une position à mon avis assez paradoxale, quand on sait qu’une grande partie du vocabulaire québécois vient d’une forme plus ancienne du français et a intégré des termes de la marine.

L’emploi spécifique de chambre est relativement récent. Ce mot existe déjà en moyen français (de 1330 à 1500) et il est, jusqu’au XVIIIe siècle, générique, c’est-à-dire qu’il peut désigner toutes les pièces. L’emploi extensif du mot existe encore aujourd’hui dans de nombreuses expressions, comme chambre froide, chambre forte, chambre de commerce[10], pour ne nommer que celles-là. Beaucoup de francophones utilisent encore le syntagme chambre à coucher[11], précision qui témoigne de l’ancien emploi extensif du mot chambre. Mais pourquoi les linguistes prétendent-ils que l’expression chambre de bain est un anglicisme à cause du mot chambre ?

Dans chambre de bain, n’est-ce pas plutôt l’utilisation du mot bain au singulier qui constituerait un emprunt à l’anglais ? Au Québec, on n’emploie que très peu le terme baignoire, que les Français utilisent depuis la deuxième moitié du XIXe siècle. Alors que la salle de bains française désigne l’endroit où l’on prend des bains, la chambre de bain québécoise pourrait vouloir dire pièce qui contient un bain dans lequel on prend des bains. On pourrait le formuler à peu près de la même façon en anglais : « We call it a bathroom because it has a bath (ou bathtub) in which one takes a bath ». Avons-nous conservé le bain (en lieu et place de baignoire) parce qu’il côtoyait le bath de bathtub et de bathroom ? Ce rapprochement bain-bath pourrait expliquer qu’on laisse de côté le mot baignoire. L’influence de l’anglais fait alors qu’au Québec cette chambre est un lieu où, d’abord et avant tout, il y a un meuble qu’on appelle bain – forcément au singulier.

Bains (j’insiste sur le pluriel) a longtemps désigné la pièce de la maison où l’on se baigne. Le terme, dans cette acception, a disparu, remplacé par salle à bains, puis par salle de bains (toujours pluriel – fin XIXe siècle). Peu d’expressions françaises comportent le mot bain au singulier, et une seule, être ou se mettre dans le bain, renvoie au bain considéré métaphoriquement comme un contenant – et encore…

Pour désigner spécifiquement les toilettes, certains Québécois emploient encore parfois bécosses, à partir du back house anglais de la campagne, terme qui s’est francisé dans sa forme et son orthographe. La bonne société le considère comme particulièrement vulgaire, puisqu’il désigne un endroit sale, à une seule fonction, et rappelle un passé peu glorieux. L’euphémisme toilettes (ou, au Québec, toilette) – signifiant à l’origine « petite toile », puis employé pour désigner les soins du corps – est devenu pour plusieurs trop explicite et il heurte parfois aussi la pudeur d’une population qui, depuis son urbanisation, a souvent une chambre de bain. Les prudes Québécois ont donc tendance à aller à la chambre de bain même au restaurant, ce qui, évidemment, fait sourire les Français, qui ont d’autres façons de ne pas dire la chose. D’ailleurs, leur histoire est différente. Ils ont souvent eu une toilette indépendante de la salle de bains, parfois sur le palier ou dans la cour, en commun avec leurs voisins. Ils ont « nommé-voilé » cette pièce en passant, entre autres, eux aussi, par l’anglais avec water-closet (depuis 1848), puis l’ont peu à peu francisé : W.-C. (1887), waters (1913) et, enfin, vécé (1931). Pierre Guiraud montre bien à quelles transformations et entourloupettes les Français se livrent pour « neutraliser l’association qui se reforme sans cesse » entre les mots et la chose[12].

Vous voulez acheter ou louer ?

« Je viens de déménager dans un 5 1/2 », vous annoncera le Québécois, qui n’utilise pas beaucoup le mot emménager. Le Français, lui, dira : « J’emménage dans un F3 », et le Torontois, « I just moved to a two bedroom apartment ». C’est vraiment la tour de Babel !

En France, l’appartement que l’on cherche s’appelle un studio[13], un F1, F2, F3… ou un T2, T3… Cela implique, pour le F2 par exemple, deux pièces en plus de la cuisine et de la salle de bains (ou salle d’eau). Ce F renvoie à fonction. La mode de plus grands espaces a donné naissance au T (pour type). Un T2 est souvent aussi grand qu’un F3. On indique toujours, en France, la surface de l’appartement à vendre ou à louer.

Au Québec, bien que la surface des pièces ne soit jamais mentionnée dans les petites annonces, on compte tout… même l’indispensable salle de bains, qui vaut une demi-pièce[14]. Un 2 1/2 peut être, par exemple, une cuisine avec un salon-chambre, plus la demie, ou alors seulement un salon double, avec l’éternelle demie. Tous les logements du Québec sont des 1, 2, 3, 4, 5, 6… et demie. Et le vocabulaire immobilier – défiant les lois les plus élémentaires de la mathématique – prétend que deux demies ne forment jamais un entier : quand il y a deux salles de bains, on parle d’un six et demie avec deux salles de bains. La demie est donc devenue le substantif qui remplace le mot pièce !

