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Le français langue seconde dans les cégeps anglophones: perceptions et motivation des élèves

Durant leur parcours collégial, les cégépiens et cégépiennes anglophones ont à suivre deux cours obligatoires de 45 heures en français langue seconde (FLS), soit le cours de la  formation générale commune et celui de la formation générale propre, lesquels se déclinent en quatre niveaux de maitrise. Le tableau 1 révèle que 20 % des élèves ayant fréquenté une école où la langue d’enseignement est l’anglais sont classés au niveau le plus faible en FLS à leur entrée au cégep. Or, ces élèves obtiendront leur diplôme d’études collégiales (DEC) sans atteindre, dans toutes les habiletés langagières, un niveau suffisant pour intégrer le marché du travail et socialiser en français (écouter, lire, parler et écrire). En considérant seulement l’expression écrite et la lecture, ce sont près des deux tiers (63 %) qui ne pourront travailler en français, la grande majorité des élèves du niveau 2 étant autonomes à l’oral, mais pas en lecture ni en écriture.

Tableau 1
Répartition des élèves inscrits pour la première fois au collégial à l’automne 2013, à l’automne 2014 ou à l’automne 2015 (ensemble des cégeps anglophones), selon le premier cours de FLS suivi au collégial et en fonction du cours de FLS complété au secondaire (Source : système DÉFI du SRAM)
* Il peut s’agir d’élèves autochtones, d’élèves provenant du secteur Adultes, d’élèves ayant suivi à la fois les cours de français et d’anglais langue d’enseignement, ou d’élèves admis au collégial sur la base d’études effectuées hors Québec.

Quand le Secrétariat à la politique linguistique du Québec affirme que « la francisation des milieux de travail québécois demeure vitale pour l’avenir du Québec [parce que, entre autres, le fait de] pouvoir réussir économiquement et socialement “en français” reste encore la plus grande motivation à apprendre et à utiliser le français » (Secrétariat à la politique linguistique 2017), nous sommes en droit de nous demander si c’est vraiment le cas pour les élèves de langue anglaise. S’il s’avère que oui, pourquoi alors ce facteur de motivation cardinal ne fonctionnerait-il que pour le tiers d’entre eux?

Pour en avoir le cœur net, nous avons décidé d’interroger les principaux intéressés dans le cadre d’une recherche[1] menée récemment. Notre question principale était la suivante : Quels sont les schèmes de perceptions qui influencent la motivation pour le FLS des cégépiens et cégépiennes ayant fréquenté les écoles et les collèges anglophones? D’autres questions étaient subordonnées : Quelle perception ont les non-francophones de l’enseignement du FLS au primaire, au secondaire et au collégial, de même que de leurs compétences? Quelle est la motivation des jeunes non francophones à apprendre le français, une langue imposée par l’État?

Nos données provenaient de 11 collèges où l’enseignement en anglais est offert. Pour les données quantitatives, un échantillon probabiliste aléatoire composé de 974 élèves a été établi. En ce qui a trait au volet qualitatif, 22 entrevues dirigées et quatre groupes de discussion composés de 48 élèves ont été menés dans plusieurs établissements collégiaux anglophones de Montréal. Le présent article expose une partie de nos résultats.

