CAF «in progress»
Notre CAF a de l’avenir Un nombre record d’inscriptions
L’un des premiers signes de santé de notre CAF, et un gage d’avenir, est l’augmentation du nombre d’inscriptions : cet automne, plus de 320 élèves se sont engagés dans un travail de perfectionnement en français avec l’aide d’un pair, ce qui représente une multiplication par deux du nombre d’inscriptions !
Bien que le bilan de la session n’ait pas encore été produit au moment d’écrire ce texte, nous sommes déjà en mesure d’attribuer cette augmentation à plusieurs facteurs :
- des formules d’inscription plus souples qui permettent aux élèves de s’inscrire pour 5, 10 ou 15 rencontres ;
- l’ouverture du CAF dès les premiers jours de la session ;
- un travail de publicité et d’information efficace ;
- un encadrement plus serré de certains élèves inscrits en session d’accueil et d’intégration, soit les élèves inscrits dans des groupes homogènes de mise à niveau en français, élèves pour qui l’inscription au CAF était une exigence des titulaires des cours de français et de philosophie ;
- une nouvelle orientation du travail de monitorat, une aide aux devoirs pour les élèves inscrits dans un cours de mise à niveau ou dans un cours complémentaire en français écrit ;
- les retombées de l’épreuve uniforme de français sur l’ensemble de la communauté collégiale, en particulier sur les enseignantes et enseignants de français, avec l’effet que l’on a observé, c’est-à-dire que, très tôt dans la session, les élèves se sont bousculés à notre porte.
Un nombre record de monitrices et de moniteurs
Sans compter les stagiaires, 40 monitrices et moniteurs ont travaillé au CAF cet automne. Si la plupart sont des élèves ou d’ex-élèves du CVM, certains ont été recrutés directement dans les universités pour qu’on puisse répondre à toutes les demandes d’inscription.
Nos monitrices et moniteurs ont en commun d’avoir été initiés à l’approche du Mentor — méthode d’autocorrection de la langue écrite créée par Claire Brouillet et Damien Gagnon — et à une démarche analytique précise qui a été mise en place par l’équipe du CAF de l’an dernier. Dans ce contexte, plus que jamais, les monitrices et moniteurs ont été amenés à travailler à l’aide des textes des élèves pour répondre aux besoins de ces derniers.
Le dialogue au sein de l’équipe des monitrices et moniteurs a maintenant atteint une intensité inégalée. Notre équipe formule des suggestions et des propositions qui permettent au CAF de toujours s’adapter aux besoins des élèves. Fait à remarquer, l’équipe compte plusieurs élèves qui poursuivent une démarche de création en arts plastiques, en théâtre, en musique, en littérature, et nous voulons profiter de cette créativité pour faire du CAF un lieu de culture vivante. Ainsi, dès la session de l’hiver, nous comptons mettre sur pied, en collaboration avec le CANIF (centre d’animation en français), des activités touchant la langue : concours, expositions, lectures, conférences, etc.
Si le CAF peut mener à bien son travail, c’est grâce aux monitrices et moniteurs ; leur sérieux, leur engagement et leur dynamisme sont vraiment porteurs d’avenir… Pour nous assurer que la plus grande majorité d’entre eux soient des élèves du CVM formés dans le cadre du cours complémentaire prévu à cet effet, nous avons demandé au Département de français d’ouvrir un deuxième groupe, ce qui a été accepté. La relève semble donc assurée.
Nouvelles formules et nouveaux modes de travail
Si l’augmentation de la clientèle que nous avons observée cet automne a de quoi nous réjouir, elle nous oblige, à court terme, à transformer notre façon de travailler ainsi que certains aspects de notre fonctionnement. La formule actuelle d’aide en français écrit (la meilleure à notre avis) est celle du monitorat individuel par les pairs, et les responsables du CAF supervisent individuellement les monitrices et moniteurs (une douzaine actuellement) à raison d’une demi-heure par semaine. Pour préparer ces rencontres de supervision, nous lisons régulièrement une centaine de dossiers d’élèves.
