" />
2024 © Centre collégial de développement de matériel didactique
Un projet pour améliorer les interventions auprès d’élèves allophones

Un projet pour améliorer les interventions auprès d’élèves allophones

Échos de recherche

Objectifs du projet

Depuis l’automne 2000, le Service d’aide en français écrit du collège de Maisonneuve a changé de formule. L’aide individuelle, à l’Accord, est désormais assurée par des tuteurs (dont la majorité sont des étudiants) qui rencontrent des élèves ayant de la difficulté en français écrit. Les cas les plus lourds sont le plus souvent ceux d’allophones arrivés au Québec depuis peu.

Au fil des années, le centre d’aide a constitué une banque de documents théoriques sous forme de feuilles mobiles que le tuteur remet aux élèves tout en corrigeant leurs textes avec eux à l’aide d’une grille. Les responsables du centre ont aussi colligé de nombreux exercices en français langue maternelle qui complètent les documents théoriques. Ainsi, l’élève repart le plus souvent du centre d’aide avec un texte annoté à l’aide de la grille de correction, des documents théoriques et des exercices de grammaire appropriés. Or, concernant ces outils de travail, nous avons constaté une lacune : les documents théoriques en français langue seconde sont beaucoup moins nombreux et ce, malgré les difficultés majeures des élèves allophones. Ces besoins spécifiques appellent des explications particulières et beaucoup plus pointues (problèmes de syntaxe de tout ordre, concordance des temps et valeur des temps, utilisation des prépositions et des déterminants, etc.). Le centre ne disposait pas non plus de banques d’exercices spécifiquement adaptés à une clientèle en français langue seconde. Ce manque criant se faisait ressentir de plus en plus, alors que la proportion d’étudiants allophones augmentait aussi bien dans les cours de français qu’au centre d’aide (33 étudiants allophones sur 110 étudiants à l’automne 2001). Un projet a alors été mis sur pied afin d’élaborer du matériel didactique destiné aux étudiants allophones en difficulté en français écrit.

Il nous a fallu tenir compte du fait que les étudiants qui arrivent au collégial depuis l’automne 2002 ont, pour la plupart, reçu un enseignement du français basé sur la nouvelle grammaire. Les documents théoriques du centre d’aide se sont progressivement adaptés à la nouvelle terminologie, et il doit en aller ainsi pour les documents rédigés à l’intention de la clientèle allophone.

Déroulement du projet

Deux chercheuses universitaires ont effectué les tâches suivantes :

  • Analyse des dossiers des étudiants allophones inscrits au centre d’aide durant les sessions d’hiver et d’automne 2001 ;
  • Compilation des points faibles relevés lors du diagnostic, du contenu des rencontres, des notions grammaticales revues durant les rencontres individuelles, des documents remis aux étudiants ;
  • Élaboration d’une liste des principales notions sur lesquelles a porté le perfectionnement des étudiants allophones ;
  • Relevé des besoins en matériel (théorique et pratique), besoins émis par les professeurs et les assistants encadrant les étudiants allophones ;
  • Recension du matériel existant concernant les notions mentionnées ;
  • Entrevue avec une spécialiste de la didactique du français langue seconde ;
  • Prospection dans les maisons d’édition scolaire afin de connaître les manuels et cahiers d’exercices en nouvelle grammaire ;
  • Prise de contact avec les responsables des centres d’aide d’autres collèges afin de s’informer sur le matériel utilisé pour traiter des notions ciblées ;
  • Élaboration d’une liste d’ouvrages à recommander au centre en vue de combler les lacunes observées ;
  • Élaboration de matériel théorique et pratique portant sur les notions ciblées lors des étapes précédentes.

Résultats obtenus

L’analyse des dossiers des étudiants allophones ayant fréquenté le centre durant les sessions d’hiver et d’automne 2001 a permis de dégager six notions qui semblaient poser problème de façon particulière :

  • Genre et nombre du nom. Les élèves allophones ont plus de difficulté que les autres à reconnaître le genre des noms en français. Étant donné que le genre des noms inanimés en français est aléatoire, l’application de règles n’est pas pertinente. Les accords en genre et en nombre aussi semblent poser problème.
  • Choix du déterminant. Les étudiants allophones font souvent des erreurs dans l’utilisation des déterminants définis, indéfinis et partitifs. De plus, ils confondent le de préposition et le de déterminant indéfini. Enfin, l’emploi des déterminants indéfinis de et des dans les formes négatives et dans certaines formulations entraîne de nombreuses erreurs.
  • Modes et temps des verbes. Le système verbal de la langue française est souvent mal compris par les allophones. C’est pourquoi les notions relatives aux règles de concordance soulèvent de nombreuses difficultés, surtout quand il s’agit d’harmoniser, dans une composition, les temps de verbe au passé.
  • Organisation de la phrase. La notion de subordination (surtout la complétive et la circonstancielle) pose de gros problèmes. Nous croyons que l’incompréhension des principes de base de la syntaxe est à l’origine de la grande majorité de ces lacunes.
  • Charnières. Les étudiants allophones emploient souvent de façon erronée les prépositions. Ils ne maîtrisent pas aussi bien que les autres étudiants certaines locutions verbales ou des expressions figées qui commandent l’emploi de telle ou telle préposition.
  • Influence de la prononciation sur les accents et sur l’écriture en général. Le français est souvent la troisième langue apprise par les étudiants allophones, après l’anglais. Dans cette perspective, le problème de la prononciation et des accents prend tout son sens. Des problèmes comme la confusion dans les terminaisons verbales au futur et au conditionnel, au passé simple et à l’imparfait ont été observés.

À partir de cette liste, les chercheuses ont tenté de regrouper le matériel existant aussi bien dans les manuels de grammaire traditionnelle que dans les nouvelles grammaires. La nouvelle grammaire permet dans certains cas d’expliquer d’une façon sensiblement différente des notions telles que l’organisation de la phrase, la subordination, etc. Dans d’autres cas, seule la terminologie change vraiment.

Une enquête (qui ne se prétend aucunement scientifique ou exhaustive) auprès d’intervenants travaillant aussi bien dans les centres d’aide que dans les départements de didactique du français langue seconde, a confirmé les lacunes que nous avions observées au centre.

Nous avons ensuite élaboré des fiches théoriques qui ne traitent pas de façon extensive de chacune de ces notions — les grammaires de français langue maternelle le font très bien — , mais qui ciblent directement les difficultés observées dans les dossiers des étudiants allophones. Six fascicules ont été produits, chacun abordant une des notions citées plus haut. La partie théorique comprend les explications relatives à la notion, inspirées des grammaires en français langue seconde et des manuels utilisant l’approche nouvelle grammaire. Suivent des exercices qui se veulent différents de ce qui est déjà accessible au centre d’aide et qui traitent directement des aspects ciblés.

Notre recherche et les documents qu’elle a permis d’élaborer ne sont que le début d’une entreprise qui devra se poursuivre sur d’autres plans et avec des moyens plus étendus. Nous espérons que les fiches théoriques et les exercices soient utiles à cette clientèle qui présente des besoins spécifiques, clientèle appelée à augmenter au cours des prochaines années.

* * *

Le projet

    1. Français langue seconde de l’Accord a été subventionné par la Fondation du collège de Maisonneuve et dirigé par Martine Nachbauer, enseignante au Collège, et Andrée Meilleure, responsable de l’Accord.
  • Télécharger l'article au format PDF

    UN TEXTE DE