Deux modèles de motivation pour le FLS

En apprentissage des langues secondes, l’étude de la motivation a pris son essor à la fin des années 1950 avec les travaux fondamentaux de Wallace Lambert et Robert Gardner (1959; 1985). Le modèle de ces deux chercheurs, d’abord sociopsychologique (1972), puis socio-éducationnel (2010), a été fondé à Montréal, dans le cadre d’une étude sur l’apprentissage du FLS par les jeunes Québécois de langue anglaise (QA), avant de se développer ailleurs au Canada. Il postule que les apprenants d’une LS peuvent poursuivre des objectifs de deux types : ils ont soit une orientation intégrative (une disposition positive envers la communauté cible allant jusqu’à vouloir s’y assimiler), soit une orientation instrumentale (liée à des considérations pragmatiques telle l’amélioration de sa situation professionnelle). Il découle de ce modèle un concept plus large, celui d’intention intégrative (integrative motive), qui comprend trois éléments : 1) la dimension intégrative (integrativeness), 2) l’intérêt pour les LS et la communauté cible et 3) la motivation, composée à son tour de trois dimensions : a) le désir d’apprendre la langue, b) les attitudes à l’égard de l’apprentissage de la langue et c) l’intensité motivationnelle (le degré d’effort investi). « La motivation est définie comme un agrégat de ces trois variables étant donné qu’aucune d’entre elles ne peut seule produire un indice complet de la motivation » (traduction libre, désormais TL)  (Gardner 2010 : 23).

Des spécialistes du domaine ont reproché au modèle de Gardner de ne pas s’appuyer sur les théories contemporaines de la motivation en éducation et d’être limité au milieu multiculturel montréalais. En effet, il est difficile de viser l’intégration à la communauté cible si l’élève ne la côtoie pas dans sa région du monde ou si l’identification à cette communauté n’est pas désirée. Une autre critique est que ce modèle n’offre pas de propositions utiles au corps enseignant hormis l’importance de développer des attitudes positives envers la communauté cible.

Les années 1990 voient la recherche sur la motivation en LS se rapprocher de celle sur la motivation en éducation au sens large, un centre d’intérêt fécond en psychologie. Clément, Dörnyei et Noels (1994) développent ainsi le concept de linguistic self-confidence, étroitement lié au sentiment d’efficacité personnelle (Bandura 1986).

Dans la foulée de ses travaux sur les stratégies motivationnelles (Dörnyei 2001), Dörnyei présente le L2 Motivational Self System (Dörnyei 2005, 2009), un modèle conçu pour mesurer la motivation et mettant l’accent sur les élèves et non plus sur la communauté cible. Dans un contexte où l’anglais est devenu la lingua franca, la motivation pour apprendre une nouvelle langue est définie et mesurée selon trois nouveaux constituants : le Ideal L2 Self (le Moi L2 idéal, TL), représentant le locuteur idéal de la langue cible que les élèves veulent devenir; le Ought-to L2 Self (le Moi L2 conseillé, TL), concernant ce que les élèves croient qu’ils devraient être comme locuteurs; la L2 Learning Experience (la situation d’apprentissage, TL), renvoyant à l’expérience et à l’environnement immédiats d’apprentissage. Soutenu par les résultats de son enquête longitudinale portant sur 13 000 jeunes Hongrois sur une période de 10 ans, Dörnyei affirme que le Moi L2 idéal est l’indice de motivation le plus fort (Dörnyei et collab. 2006 : 92). Plusieurs études à grande échelle menées dans le monde au cours des 10 dernières années ont validé ce modèle.

Pour préciser l’acception du concept de motivation dans notre étude, il est nécessaire de la définir opérationnellement de la façon suivante : la motivation est l’ensemble des facteurs qui déclenchent les conduites de l’élève à l’égard de l’apprentissage du FLS, à savoir les relations sociales de proximité (famille et amis), l’environnement scolaire (corps enseignant, situation d’apprentissage, effort fourni et perception de compétence), la volonté de se représenter mentalement comme locuteur ou locutrice francophone, le désir d’apprendre le français, le désir d’interagir avec la communauté francophone et les attitudes envers elle.

Quatre observations tirées de notre étude

Les résultats présentés ici portent sur  les quatre éléments suivants : 1) trois échelles de perceptions et leurs effets sur la motivation ; 2) les perceptions envers la communauté francophone du Québec; 3) la motivation pour le FLS; 4) le modèle des effets de la dynamique de l’amitié intergroupe sur les facteurs motivationnels. Chaque résultat est suivi de témoignages d’élèves tirés soit des entrevues, soit des groupes de discussion. Le questionnaire est composé d’items affirmatifs positifs ou négatifs (ex. : I really enjoy learning French) et les élèves ont sélectionné une réponse sur une échelle de Likert à six échelons situés entre Disagree (1) et Agree (6). À ce sujet, il faut noter que les six échelons ne sont pas représentés dans les graphiques. Les histogrammes ont été tronqués par souci de lisibilité.

