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Du copier-coller au créacollage numérique: quelques jalons à poser pour contrer le plagiat

Propos de Martine Peters, professeure au Département des sciences de l’éducation à l’Université du Québec en Outaouais et directrice de la recherche du Groupe de recherche sur l’intégrité académique (GRIA), recueillis par Jean-Philippe Boudreau
Entrevue
S’il a toujours été exigeant de produire des textes originaux de qualité, la facilité avec laquelle les étudiants et étudiantes peuvent aujourd’hui accéder à du contenu existant sur divers sujets s’est considérablement accrue grâce au Web et aux bases de données en ligne. Du même souffle, plus tentante est devenue la possibilité de reproduire ce contenu sans respecter les principes d’intégrité attendus dans les milieux scolaires. Mais les attentes en question sont-elles toujours parfaitement claires pour ces apprenants nés dans une culture connectée, collaborative et où le savoir circule de main en main (ou plutôt de support numérique en support numérique) à la vitesse du flux binaire? Les travaux du Groupe de recherche sur l’intégrité académique (GRIA), basé à l’Université du Québec en Outaouais (UQO), misent sur l’enseignement des stratégies de créacollage numérique pour favoriser le développement global des compétences nécessaires à la production de textes cohérents, créatifs et originaux. Pour en savoir plus sur le sujet, Correspondance s’est entretenu avec Martine Peters, directrice de la recherche du GRIA.

Correspondance Même si l’on imagine bien que le plagiat a toujours existé, qu’est-ce que la recherche récente dans le domaine nous apprend sur l’étendue du phénomène au postsecondaire?

Martine Peters – Le constat des chercheurs et chercheuses, tant au Québec qu’au Canada ou qu’à l’international, c’est qu’il s’agit d’un problème bel et bien généralisé. Un fléau, pour ainsi dire. On remarque toutefois que le phénomène évolue rapidement et que certaines tendances ont récemment pris davantage d’ampleur. Alors que les cas de plagiat associés au « traditionnel » copier-coller sont bien connus, une nouvelle vague dominante se profile déjà depuis un certain temps : l’achat de travaux en ligne. Il existe en effet de nombreux sites et plateformes où les étudiants peuvent acheter ou même vendre leurs travaux scolaires. Un article paru cet automne[1] faisait par exemple état d’entreprises très lucratives, établies dans des pays où le taux de chômage des jeunes diplômés est élevé (comme au Kenya), qui offrent aux étudiants et étudiantes des universités américaines la possibilité d’y faire sous-traiter la rédaction de leurs travaux. Cette pratique frauduleuse est déjà bien installée au sein des établissements anglophones, puisque le marché est évidemment plus important, mais on commence déjà à l’observer dans les écoles, cégeps et universités francophones. Et c’est sans compter tous les espaces d’échanges plus informels qui pullulent déjà sur le Web, notamment les réseaux sociaux, où il est possible de procéder au même type de « transactions ».

Correspondance Dans quelle mesure l’accès de plus en plus aisé des élèves aux technologies numériques, au cours des trois dernières décennies, a-t-il contribué ou non à amplifier le phénomène?

M. P. – Il y a un lien, c’est indéniable, mais ce lien n’est pas aussi évident à déchiffrer qu’il n’en parait. Certaines études empiriques[2] ont par exemple révélé, par la comparaison de corpus de thèses doctorales rédigées pré-Internet et post-Internet, des indices de plagiat à peu près similaires. Il s’agit évidemment d’un contexte scolaire bien spécifique, les études de troisième cycle, au sein desquelles on peut s’attendre à un degré d’intégrité supérieur, mais ces données relativisent tout de même nos idées préconçues sur la question. Par ailleurs, si l’on s’entend généralement pour dire que la technologie facilite le plagiat, il ne faut pas négliger le fait qu’elle en facilite également la détection. Notre impression d’une augmentation des cas de plagiat peut venir en partie du fait que nous bénéficions maintenant de moyens plus efficaces pour les repérer.

Une fois ces nuances faites, force est de constater que la culture numérique a fondamentalement changé le rapport au savoir et les manières de travailler, lesquelles peuvent tendre en effet plus facilement vers le plagiat. On peut véritablement parler d’une « culture du copier-coller », mais cette culture n’est pas seulement enracinée dans le monde scolaire. On la retrouve partout : la musique, les films, les jeux, les vidéos, tous ces contenus sont constamment relayés sur différentes plateformes numériques, souvent de manière plus ou moins légale, et malgré certains efforts de l’industrie des médias, il règne sur Internet un relatif climat d’impunité. Dès lors, les étudiants et étudiantes ne comprennent pas toujours pourquoi, une fois arrivés au cégep ou à l’université, ils doivent soudainement montrer patte blanche et se soumettre à autant de vérifications. Il y a donc un fossé énorme entre les attentes entretenues depuis toujours dans les milieux postsecondaires et la réalité quotidienne des étudiants à l’extérieur des murs des cégeps et des universités.

