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Enseigner en mise à niveau…

Enseigner en mise à niveau…

Alice Descôteaux est animatrice d’un centre d’aide en français depuis six ans. Elle s’apprête à retourner enseigner aux élèves inscrits en mise à niveau. Elle laisse ici son esprit vagabonder sur cette pensée d’un retour en classe. Je vous invite à entrer avec elle au pays des songes pédagogiques…

Réflexions

Ouf !, je fais le saut : 25 élèves en difficulté en même temps dans la même classe !

Et je rêve…

Lundi matin, je me lève. J’ai rêvé aux élèves que je n’ai pas encore rencontrés… 25 dans une même classe. Et plus d’un groupe, évidemment. J’ai rêvé que les groupes étaient plus petits, que j’avais le temps de connaître chaque élève, que je n’en échapperais aucun, que j’aurais le temps de les complimenter, de connaître leurs difficultés.

Mardi matin, je me lève. J’ai rêvé aux élèves que j’ai rencontrés hier et à ceux que je rencontrerai demain. On avait étalé une mise à niveau de 90 heures sur deux sessions. Ces élèves avaient la chance d’intégrer le français écrit, matière qui demande du temps. Et quand on réussit et qu’on sait qu’on est apte à aller dans un cours, on est optimiste et motivé.

Mercredi matin, je me lève. J’ai rêvé que j’avais dans mes classes de vrais élèves, pas ceux à qui ont fait accroire qu’ils auront un DEC ! Non, de vrais élèves qui étaient entrés au collège avec des moyennes de cinquième secondaire non normalisées. Après tout, je suis enseignante, pas psychorééducatrice ! J’ai parfois l’impression d’enseigner bien d’autres choses que le français écrit : la mise à jour d’un agenda, la conservation des travaux scolaires (en ordre dans un classeur à anneaux), l’avantage d’apporter ses outils en classe (Ah non !, mon dictionnaire est dans ma case !), etc. L’autre jour, un élève m’a dit qu’il était tellement occupé par sa calligraphie qu’il n’avait même pas le temps de se demander si c’était le verbe avoir ou la préposition…. Oui, enseigner à des élèves qui peuvent et veulent faire des études.

Jeudi matin, je me lève. J’ai rêvé que j’avais mis à la porte ceux qui n’étaient pas motivés, qui remettaient leurs travaux en retard, qui n’avaient pas fait les exercices commandés la semaine précédente. À ma grande surprise, il restait du monde dans ma classe et il était de bonne humeur, ce monde ! Et cela marchait mieux. Mais j’avais un mot sur mon bureau à mon retour : je devais appeler mon directeur ! « On les a acceptés, il faut mener la session à terme. »

Jeudi midi, j’ai fait un somme ! J’ai rêvé que mon directeur des études enseignait avec moi dans ma classe. Bonne idée ! Je passe le prendre, et je l’amène.

Vendredi matin, je me lève. Le vrai pays des merveilles ! Les élèves savent que le français écrit est important. On le leur a expliqué au secondaire et les autres profs de mon collège le leur disent aussi. Ils sont motivés. Woahooo !

Samedi matin, je me lève. Cauchemar ! Aujourd’hui, je dois corriger.

Dimanche, jour de repos… Je pense à tout cela, aux moyens que je prendrais si j’avais le pouvoir. Pourtant, le dimanche, on doit se reposer. Penser, est-ce travailler ? Merci mon Dieu, la fin de session arrive ! Je mérite un repos. Et je rêve que personne ne s’épuise devant l’impossible… et que le service de garderie au cégep soit réservé aux tout-petits. La nuit est noire au pays du français écrit et les normes ministérielles tellement irréalistes. On est aussi bien de rêver ! Oui, des classes plus petites… pour de meilleurs résultats à long terme.

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