En réponse à la question principale de recherche, les trois échelles de perceptions (envers les enseignants, à l’égard de la discipline et par rapport à sa propre compétence en français) ont un effet sur les deux modèles de motivation.

  • Une augmentation de 1 sur l’échelle de Likert à six degrés des perceptions envers le corps enseignant augmente en moyenne la motivation de Gardner de 0,303; elle augmente la motivation de Dörnyei de 0,247.
  • Une augmentation de 1 sur l’échelle de Likert à six degrés des perceptions à l’égard de la discipline FLS augmente en moyenne la motivation de Gardner de 0,161; elle augmente la motivation de Dörnyei de 0,214.
  • Une augmentation de 1 sur l’échelle de Likert à six degrés des perceptions de sa compétence en français augmente en moyenne la motivation de Gardner de 0,184; elle augmente la motivation de Dörnyei de 0,286.

Les deux modèles sont hautement convergents et il est permis d’affirmer avec confiance que les trois schèmes de perceptions mesurées, et particulièrement celui de la perception envers le corps enseignant, ont un effet direct sur la motivation à apprendre le FLS au Québec. La figure 1 présente une équation structurelle, soit un modèle statistique qui a une portée prédictive et non pas causale. À partir du modèle, il est possible de prédire que plus les répondants ont des perceptions positives, plus ils sont motivés à apprendre le FLS.

Figure 1
Modèle de l’effet de trois types de perceptions des élèves sur leur motivation pour le FLS

Même si les notions de contact avec les locuteurs de la langue cible et de volonté de s’intégrer à cette communauté ne sont pas centrales dans le modèle qui fait dorénavant autorité, soit celui de Dörnyei, ces notions le sont au Québec. En effet, ce chercheur choisit de ne pas en tenir compte dans les facteurs de son modèle en soutenant que la dimension intégrative n’a pas d’appui scientifique en psychologie et qu’elle n’est pas utile dans le contexte de l’apprentissage de l’anglais comme langue de la mondialisation (Dörnyei 2009 : 9-10, 23). Il affirme tout de même qu’« il est difficile d’imaginer que nous puissions avoir un moi idéal vif et élaboré si la LS est parlée par une communauté que nous méprisons » (Dörnyei 2009 : 27-28, TL). La figure 2 montre justement que les attitudes des QA envers la communauté francophone sont légèrement négatives à tous les niveaux en FLS, les répondants ayant indiqué leur désaccord avec les énoncés du questionnaire (les moyennes à tous les niveaux se situent autour de 3 sur une échelle de six degrés).

Figure 2
Attitudes envers la communauté francophone selon le niveau en FLS

Lorsque interviewés au sujet de leurs relations avec les francophones, les QA mentionnent qu’ils n’aiment pas qu’on leur impose le français.

« Generally, the French person would say you should speak French. This is a French province[2]. » (Matthew)

 « Referring to what you were saying, like I do agree like we shouldn’t be like stereotypical like stereotype French people but like I, I heard like on more than one occasion someone speaking to me in French and like, like I respond to them in English and they respond “This is Quebec”. Like “Are you kidding me?” There’s no experience, like I haven’t experienced this like I’ve never experienced an English person telling a French person “This is Quebec”. So like if you’re gonna talk about like equality or whatever like French people push their language a lot more than English people do, I find in my experiences but like I don’t think it should be that way[3]. » (Julia)

Au sujet de l’impression d’être obligé de parler français, les QA mentionnent à plusieurs reprises et dans les mêmes mots : French is being shoved down our throats  (Le français nous est enfoncé dans la gorge). Il n’est donc pas surprenant que 31 % des répondants aient répondu affirmativement à l’item suivant : I’ve resisted learning French because it’s mandatory (J’ai résisté à l’apprentissage du français parce que c’est obligatoire).