Correspondance Quelles sont les principales raisons qui mènent les élèves au plagiat?

M. P. – Il y a plusieurs raisons, mais mon expérience au sein du comité de discipline de l’UQO, où j’ai eu l’occasion d’entendre de nombreux témoignages d’étudiants pris en flagrant délit de plagiat, et mes propres travaux de recherche m’amènent à relever une raison majeure (qui en englobe plusieurs) : le manque de connaissances. Lorsqu’on interroge les étudiants qui entrent à l’université pour savoir s’ils s’attendent à être formés pour prévenir le plagiat, ils répondent quasi unanimement : oui. Puis, lorsqu’on interroge les professeurs pour savoir s’ils s’attendent à ce que leurs étudiants soient formés pour prévenir le plagiat, ils répondent également par l’affirmative. Mais alors que les étudiants et étudiantes s’attendent à recevoir cette formation à l’université, leurs professeurs, eux, s’attendent plutôt à ce qu’ils aient déjà été formés à l’école secondaire ou au cégep. On se retrouve donc devant un fossé considérable entre les attentes des uns et celles des autres. Pendant ce temps, il y a un manque de connaissances qui n’est pas comblé et qu’il importerait pourtant d’investir, à tous les ordres d’enseignement.

Selon les recherches menées par notre groupe, ces lacunes sont de quatre ordres. Premièrement, elles se situent sur le plan des compétences informationnelles. Malgré leur aisance avec les outils numériques, les étudiants et étudiantes ont encore beaucoup à apprendre sur la façon de mener des recherches efficaces sur Internet, d’évaluer la fiabilité des sources, de consulter différentes ressources et bases de données numériques à partir de mots-clés pertinents, puis de trier l’information. Deuxièmement, et c’est un enjeu que les enseignants et enseignantes de français connaissent bien, il y a d’importantes lacunes sur le plan des compétences rédactionnelles. Bien s’approprier l’information à l’aide de la prise de notes ou de résumés écrits, générer un texte original en prenant appui sur une variété de sources correctement citées ou paraphrasées, polir finalement ce texte par des étapes de réécriture et de révision-correction : il s’agit là d’un défi considérable. Troisièmement, les compétences de référencement documentaire méritent également d’être consolidées. Je l’ai moi-même observé cet automne, dans un cours que j’ai donné à des étudiants de première année en sciences de l’éducation. À une classe de vingt-trois étudiants, j’ai demandé s’il y en avait qui connaissaient un logiciel de référencement documentaire (comme EndNote, Zotero ou Mendeley). Un seul étudiant s’est manifesté. Si on ne leur enseigne pas à utiliser ces logiciels, qui visent justement à leur faciliter la vie, comment peut-on s’attendre à ce qu’ils optent spontanément pour la voie difficile qu’on leur impose bien souvent : démêler par eux-mêmes les différentes normes bibliographiques et respecter scrupuleusement les contraintes formelles de la norme choisie? Dans ce contexte, le plagiat représente souvent une voie plus facile à emprunter. Quatrièmement, la dernière dimension sur laquelle il importe de travailler renvoie aux connaissances relatives au plagiat lui-même. Les étudiants et étudiantes ne sont pas suffisamment au fait de ce qui le définit, de ce à quoi ressemble concrètement le plagiat, et des conséquences qu’il peut avoir sur leur apprentissage.

Évidemment, en plus de ce manque de connaissances, il y a une panoplie d’autres raisons inhérentes aux sources de motivation intrinsèque et extrinsèque des étudiants, à leur manque d’intérêt ou d’engagement dans leurs études, et à la pression exercée par leurs parents, par le système d’éducation ou par la société en général, qui fixent leurs attentes sur la performance et les résultats au détriment de la connaissance.

Correspondance Quelles sont les approches d’intervention les plus efficaces pour contrer le plagiat (campagne de sensibilisation institutionnelle, prévention en classe, surveillance accrue à l’aide des logiciels de détection, durcissement des sanctions)?

