Intercaf 2017: une rencontre riche en échanges
La 31e édition de l’Intercaf s’est tenue le 26 mai dernier à la bibliothèque de l’École nationale d’aérotechnique (ÉNA) de Saint-Hubert. Environ 85 représentants de nombreux établissements collégiaux y ont passé une journée des plus agréables autour du thème de la rencontre : la mission des centres d’aide en français (CAF), les défis relevés et ceux qui les attendent dans les prochaines années.
Après les mots d’ouverture de Sylvain Lambert, directeur général du cégep hôte, et de Cathie Dugas, directrice du CCDMD, les participants ont eu le plaisir d’assister à un entretien fort captivant entre Colette Buguet-Melançon, professeure de langue et littérature, maintenant retraitée, du cégep Édouard-Montpetit (CEM) et fondatrice du tout premier CAF, et Colette Ruest, professeure de langue et littérature du cégep de Trois-Rivières et animatrice du Réseau des repfrans pour le Carrefour de la réussite.
Mme Buguet-Melançon s’est inspirée de la méthode mutuelle d’enseignement (ou pédagogie active) – utilisée pour la première fois à Paris, en 1747 – pour fonder le tout premier CAF. Un succès, puisque, peu de temps après, d’autres cégeps emboitaient le pas.
Ces dames sont toutes deux d’accord sur le fait que les CAF sont toujours aussi pertinents aujourd’hui et qu’ils doivent faire partie intégrante du projet pédagogique des collèges. Parce que le niveau de langue a baissé chez nos étudiants et étudiantes? Non, il importe de pas ne pas sombrer dans la nostalgie du passé. C’est simplement que nous avons développé, au fil des ans, de meilleurs moyens de diagnostiquer les difficultés des élèves.
Elles ont convenu que les CAF ont dû diversifier leurs services, puisque les besoins des étudiants se sont diversifiés aussi : la mise en œuvre de l’Épreuve uniforme de français (EUF) en 1996, l’augmentation de la proportion d’élèves en situation de handicap, l’arrivée de nombreux étudiants de langue étrangère y ont notamment contribué. En ce qui concerne les besoins spécifiques des étudiants allophones et de ceux éprouvant des difficultés d’apprentissage, ils ne relèvent pas nécessairement du personnel des CAF, bien qu’ils en influencent chaque jour le travail. Ainsi, les CAF relèvent ces défis avec imagination et mettent en place des formules susceptibles de répondre à des demandes variées : programme d’autoapprentissage, aide en lecture, ateliers de groupe, séances de conversation, notamment.
Mmes Ruest et Buguet-Melançon nous ont invités, malgré tout, à ne pas perdre de vue certains points importants : fixer, chaque session, des objectifs clairs que nous saurons atteindre à petits pas, faire preuve de bienveillance envers nos étudiants et ne jamais oublier que, bien que nous soyons toutes et tous des experts passionnés de la langue, nous ne sommes pas des sauveurs.
Bons coups et pratiques gagnantes
L’atelier qui a suivi cette très belle entrée en matière portait sur les défis relevés dans nos CAF. Réunis en petits groupes, nous avons pu échanger sur des sujets qui nous sont chers.
Le premier sujet était la fréquentation des CAF et la motivation des étudiants. Certains centres d’aide ont mis en place des systèmes de rétribution pour valoriser la participation tant des étudiants et étudiantes que des tuteurs et tutrices : rémunération, remise d’un pourcentage de points alloués au français, association avec la coopérative étudiante pour des chèques-cadeaux ou cadeaux de matériel invendu, mention d’engagement du cégep. Il a été question de l’importance de promouvoir les CAF : certains responsables font la tournée des assemblées départementales ou des classes pour présenter leur CAF et d’autres ont baptisé la dictée diagnostique de leur cégep du nom du centre d’aide – l’important est d’offrir une visibilité aux services offerts. Enfin, le sentiment d’appartenance au CAF a également retenu l’attention : 5 à 7, diner pizza, tirages de prix, mais aussi participation des tuteurs et tutrices à la création de matériel didactique.
Les participants ont ensuite discuté de leurs bons coups en matière d’aide, de formation et de pédagogie. Comme plusieurs l’ont constaté, les initiatives menées au sein des CAF sont très diversifiées; nul doute que certaines génèreront de nouvelles formules dans le réseau.
La présence d’une permanence au CAF, qu’il s’agisse d’un employé de bureau ou d’une technicienne, se révèle une excellente façon de mieux répondre aux besoins des étudiants. Nombreuses sont les personnes qui disent faire des efforts pour maximiser l’aide aux élèves : accéder à des formations sur les troubles d’apprentissage pour les enseignants et le personnel gravitant autour des CAF, jumeler des étudiants présentant les mêmes difficultés avec un même tuteur, mettre en place un bureau d’aide en littérature et instaurer la question du double seuil de réussite, avec la mention « incomplet » au relevé de notes.