Dans ce contexte, il est difficile de vouloir intégrer la communauté francophone, comme dans le modèle de Gardner, ou de vouloir s’imaginer en train de parler français, comme dans celui de Dörnyei. Sans surprise, la figure 3 illustre la motivation légèrement négative de tous les répondants selon le modèle de Dörnyei, avec un effet significatif de niveau. Selon les résultats, la motivation au niveau 2 est moins élevée qu’aux niveaux 3 et 4.

Figure 3
Degré de motivation en FLS selon le niveau à partir du modèle de Dörnyei

Il est intéressant de remarquer que seuls les élèves des niveaux 3 et 4 se projettent dans l’avenir en français (le Moi L2 idéal), visualisent leurs actions en français, et ce, tous au-dessus de 4 sur les six échelons (ex. : Whenever I think of my future career, I imagine myself using French/Lorsque je pense à ma future carrière, je m’imagine en train de parler le français). Les autres niveaux sont tous sous 4, en désaccord avec l’idée de s’imaginer en train de vivre en français. Il faut dire que les compétences des élèves de niveaux 3 et 4, c’est-à-dire de niveaux intermédiaire et avancé, se rapprochent de celles des francophones. Ce sont aussi ces élèves qui ont significativement plus d’amis francophones par rapport aux autres niveaux. De tels résultats sont en phase avec ceux obtenus par Wright, Aron et leurs collègues, selon lesquels « une plus grande proximité avec des membres de l’autre groupe [à travers des relations d’amitié] correspond à moins de préjugés envers l’ensemble de l’autre groupe à travers le mécanisme d’inclusion de l’autre groupe dans le moi » (cité par Pettigrew et Tropp 2011 : 116, TL).

Tous les répondants aux entrevues (22) sont convaincus que le FLS est nécessaire pour augmenter leurs chances de carrière, 18 d’entre eux trouvent qu’il est important pour assurer les besoins d’interaction sociale avec les francophones et 14 affirment l’étudier pour des raisons faisant appel à la motivation intrinsèque. La mesure de la dimension instrumentale est la seule de l’étude à avoir des scores positifs à tous les niveaux.

« It gives you better job prospects[4]» (Daniel)

« It’s the only real reason I want to learn French still because I need the jobs of course and to further my education[5]» (Matthew)

Le FLS est perçu aussi comme un outil de socialisation permettant de s’ouvrir et de jouer un rôle actif dans la société :

« Most of the population is francophone, you need to talk to those people. (…) Ici, c’est le Québec. On parle en français (…) most people here speak French and you need to be able to interact with 80 % and plus of the population. That’s what most of the people are. You need to be able to talk to the people, if not you gonna be introvert, you won’t gonna be able to interact with people[6]. » (Daniel)

« It would be nice to have a couple of French speaking friends[7]. » (Anthony)

Ce dernier commentaire introduit un aspect central des résultats de cette étude. Les deux questions portant sur l’amitié intergroupe empruntées à Pettigrew et Tropp (2011 : 115-129) exposent une réponse valide au questionnement entourant ce qui différencie les élèves qui ont réussi à atteindre les niveaux les plus élevés en FLS de ceux qui n’y sont pas arrivés. La figure 4 illustre les effets de l’influence de la famille et de la dynamique de l’amitié intergroupe (nombre d’amis francophones des répondants et nombre d’heures à leur parler en français chaque semaine, une mesure autorapportée) analysés à l’aide d’une équation structurelle.

Dans le schéma, l’encouragement des parents ou l’effet de l’amitié permettent de prédire que plus les répondants ont des amis francophones, moins ils résistent à l’apprentissage, moins ils sont anxieux en classe de langue, etc.

