L’enseignement de la syntaxe serait-il donc inutile?
Ou bien : Vos yeux beaux d’amour me font, belle marquise, mourir.
Ou bien : Mourir vos beaux yeux, belle marquise, d’amour me font.
Ou bien : Me font vos beaux yeux mourir, belle marquise, d’amour.
M. JOURDAIN
Mais de toutes ces façons-là, laquelle est la meilleure ?
LE MAÎTRE DE PHILOSOPHIE
Celle que vous avez dite : Belle marquise, vos beaux yeux me font mourir d’amour.[1]
Le peu d’intérêt soulevé par cette « chose »nous pousse à croire que, dans les faits, l’enseignement de la syntaxe est jugé, par un grand nombre, très secondaire. Et pourtant… Comment tirer le maximum de plaisir d’un texte littéraire si on ne peut apprécier les effets produits par les choix syntaxiques des auteurs (ou, pire, si on ne comprend pas leurs phrases) ? Comment exprimer une pensée riche si on ne connaît que les structures syntaxiques élémentaires ? Comment appliquer les règles d’accord et de ponctuation si on ne peut analyser une phrase ?
Dans ce numéro, nous chercherons à montrer qu’il est vain d’enseigner au collégial (et pas seulement en français) en faisant mine d’ignorer que les élèves, à cet âge, n’ont pas encore développé pleinement leur potentiel syntaxique. Et nous tenterons — entreprise hasardeuse — de vous communiquer notre passion pour la « chose » afin de vous donner envie de vous engager, vous aussi, sur cette voie du plaisir !
- Molière. Le Bourgeois gentilhomme, acte II, scène VI. Retour
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