L’EUF a également fait jaser. Si certains cégeps misent sur des simulations dans les cours de littérature, d’autres organisent un exercice semblable à l’EUF durant la fin de semaine précédant l’épreuve. Les étudiants qui se prêtent au jeu doivent débourser environ 25 $. Les sommes amassées servent à embaucher de réels correcteurs de l’épreuve afin d’évaluer les performances des étudiants.
Enfin, certains établissements comptent sur le regroupement de leurs centres d’aide afin de créer un véritable carrefour pour l’aide à la réussite. Cette organisation spatiale favoriserait, entre autres, l’intérêt et la coopération des tuteurs.
Toutes ces idées inspirantes nous ont bien ragaillardis et ont alimenté les conversations lors du lunch qui a suivi.
Visite des hangars de l’ÉNA
L’ÉNA a déployé tous ses charmes à titre d’établissement hôte de ce 31e Intercaf. Les participants ont eu droit à une visite guidée des hangars, qui contiennent 35 aéronefs et des équipements évalués à plus de 85 millions $. Les visiteurs ont également été dirigés vers le CAF, situé à proximité de la bibliothèque. Celui-ci accueille plus d’une centaine d’étudiants et étudiantes, chaque session. Une technicienne y est présente à temps partiel, en soutien à une coordination professorale équivalente à deux tiers de tâche.
Problèmes et pistes de solutions
Au retour de la pause du diner, les participants ont été invités à poursuivre leurs réflexions sur les défis des CAF. Les échanges de l’avant-midi portaient sur les défis relevés avec succès. Les discussions de l’après-midi allaient solliciter les participants autrement : comment solutionner les situations perçues comme problématiques actuellement dans les CAF du réseau? Il s’agissait de partager des connaissances et des idées et d’explorer, en petits groupes, des pistes de solution à des problèmes liés aux cinq aspects suivants.
La logistique : de l’inscription en ligne à l’intégration d’une période CAF à l’horaire des étudiants de première année, il apparait clairement que les façons d’inciter les élèves à fréquenter les CAF doivent se démarquer des autres (nombreuses) activités qui leur sont offertes. Pour profiter davantage de l’expertise de leurs collègues, les représentants des centres souhaitent davantage de communication avec eux et un partage accru du matériel de formation.
Les ressources humaines : il a abondamment été question de la nécessaire reconnaissance des tuteurs et de leur implication de premier plan auprès des étudiants en difficulté. Par ailleurs, il a été recommandé d’éviter le renouvèlement complet des équipes de coordination.
L’espace physique et les ressources matérielles : le besoin de multiplier les heures d’ouverture des CAF, de même que d’assurer leur convivialité, a été mentionné. Tout cela passe bien évidemment par la révision à la hausse des budgets dévolus aux centres par les directions des établissements.
La pédagogie : il a été question de l’arrimage de la correction de la langue entre toutes les disciplines collégiales, de même que de l’élaboration d’exercices favorisant une meilleure réflexion sur la grammaire.
L’aide aux étudiants présentant des besoins particuliers : la conception de matériel répondant mieux aux allophones est souhaitée. L’implantation de cours à mi-chemin entre la francisation et le renforcement est vue d’un bon œil. De plus, le personnel des CAF souhaiterait recevoir de la formation sur les troubles d’apprentissage et les constructions syntaxiques des langues étrangères parlées par le plus grand nombre d’élèves allophones.
En guise de conclusion, la directrice adjointe aux études du cégep Édouard-Montpetit, Rachel Belzile, a souligné que les CAF devaient dorénavant faire face aux nouvelles réalités des étudiants, alors que les diagnostics se raffinent et que les élèves allophones pour qui le français est une seconde, voire une troisième ou quatrième langue, prennent d’assaut les salles de classe. Elle a rappelé que l’acquisition du français aide ces personnes à grandir et à nommer le monde. Et c’est justement ce que visent nos cégeps : faire des étudiants de toutes les disciplines et de tous les horizons, des adultes capables de penser et de réfléchir. Bref, de meilleurs citoyens.
NDLR
- Les propos recueillis lors de l’entretien de Colette Ruest et Colette Buguet-Melançon sur la mission et l’avenir des CAF paraitront le 10 octobre 2017 dans Correspondance.
- Sur le site de l’intercaf 2017, dans la section « Documentation », vous trouverez la transcription des notes des activités de l’Intercaf (la première activité sous la rubrique «Pratiques gagnantes» et la deuxième sous «Problèmes et pistes de solution»).
- La prochaine édition de l’Intercaf, en mai 2018, se tiendra au cégep de Trois-Rivières. Au plaisir d’y retrouver en grand nombre les responsables de CAF du réseau!
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