Figure 4
Modèle des effets de la dynamique de l’amitié intergroupe sur les facteurs motivationnels

Les corrélations entre l’échelle Le moi L2 idéal (incluse dans la Motivation de Dörnyei) et les deux variables indépendantes sont significatives. Lorsque ces dernières sont étudiées ensemble, les variables « nombre d’heures de communication en français » et « nombre d’amis francophones » ont un effet significatif. En d’autres mots, plus l’élève a des amis francophones et plus il parle avec eux en français chaque semaine, plus il ou elle intègre une voix intérieure française à sa vie, plus il ou elle s’imagine vivre des expériences par visualisation mentale en français. Ce faisant, il ou elle augmente sa motivation à apprendre le FLS.

Deux expériences pédagogiques : en classe et en dehors de la classe

Ces résultats nous ont menés à mettre sur pied une étude exploratoire de jumelage interculturel où les enseignants ont joué le rôle de médiateurs entre deux groupes d’élèves. Ainsi, des élèves du cégep Vanier et du cégep de Victoriaville ont été jumelés au cours des deux dernières années.

Dès le premier contact dans Skype, plusieurs élèves ont mentionné avoir été surpris de pouvoir parler aussi longtemps en français, augmentant ainsi leur sentiment d’efficacité personnelle (Bandura 1986), un élément clé de la motivation. Parmi les élèves anglophones, 10 % ont affirmé, dans un sondage en ligne avant le début des activités, ne pas vouloir participer au jumelage parce que cela les rendait anxieux. Ils ont été contactés par l’enseignant afin d’en discuter et ont convenu de faire un essai. Le lendemain du premier contact, ils ont tous accepté de continuer en disant que les collègues francophones avaient été sympathiques et qu’ils ne semblaient pas si différents d’eux.

À la fin de leur première expérience de jumelage, les élèves ont répondu à des questions ouvertes afin de réfléchir à cette expérience. À la question « Qu’allez-vous retenir de cette expérience de jumelage interculturel? », deux réponses illustrent le cheminement de certains d’entre eux :

« Je me souviendrai de ne pas juger les gens avant même d’avoir pu les rencontrer et apprendre à les connaitre. Avant cette expérience, je pensais que les francophones étaient des gens impolis et en colère [rude and angry]. Mais une fois que nous avons rencontré nos jumeaux, j’ai réalisé que j’avais tort, vraiment tort. » (élève du collège anglophone)

« J’ai appris que nous étions très semblables et que je n’avais pas à traiter les personnes de cultures différentes de manière différente… Cela a complètement démoli tous les préjugés que j’avais sur les anglophones. » (élève du collège francophone)

Des recherches récentes en didactique des langues soulignent par ailleurs l’importance de l’apprentissage d’une langue au-delà de la salle de classe. Il en résulte une meilleure immersion linguistique grâce aux situations d’apprentissage moins formelles (Fathali et Okada 2016; Richards 2015).

Pour répondre au besoin des étudiants de FLS du collégial anglophone d’interagir avec des francophones en dehors de la salle de classe, un cours d’apprentissage du français en milieu communautaire est proposé, entre autres pratiques, aux étudiants du niveau 2 du cégep John Abbott. Ce cours, donné en alternance en classe et en milieu communautaire, amène les élèves à s’investir au sein d’organismes communautaires francophones qui sollicitent leur aide, dans des domaines liés à leurs champs d’études. L’opportunité de choisir l’organisme auprès duquel ils s’engagent pendant 10 semaines constitue un facteur motivationnel qui diminue la résistance des élèves à l’idée d’intervenir en français. La rencontre des deux groupes linguistiques dans un projet commun vise à créer un espace relationnel où chacun a besoin de l’autre pour atteindre son but. Ce rapport est censé neutraliser les relations inéquitables de pouvoir que les apprenants anglophones vivent souvent dans leurs interactions avec la communauté francophone. En intervenant auprès de francophones qui ont besoin de leur expertise professionnelle, les apprenants de FLS sont investis du pouvoir d’agir en français et de mettre ainsi leurs compétences au service de leur communauté. Un tel sentiment d’empowerment (Cummins 2011; Gout 2017) augmenterait leur investissement (Darvin et Norton 2016; Norton 2013) à l’égard de l’apprentissage de la langue cible et de leur identité sociale inclusive. L’apprentissage du FLS deviendrait ainsi l’« appropriation » d’une langue qui n’est pas conçue seulement en tant qu’outil de communication, mais aussi comme « expérience réflexivée et historicisée pour devenir une interprétation collective et sociale du monde » (Castellotti 2017 : 307)

