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À la conquête du sens!

À la conquête du sens!

Échos de recherche
Joseph Chbat et Jean-Denis Groleau ont mené pendant deux ans une recherche subventionnée par la Direction générale de l’enseignement collégial dans le cadre du Programme d’aide à la recherche sur l’enseignement et l’apprentissage (PAREA). Ils ont déjà présenté dans les pages de Correspondance, plus précisément dans le numéro 3 du volume 2, un état de leur recherche en cours. Ce rapport de recherche, maintenant terminé et dorénavant accessible sur le site du CCDMD, s’imposait de lui-même à l’intérieur d’un numéro sur le lexique…

 

Le titre de la recherche est éloquent : Stratégies d’apprentissage et sémantique ; la préoccupation première des chercheurs, louable : trouver des stratégies d’application simples et faciles à adopter autant par l’enseignante ou l’enseignant que par l’élève.

Depuis quelque temps, l’ensemble du rapport de recherche rédigé par Joseph Chbat, professeur de philosophie au collège André-Grasset, et Jean-Denis Groleau, professeur de mathématiques au collège Jean-de-Brébeuf, peut être consulté sur le site Internet du CCDMD. Tout y est : le contexte, la méthodologie, les avenues explorées, le plan d’intervention proposé à l’ensemble des collègues du collégial, un aperçu des résultats obtenus. Une bibliographie importante et six annexes, dont un test faisant ressortir des difficultés de nature langagière en mathématiques et un test en argumentation, s’ajoutent aux six chapitres du rapport.

Rien ne vaut une consultation du rapport de manière à bien cerner le cadre conceptuel retenu de même que les activités d’apprentissage élaborées. Toutefois, une présentation succincte des quatre activités d’apprentissage reste fort révélatrice. Ne reste qu’à espérer piquer les curiosités.

Première activité :
Importance des stratégies d’apprentissage

Si, dans l’ensemble, les activités d’apprentissage proposées dans le cadre du plan d’intervention portent sur l’aspect sémantique, la première de ces activités vise à sensibiliser à l’importance des stratégies d’apprentissage en général. De fait, cette sensibilisation aux stratégies d’apprentissage prend toute son importance dans la motivation de l’élève, car on aura beau lui apprendre des stratégies nouvelles, s’il n’est pas gagné à l’idée de leur efficacité, il n’en fera rien.

À cet égard, il faudra prévoir un temps de partage avec les élèves sur ce qu’est une stratégie d’apprentissage et sur sa nécessité. On pourra ainsi leur faire comprendre que le travail intellectuel, à l’instar de tout autre travail, requiert, pour sa réussite, le recours à des plans d’action, à des stratégies, à des façons de faire qu’il faut penser et intégrer à sa vie d’étudiante ou d’étudiant. Afin de présenter l’importance des stratégies d’apprentissage en milieu scolaire, les auteurs utilisent une analogie avec ce qui caractérise la réussite d’un individu dans n’importe quel domaine (publicité, vente, travail professionnel, techniques, sports, etc.). Ils estiment que tout domaine où l’on veut agir efficacement suppose le recours à des stratégies, à des procédures bien pensées et que le domaine des études ne fait pas exception. À titre d’illustration, les auteurs réfèrent à une recherche de Boulet et al. menée auprès d’étudiantes et d’étudiants de première année universitaire à l’Université du Québec à Hull et à Chicoutimi[1], recherche qui a montré que l’étudiante ou l’étudiant à succès a effectivement recours à des stratégies d’apprentissage. Dans cette sensibilisation aux stratégies d’apprentissage, on retient 21 parmi les 143 stratégies présentées par la recherche de Boulet et al. et on les présente comme des stratégies caractérisant l’étudiante ou l’étudiant à succès. Ces stratégies sont reliées aux domaines cognitif, affectif et métacognitif et elles concernent des aspects comme la lecture, la gestion des ressources, la gestion du temps, le travail scolaire et les attitudes à l’égard des examens. Par la présentation de ces stratégies aux élèves, les chercheurs comptent leur faire comprendre ce qu’est une stratégie d’apprentissage et comment elle peut, d’une façon simple et « rentable », augmenter l’efficacité de la personne qui l’utilise.