Puisqu’il y a peu de chance qu’on augmente le dégrèvement qui nous est alloué — généreux si l’on pense aux ressources disponibles mais insuffisant si l’on pense au travail à faire –, nous entreprendrons, dès l’hiver, de nouvelles expériences. Nous comptons jumeler des monitrices et moniteurs qui réviseront ensemble leurs corrections et leurs diagnostics, remplacer les rencontres individuelles par des rencontres en petits groupes et tenir des ateliers en grands groupes pour assurer une formation continue.
Pour ce qui est de l’aide aux élèves, nous comptons élargir la formule des ateliers Ad hoc (ateliers sur des points de grammaire, donnés par des enseignantes et enseignants du Département de français) en créant des séries d’ateliers animés par des équipes de monitrices et de moniteurs. Ces ateliers permettront de rejoindre les élèves qui hésitent à s’engager dans une démarche mais qui voudraient obtenir certains renseignements sur la langue. Nous réfléchissons aussi à la possibilité de mettre à la disposition de tous les élèves des outils d’autoapprentissage.
Que la littérature entre au CAF !
Afin de nous rapprocher encore plus des besoins des élèves et de contrer le phénomène des abandons en cours de monitorat, nous avons établi, cette session, des moyens de recueillir les appréciations des élèves qui s’inscrivent au CAF ainsi que celles des monitrices et des moniteurs. Le contenu de ces appréciations ne sera lu et évalué qu’à la fin de la session, mais déjà, nous voyons se profiler les nouvelles demandes.
Plusieurs élèves souhaitent qu’il y ait un lien plus étroit entre le contenu des cours de littérature et nos interventions. Pourquoi pas ? Bien sûr, nous devons rester vigilants et ne pas multiplier les objectifs. Par exemple, nous ne voulons pas que les monitrices et moniteurs expliquent la façon d’analyser un texte littéraire. Cependant, selon nous, il serait pertinent de lier le travail sur la langue et ceux sur la construction logique de paragraphes ou sur la cohérence de l’argumentation. Nous avons expérimenté cette formule avec les élèves de la session d’accueil et d’intégration qui suivaient en parallèle soit le cours de mise à niveau et le premier cours de littérature, soit le cours de mise à niveau et le premier cours de philosophie, et nous croyons que nous devons poursuivre dans cette voie. Dès janvier, nous réunirons en atelier des monitrices et moniteurs afin de les aider à mettre en place des stratégies pour aborder ces questions. De plus, nous comptons faire en sorte que le texte d’entrée de même que les textes demandés par les monitrices et moniteurs soient de type argumentatif et que, dans la mesure du possible, ils aient pour point de départ un texte littéraire ou, à tout le moins, une production culturelle. Par ailleurs, nous chercherons à établir des liens encore plus étroits avec nos collègues du Département de français pour qu’on puisse utiliser au CAF des textes produits dans leurs cours. Bref, toutes les mesures possibles pour combler le fossé entre langue et littérature seront mises de l’avant.