* * *

En conclusion, notre étude propose entre autres d’approfondir le rapprochement des deux groupes linguistiques, et ce, dès le primaire. Si cette jeunesse québécoise qui résiste à l’apprentissage du français ou qui souhaite s’exiler avait la possibilité de devenir une alliée des francophones au lieu de se sentir aliénée par eux, c’est la société québécoise au complet qui y gagnerait.

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Références

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CUMMINS, J., et M. EARLY (Eds.) (2011). Identity Texts. The Collaborative Creation of Power in Multilingual Schools, London, Institute of Education Press.

DARVIN, R., et B. NORTON (2016). “Investment and Language Learning in the 21st Century”, Langage et société, vol. 157, no 3, p. 19-38. doi.org/10.3917/ls.157.0019

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SECRÉTARIAT À LA POLITIQUE LINGUISTIQUE (2017). Portrait de la situation linguistique. Récupéré du site : http://www.spl.gouv.qc.ca/languefrancaise/portrait/

  1. P. GAGNÉ et M. POPICA, Perceptions et motivation à l’égard du français langue seconde enseigné au Québec, 2017, recherche subventionnée par le ministère de l’Enseignement supérieur, de la Recherche et de la Science dans le cadre du Programme d’aide à la recherche sur l’enseignement et l’apprentissage (PAREA). [Retour]
  2. [Traduction] « En général, un Québécois francophone vous dirait que vous devriez parler français. C’est une province francophone. » (Matthew) [Retour]
  3. [Traduction] « En lien avec ce que tu viens de dire, je suis d’accord, genre… nous ne devrions pas faire des stéréotypes, genre stéréotyper les francophones, mais… genre… j’ai entendu plus d’une fois quelqu’un me parler en français et… genre… je leur répondais en anglais et la réponse était : “On est au Québec ici.” Genre… “Me niaises-tu?” Il n’y a pas d’expérience semblable… genre…je n’ai pas vécu… genre… je n’ai jamais entendu un anglophone dire à un francophone : “On est au Québec ici.” Alors, si on veut parler de… genre… égalité ou quelque chose… genre… les francophones poussent leur langue beaucoup plus que les anglophones, je trouve… selon mes expériences, mais… genre… je ne pense pas que ça devrait être comme ça. » (Julia) [Retour]
  4. [Traduction] « Ça offre de meilleures perspectives d’emploi. » (Daniel) [Retour]
  5. [Traduction] « C’est la seule vraie raison pour laquelle je veux continuer à apprendre le français : parce que j’ai besoin de ces emplois bien sûr et pour poursuivre mes études. » (Matthew) [Retour]
  6. [Traduction] « La majorité de la population est francophone, tu dois parler à ces personnes. (…) “Ici c’est le Québec. On parle en français” (…) la plupart des gens ici parlent français et tu dois être capable d’interagir avec 80 % et plus de la population. C’est ce que la plupart des gens sont. Tu dois être capable de parler aux gens, sinon tu seras introverti, tu ne seras pas capable d’interagir avec les gens. » (Daniel) [Retour]
  7. [Traduction] « Ce serait bien d’avoir quelques amis francophones. » (Anthony) [Retour]

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