Cette façon unique qu’on a au Québec de compter les pièces peut sembler pointilleuse ; elle est, paradoxalement, la plus floue, la plus obscure qu’on puisse imaginer. Et ce n’est pas vraiment une question de langue ou de mathématiques.

Selon que vous serez puissant ou misérable…

La vie est différente en Amérique et en Europe. Les mots aussi. Et, si l’on en croit beaucoup de linguistes normatifs québécois (que j’appelle « linguistes-à-colonnes » : « dites – ne dites pas »), le Québec est toujours du mauvais côté de l’Atlantique, et notre vocabulaire est à revoir dès qu’il s’écarte de celui des Français.

« Reconnaissons nos anglicismes à nous et manifestons le désir de nous améliorer, de soigner notre langue. Ainsi, par exemple, si nous acceptions dès à présent le fait que les mots week-end, utilisé depuis un siècle, toast, depuis 1750, et stop, depuis 1792, sont des mots français, nous ferions un grand pas pour la vitalité de notre langue[15]. »

Depuis combien de temps utilise-t-on salle à dîner ? chambre de bain ? La longévité d’un mot témoigne-t-elle de son bon emploi ? Qui jugera de la justesse de cet emploi ? Nos linguistes normatifs, bien sûr, eux qui brûlent de purger notre langue de tout anglicisme, archaïsme ou barbarisme en établissant des listes à colonnes, où ils justifient l’usage français et condamnent inconditionnellement celui des Québécois.

Et, pour finir, une anecdote

Une petite Montréalaise, polie, m’a dit, en entrant chez moi : « C’est cute, chez vous ! » et une petite Parisienne, tout aussi polie, « C’est cosy, chez vous ! » Je les ai remerciées toutes les deux. * * *

  1. J. DARBELNET, Regards sur le français actuel, Montréal, Beauchemin, 1963, p. 11. [Retour]
  2. J. FOREST, Les anglicismes de la vie quotidienne des Québécois, Montréal, Triptyque, 2006, p. 46. [Retour]
  3. En France, on appelait les garçons d’ascenseur des liftiers. [Retour]
  4. On emploie rarement au Québec le terme second dans ce cas, contrairement à ce que font les anglophones et la majorité des francophones. [Retour]
  5. S. CLAPIN, Dictionnaire canadien-français, [En ligne], 1894, [www.dicocf.ca/clapin000.html] [Retour]
  6. J. FOREST, op. cit, p. 107. [Retour]
  7. Loc. cit. [Retour]
  8. Les Français appellent ces roulottes mobil homes, puisque le terme roulotte est chez eux réservé aux anciennes habitations des populations nomades. [Retour]
  9. J. DARBELNET, « Aperçu du lexique franco-canadien » in Langue et identité, le français et les francophones d’Amérique du Nord, présenté par Noël Corbett, Québec, Presses de l’Université Laval, 1990, p. 314. [Retour]
  10. Ce dernier terme a longtemps désigné l’endroit où se réunissaient les représentants des commerçants. Il s’est ensuite, par métonymie, déplacé vers le groupe qui se réunit dans cette chambre. [Retour]
  11. Si chambre à coucher n’est pas un anglicisme, notre chambre des maîtres est un calque qui copie le master bedroom anglais – et pourtant, on parle bien en France d’une maison de maître… Il faudrait creuser la question. [Retour]
  12. P. GUIRAUD, Sémantique, Paris, PUF, 1966, p. 61. (Que sais-je ?) [Retour]
  13. Studio a d’abord été utilisé pour désigner un atelier d’artiste. L’anglais l’a d’abord emprunté pour parler d’ateliers de peintres italiens, puis le français, d’ateliers de peintres anglais. Studio a le sens de « pièce unique où l’on vit » seulement depuis 1914. On l’emploie en ce sens en anglais et en français ; il commence à s’imposer également au Québec (où l’on parle encore de 1 1/2). [Retour]
  14. Encore qu’on ne s’entende pas là-dessus : des agents immobiliers m’ont affirmé qu’il s’agissait de la salle de bains, l’Agence des courtiers et agents immobiliers du Québec aussi, la Régie du logement m’a dit que cette demie ne relevait que des us et coutumes des Québécois. [Retour]
  15. J. LAURIN, Nos anglicismes – 2300 mots ou expressions à corriger, Montréal, Éditions de l’Homme, 2006, p. 9. (Le bon mot) [Retour]

Bibliographie

Dictionnaire historique de la langue française, sous la direction d’Alain Rey, Paris, Le Robert, 1998.

BERTRAND, Guy. 400 capsules linguistiques, Montréal, Lanctôt éditeur, 1999.

FOREST, Constance et Denise BOUDREAU. Le Colpron, le dictionnaire des anglicismes, Laval, Groupe Beauchemin, 1998.

LAURIN, Jacques. Les américanismes, Montréal, Éditions de l’Homme, 2004.

MANSION, Hubert. 101 mots à sauver du français d’Amérique, Montréal, Michel Brûlé, 2008.

Web

Dictionnaire canadien-français (Sylva Clapin – 1894) [www.dicocf.ca/clapin000.html]

Glossaire du parler français au Canada (Société du parler français au Canada – 1930) [www.dicocf.ca/glaa000.html]

Glossaire franco-canadien (Oscar Dunn – 1880) [www.dicocf.ca/o80d000.html]

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