Deuxième activité :
Importance de la réflexion sur le sens des mots

La réflexion sur le sens des mots se présente comme une activité simple mais riche visant à faire baigner l’élève dans un réseau de concepts complexe et à lui faire ainsi apprivoiser ces concepts par un jeu d’association, de liens de sens entre les mots. L’élève n’est pas toujours conscient de la richesse sémantique qui l’habite et qui lui permet d’établir des ponts entre les mots et des liens de sens. Le faire réfléchir sur ce que contiennent les mots qu’on utilise le place dans une attitude dynamique de conquête du sens et lui permet de faire ressortir des interrelations entre divers concepts, de manière à rendre les plus abstraits plus accessibles grâce à leur liaison avec des concepts plus familiers et plus proches du concret. Les mots sur lesquels on peut faire réfléchir les élèves peuvent être communs ou spécialisés, tirés d’un texte, des questions posées par un pair, des questions proposées par l’enseignante ou l’enseignant, etc. Tous les contextes sont bons, et il s’agit d’enclencher la réflexion et de laisser libre cours à l’imagination de l’élève.

Troisième activité :
Importance de la maîtrise du vocabulaire

Les capacités sollicitées par cette activité sont l’éveil, la sélection et l’ouverture. En effet, cette activité vise à éveiller l’élève à l’importance de la maîtrise du vocabulaire. L’exploration visée comme processus cognitif suppose nécessairement une sélection, un choix pertinent des synonymes ou du sens pertinent des mots. Quant à l’ouverture, on la retrouve dans l’attitude d’esprit où il faut s’ouvrir aux divers sens des mots, accueillir ces significations pour les intégrer à la capacité de manier les idées.

Quatrième activité :
Constitution d’un lexique

Afin de travailler le sens des mots, une activité commune est proposée aux élèves : constituer un lexique pour les mots inconnus. Ces mots peuvent être courants, courants-savants et savants.

Mots courants : mots réguliers, communs, usuels, que l’on entend quotidiennement mais dont le sens peut échapper à l’élève.

Mots courants-savants : mots qui ont un sens courant assez connu mais qui ont en même temps un sens technique dans une discipline donnée. Ainsi en est-il, en philosophie et en mathématiques, des termes « puissance » et « étendue ».

Mots savants : mots qui ont un sens technique très spécifique dans une discipline donnée. Par exemple, les termes « épistémologie », « ontologie » et « noumène » en philosophie de même que « vecteur », « orthocentre », « bissectrice » et « isocèle » en mathématiques.

Afin d’assurer une saine et enrichissante fréquentation des mots et des concepts, les auteurs proposent à l’élève ainsi qu’à l’enseignante ou à l’enseignant de consacrer dans leur pratique éducative du temps à la constitution d’un lexique permanent qui devient un instrument de travail toujours présent entre les mains des élèves de toute discipline. Dans ce lexique, il est question de trouver des définitions intuitives aux mots recherchés et ensuite des définitions officielles, mais il est aussi question de noter des synonymes, des antonymes et des citations. Finalement, on suggère à l’élève d’ouvrir une carte sémantique, dans laquelle il consignera des notes, des réflexions et des expressions reliées à ces mots. Bref, l’idée est de faire habiter chez l’élève le souci du sens, qui, tout en lui procurant un plaisir, l’incitera à enrichir et à maîtriser son vocabulaire.

Sensibiliser les collègues à la réalité langagière des élèves

Toutes celles et tous ceux qui désirent mieux connaître la réalité langagière de leurs élèves et s’engager collectivement à oeuvrer à son amélioration trouveront dans Stratégies d’apprentissage et sémantique matière à réflexion et à intervention. D’ailleurs, le plan d’intervention contenu dans le rapport de recherche constitue un outil simple à utiliser, qu’il est possible d’adopter en tout ou en partie.

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  1. A. BOULET, L. SAVOIE-ZAJC et J. CHEVRIER, Les stratégies d’apprentissage à l’université, Presse de l’Université du Québec, 1996, 201 p. Retour

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