Le CAF participe à la réflexion sur la place du français écrit dans les cours de littérature
Le CAF participe depuis plusieurs années déjà à une discussion sur la place du français écrit dans les cours. L’approche utilisée au CAF a déjà eu des effets sur la façon d’aborder le français écrit dans les cours de littérature. Les professeurs de français utilisent, depuis plusieurs sessions, la grille de correction du Mentor, et les 30 p.100 accordés à la langue sont donnés selon la fréquence d’erreurs et en fonction d’une échelle d’évaluation particulière à chacun des cours. Cette approche commune a donné de bons résultats jusqu’ici (nous pouvons sans aucun doute attribuer à ces actions une partie de la meilleure réussite des élèves du CVM à l’épreuve uniforme). Nous croyons toutefois qu’il est possible d’aller plus loin. Le CAF, en collaboration avec la coordination départementale et un certain nombre d’enseignantes et d’enseignants, réfléchit à une façon d’aborder le français écrit dans les cours de français sans pour autant réduire le temps accordé à l’enseignement de la littérature. Des séances plénières auront sans doute lieu, durant l’hiver, pour discuter la pertinence d’utiliser le traitement d’erreurs dans les cours, de fixer des objectifs précis et limités en français écrit dans chacun des cours ou de rendre obligatoires des ouvrages de référence liés à la grille de correction. Le CAF est aussi intéressé à participer à des discussions sur nos exigences en français écrit au collégial et sur des moyens à prendre pour harmoniser davantage la correction faite par les enseignantes et enseignants. Là encore, il y a de l’avenir…
Le français écrit dans tous les cours du collège
Notre point de vue est clair : il ne faut pas que le CAF et les professeures et professeurs de français soient les seuls à se préoccuper du français écrit. Pour notre plus grand bonheur, cette position est partagée par Paul Boisvenu, directeur des études au Collège, dont l’un des objectifs de travail consiste à mettre en application le plus rapidement possible notre politique de valorisation du français. Un comité dont la fonction sera de veiller à l’application de la politique sera formé sous peu et, au cours de la session d’hiver de 1998, il effectuera une tournée de tous les départements afin de voir quels moyens sont mis en oeuvre pour amener les élèves à s’améliorer en français écrit. Le CAF a déjà participé à une réunion de réflexion à ce sujet. Nul doute qu’on lui demandera de participer à l’élaboration d’activités de formation ou à la diffusion d’outils utiles à l’ensemble des professeurs.
Dans la même veine, nous comptons établir rapidement un premier contact avec l’ensemble des enseignantes et enseignants du Collège. Nous leur remettrons, dès le début de la session d’hiver, des feuilles de recommandations à l’intention des élèves faibles en français écrit. Cette pratique fait déjà partie des moeurs dans les cours de français.
Le CAF et l’épreuve uniforme de français
De plus en plus, nous voyons arriver au CAF des élèves qui craignent d’échouer à l’épreuve uniforme. Nous avons un rôle à jouer dans ce dossier, ne serait-ce que pour faire baisser le niveau d’anxiété des élèves. Durant les sessions précédentes, nous leur offrions essentiellement une aide en français écrit, aide pertinente puisque 23 p.100 d’entre eux ont échoué à cause de leur méconnaissance de la langue écrite, en mai 1997. Pour répondre à leurs besoins, nous avons intégré aux activités du CAF des ateliers Ad hoc sur l’épreuve. Nous y donnons des renseignements sur les critères de correction du Ministère, corrigeons avec les élèves un texte selon ces critères, parlons des outils de référence et d’analyse pertinents, et révisons avec eux certains courants littéraires.
Il nous semble important qu’existe au Collège un lieu où soient concentrés les renseignements sur l’épreuve afin que les élèves puissent trouver des réponses à leurs questions. Bien sûr, les titulaires des cours de français fournissent ces renseignements aux élèves et restent les premières personnes responsables de leur formation. Toutefois, nous voyons de plus en plus de cas d’élèves qui ont tardé à subir l’épreuve pour différentes raisons ; d’autres ont échoué à l’épreuve et veulent la passer à nouveau. Ces élèves risquent d’être de plus en plus nombreux. Voilà pourquoi nous comptons, dès le printemps, créer des documents de référence et mettre sur pied des ateliers plus nombreux et plus systématiques.
CAF réseau ou l’effet papillon
Tous ces projets en devenir sont prometteurs. D’une certaine façon, nous pouvons dire qu’ils mettent le CAF en réseau : réseau de monitrices et moniteurs d’abord, mais aussi, réseau avec les enseignantes et enseignants de français comme des autres disciplines, réseau avec les responsables de la session d’accueil et d’intégration, réseau avec la direction des études et le personnel de l’organisation scolaire… L’avenir n’est-il pas assuré entre autres par la vivacité de tels réseaux ?