M. P. – Toutes ces mesures s’avèrent complémentaires, car prises isolément, elles sont bien souvent insuffisantes. Les logiciels de détection de similitudes, par exemple, sont efficaces dans la mesure où les textes plagiés se retrouvent bel et bien dans la base de données desdits logiciels, mais ils se révèlent inutiles dans le cas de travaux « originaux » achetés en ligne. Aussi, les campagnes institutionnelles dans le cadre desquelles on instaure, par exemple, une sorte de contrat d’engagement officiel lors de la remise de travaux scolaires, revêtent une certaine efficacité à court terme, mais pas à long terme. En effet, ces contrats perdent généralement en efficacité lorsqu’ils deviennent une habitude, une procédure automatisée appliquée systématiquement pour tous les travaux. Il est plutôt recommandé de recourir à ce genre de contrat éthique à l’occasion, pour une évaluation particulièrement significative ou pour les travaux d’équipe, ce qui permet d’instaurer également une forme d’engagement entre les pairs.

Même si la sanction, par son pouvoir dissuasif, constitue en soi un moyen de prévention, l’approche que nous valorisons au GRIA est celle de l’intervention en amont. Et nous considérons que les acteurs et actrices centraux de cette intervention, ce sont les enseignants et les enseignantes. Dès la planification de son cours et de ses évaluations, l’enseignant ou l’enseignante devrait s’assurer d’engager suffisamment ses étudiants dans des tâches motivantes pour les prémunir contre la tentation du plagiat. L’un des facteurs déterminants dans la prévention du plagiat, c’est l’interaction professeur-élève. Or, plus les étudiants et étudiantes sont intéressés, plus l’enseignant ou l’enseignante les motivent, plus ils seront enclins à répondre aux exigences fixées en produisant des travaux originaux et de qualité. L’enseignant ou l’enseignante a également un rôle primordial à jouer dans la promotion de l’intégrité académique en classe. Par l’enseignement explicite et la modélisation de stratégies permettant d’éviter le plagiat, il ou elle peut devenir, auprès de ses élèves, un véritable « passeur d’intégrité ». À cet égard, nous avons développé un modèle (voir figure 1) qui présente les différents rôles qu’adoptent généralement les enseignants et enseignantes par rapport à la promotion de l’intégrité académique en classe. De l’enseignante ou l’enseignant « détaché » qui considère que cette responsabilité ne lui incombe pas au « passeur d’intégrité » qui participe activement à l’enseignement de notions et de stratégies favorisant l’intégrité, il y a tout un spectre d’attitudes. Aussi, ces profils sont généralement mixtes. Un enseignant ou une enseignante de français peut par exemple représenter un « passeur d’intégrité » en ce qui a trait aux compétences rédactionnelles, mais agir en « délégateur » ou en « référent » par rapport aux compétences communicationnelles, préférant inviter ses étudiants à consulter le ou la bibliothécaire pour apprivoiser les stratégies de recherche documentaire. Comme les enseignants et enseignantes ont un grand pouvoir d’influence sur leurs étudiants, l’idéal serait évidemment qu’ils et elles en viennent à constituer des passeurs d’intégrité dans toutes les dimensions de leur travail.

Figure 1
Continuum du passeur d’intégrité académique (Peters, Boies et Morin, 2019)

Correspondance Dans quelle mesure la nature des travaux écrits demandés aux élèves (notamment à travers les consignes d’écriture qui leur sont données) peut-elle avoir une influence sur le « passage à l’acte » de plagiat?

M. P. – Le cas de figure classique, qui ouvre bien grande la porte aux risques de plagiat, c’est évidemment le travail que l’enseignant ou l’enseignante redonne systématiquement, année après année, avec toujours la même consigne. Si, au contraire, on privilégie des travaux novateurs et uniques en modifiant chaque année ses consignes, ses exigences et la thématique explorée, on vient d’emblée d’éliminer la possibilité, pour un étudiant ou une étudiante, de recycler le travail d’un ou d’une collègue d’une année précédente. En plus de rédiger des consignes nouvelles et motivantes, l’enseignant ou l’enseignante gagne à établir des critères d’évaluation le plus ciblés possible afin que les paramètres du travail soient tellement précis que seuls les étudiants ayant suivi le cours pourront satisfaire aux exigences de l’évaluation.

Il est par ailleurs recommandé de ne pas exiger un seul travail de session ou, du moins, de ne pas exiger des travaux représentant un pourcentage trop élevé de la note finale. Plus l’enjeu de performance est grand, plus la tentation du plagiat peut être grande. Une bonne façon de faire est donc de morceler le travail en plusieurs étapes qui bénéficieront de rétroactions successives et permettront ainsi aux étudiants de se corriger au fur et à mesure, et à l’enseignant ou à l’enseignante d’évaluer le travail à différentes étapes de production.

