Réintégrer le cours Éléments de linguistique
La dernière réforme de l’enseignement du français au collégial a fait disparaître l’étude de la linguistique. Comme la majorité de mes collègues sans doute, ce gommage, je ne l’avais pas vu venir ; et je ne m’y résigne toujours pas.
Le retour à l’enseignement de la littérature dans tout le réseau, je ne demande pas mieux. Mais pas aux frais de tout enseignement de la linguistique ; en tous cas, pas pour tous les élèves. Pas en pleine fin de XXe siècle !
Le Ministère s’apprête à nous entendre de nouveau et, très probablement, à redéfinir le cours de formation générale propre. J’incline à croire (ou j’ose espérer) que c’est le bon moment de ramener ma proposition de réintégration d’un cours d’éléments de linguistique.
En accord avec plusieurs de mes collègues d’autres collèges, je propose donc :
Qu’un cours d’Éléments de linguistique, essentiellement l’ancien cours 601-902, soit réintégré au programme de formation générale à titre d’option de 4e cours, en concurrence avec l’actuel cours propre ou tout autre 4e cours de communication ou de littérature que le Ministère pourrait lui substituer.
Ce cours de linguistique devrait comprendre à peu près les éléments prévus dans les anciens Cahiers de l’enseignement collégial, à savoir :
1- D’une part : une brève présentation de la linguistique, de ses champs d’étude ; un bref examen du schéma de la communication et des fonctions du langage ; un portrait sommaire des familles de langues ; une brève histoire de la langue française en France et en Amérique du Nord ; et quelques notions de sociolinguistique étayées de considérations appropriées sur la situation de la langue française au Québec.
2- D’autre part et surtout : une description objective et pratique de LA STRUCTURE INTERNE DE LA LANGUE FRANÇAISE D’AUJOURD’HUI : SON SYSTÈME PHONÉTIQUE, SON LEXIQUE, SA MORPHOLOGIE ET SA SYNTAXE.
Pour des élèves qui font deux ou trois ans d’études collégiales, l’acquisition d’un minimum de notions sur ce phénomène qu’on appelle le langage et d’un minimum de connaissances « scientifiques » sur la structure de leur propre langue ne m’apparaît pas un luxe mais une nécessité culturelle et intellectuelle fondamentale.
La linguistique — je le dis à tout hasard, pour le cas où il existerait des professeurs de français qui n’en étaient pas déjà convaincus — n’est pas une ennemie de l’esthétique littéraire ; elle n’est pas non plus un éteignoir de la créativité ou de la sensibilité poétique. Elle est l’étude du matériau même de la littérature : la langue, non seulement comme instrument de communication, mais aussi et surtout comme instrument de conceptualisation de l’univers et de représentation de l’expérience, comme entité non pas purement formelle mais aussi et surtout sémantique.
Il me semble évident que tous les élèves qui le désirent, surtout ceux et celles du secteur pré-universitaire, devraient pouvoir compter sur un tel cours d’éléments de linguistique dans leur programme de formation générale en études françaises.
Il me semble aussi évident qu’un [tel] cours aurait des effets pratiques sur l’amélioration de la maîtrise de la langue écrite. […]
Charles-Henri Audet,
Cégep de Sainte-Foy
(418) 659-6600, poste 3786.
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