… Mais notre CAF a-t-il un avenir devant lui ?
On dit que l’avenir des CAF n’est pas rose en ces temps de compressions budgétaires. On leur reproche de ne pas faire preuve d’efficacité, de ne pas être rentables. On se demande si les CAF ne répondent pas aux besoins d’une clientèle dont les chances d’obtenir un diplôme sont minces (ce dernier point reste encore à prouver).
Que peuvent bien signifier très exactement « efficacité » et « rentabilité » en matière d’enseignement de la langue quand elles sont entendues à court terme ? Songeons qu’il faut normalement une douzaine d’années pour que, de l’enfance à l’adolescence, l’individu puisse s’exprimer par écrit, et l’on exigerait que, en une douzaine d’heures passées au CAF, l’élève qui n’y était pas encore parvenu y parvienne ! On aurait alors oublié que, entre la connaissance des règles grammaticales et le savoir-écrire, une longue pratique d’appropriation de ces règles doit s’inscrire.
Ce qui paraît essentiel dans la démarche de l’élève qui s’inscrit au CAF, c’est son désir de se rendre maître de son apprentissage, de reconnaître que l’écriture lui est nécessaire. Il s’agit d’un premier pas sur une route qui sera longue, il ne faut pas le lui cacher ni nous le cacher. Faudrait-il refuser aux élèves qui choisissent de s’inscrire au CAF cette lente mais essentielle découverte ? Est-ce vraiment là un luxe que nous ne pourrons plus nous payer ? D’ailleurs, ce luxe en est-il vraiment un ? Si, à l’instar d’un bon livre lu, puis prêté, et prêté de nouveau, le fait de s’inscrire au CAF et de venir y travailler faisait à son tour des petits, avait des répercussions insoupçonnées sur les autres élèves, sur les enseignantes et enseignants, bref, sur toute la communauté collégiale ? Si l’efficacité et la rentabilité des CAF ne devaient résider que dans cette circulation, que dans le climat d’éveil qu’ils créent et maintiennent, ne serait-ce pas déjà immense ?
Voyons cela de plus près. À qui profitent les CAF ? Aux élèves qui s’y inscrivent, nous le croyons. Bon nombre d’entre eux acquièrent, au contact de leur monitrice ou de leur moniteur, un souci d’application et de réussite qu’ils n’avaient pas au départ. Au moment où nous devons à tout prix augmenter le taux de réussite si nous ne voulons pas voir baisser notre financement, ne serait-ce pas une erreur que de faire disparaître un lieu où se transmettent des modèles de réussite ?
Le CAF profite aussi aux monitrices et moniteurs qui y travaillent. Le monitorat enrichit les plus forts, développe la confiance en soi, la capacité de travailler en équipe et d’aider les autres, le sens des responsabilités, ouvre la voie à une carrière.
Le CAF profite, sans contredit, aux professeures et professeurs qui y travaillent. La supervision les incite à revoir leur pratique pédagogique, les sensibilise aux difficultés des élèves les plus faibles, les amène peut-être à entrevoir qu’il est possible de s’occuper à la fois de langue et de littérature. Il profite enfin à l’ensemble des enseignantes et enseignants, qui viennent y chercher conseils et soutien.
Le CAF est un lieu important dans la vie collégiale. C’est un lieu de rassemblement où se transmettent des idées et où s’élaborent des projets. Si disparaissaient ces rares lieux où les élèves s’animent, y gagnerions-nous vraiment ? Pouvons-nous comptabiliser ces quelques minutes d’écoute accordées par une monitrice ou un moniteur à une ou un élève qui a des difficultés d’orientation, d’organisation ou de motivation ?
L’avenir des CAF est fragile. Pour qu’il soit assuré, il faudra que les critères de rentabilité qu’on leur impose soient nuancés. Faire disparaître les CAF, c’est faire disparaître beaucoup plus que des centres d’aide en français, c’est faire disparaître un vaste réseau, un lieu de vie, tout un effort de cohérence en matière de langue…
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