Si je prends l’exemple du cours que j’ai donné cet automne, je demandais à mes étudiants et étudiantes de réaliser une synthèse de recherche sur un sujet de leur choix. D’emblée, en leur laissant le choix du sujet, j’intervenais de manière positive sur leur niveau d’engagement et diminuais potentiellement le risque de plagiat. Je ne leur ai toutefois pas demandé de me remettre uniquement le résultat final, mais bien plusieurs petits « morceaux » du travail à différentes étapes. Ils devaient d’abord me soumettre, pour approbation, trois sources documentaires sur lesquelles ils comptaient s’appuyer. Ensuite, ils devaient produire une bibliographie annotée des trois textes. Puis, ils devaient me remettre une première ébauche de la synthèse. Or, cette première ébauche était corrigée et commentée par deux pairs. J’évaluais pour ma part la pertinence de ces rétroactions. Enfin, ils me remettaient la version finale de leur travail, réalisée à la lumière des commentaires obtenus au fur et à mesure du processus. Lorsque l’on morcèle l’évaluation de cette façon, il devient soudainement beaucoup moins attrayant pour les étudiants et étudiantes d’acheter en ligne le fruit, par exemple, d’une recherche bibliographique. L’enjeu est beaucoup trop petit. Cette façon de faire les oblige à construire progressivement leur travail plutôt que d’aboutir à la fin de la session et de devoir partir de zéro (s’ils ont procrastiné) et d’être tentés par la facilité du plagiat.

Une dernière chose à mentionner au sujet de l’évaluation, c’est que la question de l’intégrité académique devrait, d’une façon ou d’une autre, se trouver dans les critères d’évaluation. Si l’on exige, par exemple, le recours à un certain nombre de sources bibliographiques, l’usage de la citation et de la paraphrase, etc., il est important que ces éléments soient pris en compte dans l’évaluation. Sinon, l’étudiant ou l’étudiante assimile le fait que ces éléments sont des détails superficiels dont il n’est pas nécessaire de se soucier.

Correspondance Que sont les stratégies de créacollage numérique et en quoi leur enseignement peut-il contribuer à réduire les risques de plagiat?

M. P. – Les stratégies de créacollage numérique sont des actions cognitives de traitement et d’exécution que les apprenants mobilisent pour exercer leurs compétences informationnelles, leur compétence à écrire ainsi que leurs compétences de référencement documentaire dans le cadre de leurs travaux scolaires ou universitaires. Le terme créacollage est la traduction du terme anglais scrapbooking. La première fois que nous avons voulu développer ce concept, le terme patchwork était souvent utilisé. On y recourait notamment, en didactique du français langue seconde, pour désigner certaines pratiques d’écriture d’étudiants allophones de niveau intermédiaire qui assemblaient toutes sortes de sources textuelles de façon quelque peu boiteuse, pratiques qui pouvaient s’apparenter à du plagiat. En nous intéressant à cette notion, nous nous sommes dit que ces pratiques d’assemblage, de patchwork, n’étaient non seulement pas le propre des locuteurs non natifs (à des degrés divers, nous procédons tous régulièrement de la sorte en situation d’écriture), mais que le terme lui-même n’était pas tout à fait approprié puisqu’en sous-entendant la matière « textile », patchwork se limite à la dimension du texte (du latin textus, « tissu »). Or, dans un contexte de littératie multimodale[3], ce n’est pas seulement du texte que les scripteurs assemblent. Pour réaliser leurs travaux, nos étudiants et étudiantes consultent des textes, mais également des vidéos sur YouTube, des contenus audios, des images, etc. C’est ainsi que nous en sommes venus à définir le « créacollage numérique ».

Cette pratique, puisqu’elle comporte un potentiel de dérapages qui peut conduire à du plagiat, volontaire ou non, exige d’autant plus un encadrement rigoureux de la part des enseignants et enseignantes. C’est donc à travers l’enseignement explicite des « stratégies de créacollage numérique » que nous considérons qu’il y a un potentiel de prévention intéressant contre le plagiat. Comme ces stratégies impliquent plusieurs compétences (informationnelles, rédactionnelles, liées au référencement documentaire), il importe d’envisager le processus dans son ensemble. C’est ce que nous avons tenté de modéliser dans nos travaux (voir figure 2).

Figure 2
Modèle sur les stratégies de créacollage numérique (Peters, 2019)

Comme toutes ces stratégies sont transdisciplinaires, nous considérons que les enseignants et enseignantes de toutes les disciplines ont intérêt à prendre part à leur enseignement. Pour être complète, la formation des élèves à l’intégrité académique doit également passer par une définition claire du plagiat, ce qui gagnerait également à être rendu explicite dans chaque cours.

CorrespondanceQuelles ressources offre le GRIA pour les enseignants et enseignantes du collégial qui voudraient intervenir sur la question du plagiat?

M. P. – Le site Internet du GRIA sert surtout de vitrine aux travaux du groupe de recherche et ne prétend pas fournir un répertoire exhaustif d’outils clés en main pour contrer le plagiat. On y trouve tout de même un onglet « Ressources », lequel se subdivise en ressources « Pour les professeurs » et « Pour les étudiants ». Pour les premiers, nous fournissons une sélection d’hyperliens pertinents pour l’enseignement des compétences informationnelles et rédactionnelles ainsi que du référencement documentaire. Plusieurs articles scientifiques ou de vulgarisation invitent également les enseignants et enseignantes à amorcer une réflexion sur le plagiat et, du même coup, à engager une discussion avec leurs étudiantes et étudiants. Enfin, nous y rendons aussi disponibles les enregistrements de différents webinaires réalisés par le GRIA.

Pour les étudiants, nous fournissons également un certain nombre d’outils pour prévenir le plagiat. Nous relayons notamment un outil d’aide à la décision conçu par le cégep Marie-Victorin qui permet, avant la remise d’un travail, de s’assurer du respect de la propriété intellectuelle.

CorrespondanceLe GRIA a-t-il déjà mené des travaux de recherche dans le milieu collégial et, si oui, quels sont-ils?

M. P. – En ce moment, il y a deux de nos projets qui sont liés à l’ordre collégial. Pour un projet intitulé « Créacollage numérique au secondaire, au cégep et à l’université » (2017‑2022, financé par le Conseil de recherches en sciences humaines [CRSH]), nous amorçons actuellement une collecte de données dans les cégeps. Par des questionnaires, mais aussi des entrevues menées auprès d’étudiants et de membres du corps enseignant, nous nous intéressons à la perception sur le plagiat dans les différents ordres d’enseignement. Puis, de manière très concrète, nous nous pencherons également sur les « actions » elles-mêmes. En plaçant des élèves du secondaire, du cégep et de l’université dans des tâches d’écriture similaires, effectuées à l’ordinateur, nous enregistrerons chacune de leurs opérations pour voir de quelle façon progressent les stratégies de créacollage numérique d’un ordre d’enseignement à l’autre et pour déterminer les actions posées (ou non posées) qui sont susceptibles d’entrainer une forme ou une autre de plagiat. Au terme des analyses, nous espérons pouvoir cerner plus clairement les problèmes ou lacunes qui se posent au secondaire, au cégep et à l’université en matière d’intégrité académique et proposer ainsi des solutions plus ciblées pour chaque niveau.

Le deuxième projet lié au collégial est actuellement en développement. Une demande de subvention vient d’être déposée. Il consiste en l’élaboration d’un répertoire de stratégies évaluatives (consignes et critères d’évaluation) favorisant la créativité et l’intégrité chez les élèves du collégial. Nous avons réussi jusqu’à maintenant à nous associer à 11 établissements collégiaux du Québec. Dans le cadre de cette recherche-action, nous travaillerons surtout avec des conseillers pédagogiques et des bibliothécaires, puisque ce sont souvent eux qui interviennent, auprès des enseignants, dans les questions liées à l’intégrité académique. Nous souhaitons ainsi, en collaborant avec les conseillers pédagogiques et les bibliothécaires, engendrer un effet d’entrainement auprès des enseignants et susciter des retombées positives en classe.

Pour en savoir plus…

Martine Peters a récemment contribué à l’ouvrage collectif Le numérique en éducation. Pour développer des compétences (2019), paru aux Presses de l’Université du Québec sous la direction de Thierry Karsenti. Un chapitre intitulé « Les stratégies de créacollage numérique et les compétences requises pour les mobiliser » permettra aux enseignants et enseignantes de pousser plus loin la réflexion sur certaines des notions abordées dans cette entrevue.

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  1. F. STOCKMAN et C. MUREITHI, “Cheating, Inc.: How Writing Papers for American College Students Has Become a Lucrative Profession Overseas”, The New York Times, 7 septembre 2019. [Retour]
  2. Voir par exemple D. C. ISON, “The Influence of the Internet on Plagiarism Among Doctoral Dissertations: An Empirical Study”, Journal of Academic Ethics, vol. 13, no 2, juin 2015, p. 151 à 166. [Retour]
  3. Sur le sujet de la « littératie multimodale », lire J.-P. BOUDREAU, « La littératie en contexte numérique : de nouveaux objets d’étude et de nouvelles compétences à développer », Correspondance, vol. 24, no 2, octobre 2018. [Retour]

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