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Terminologie et qualité de la langue: quelle expertise l’Office de la langue française peut-il apporter pour l’enseignement et le travail en français?

Terminologie et qualité de la langue: quelle expertise l’Office de la langue française peut-il apporter pour l’enseignement et le travail en français?

Point de vue
Jean-Marie Fortin est directeur des Services linguistiques à l’Office de la langue française. En matière terminologique, milieu de la formation et milieu du travail travaillent beaucoup en parallèle mais peut-être pas suffisamment de pair. La collaboration est-elle possible, souhaitable, envisageable ? Et si c’était le cas…

L’Office de la langue française a atteint une renommée enviable dans le milieu des entreprises et auprès du grand public, tant pour les travaux de terminologie qu’il a conduits dans la plupart des secteurs d’activité économique et qui sont consignés dans son Grand Dictionnaire terminologique, que pour les ouvrages de langue générale comme Le français au bureau, qu’il a publié et diffusé à plusieurs centaines de milliers d’exemplaires.

L’activité terminolinguistique de l’Office est plus que jamais orientée vers les nouvelles technologies afin de diminuer le retard traditionnel entre le moment de la diffusion de l’innovation technologique et celui de la diffusion des terminologies françaises. La transmission des terminologies au bon moment est un des éléments qui concourent le plus au succès de leur implantation dans l’usage.

Les terminologies élaborées par l’Office de la langue française sont destinées prioritairement aux entreprises de 50 employés ou plus, qui doivent pouvoir faire la preuve par l’analyse de leur situation linguistique que l’usage du français est généralisé, ce qui implique notamment l’utilisation de la terminologie française[1].

L’évaluation qui est faite aujourd’hui de la francisation des entreprises tend à démontrer que cette opération majeure prévue dans la Charte de la langue française ne donne pas tout le rendement escompté[2] à cause de toutes sortes de limitations qui sont apparues au fil des ans et que le législateur ne pouvait pas prévoir en 1977, comme les changements organisationnels dus à la fusion d’entreprises, la mondialisation, qui entraîne la transnationalisation de la production, l’importance accrue des marchés extérieurs, le renouvellement des technologies et surtout des technologies de l’information et de la communication.

Au rendement amoindri du processus de francisation, dû en grande partie au contexte de la globalisation des marchés, s’ajoute le manque de profondeur de la francisation de plusieurs entreprises qui, tout en ayant fait des progrès importants sur le plan du statut de la langue, continuent à véhiculer une terminologie technique anglaise qui, très souvent, est apprise par les travailleurs dans les milieux de formation.

Les préoccupations linguistiques, et au premier chef, la qualité de la langue, sont-elles réellement prises en considération tant dans le milieu de travail que dans le milieu de la formation ? Malgré l’importance accordée au français dans la réforme de l’enseignement, y a-t-il, lors de la préparation des programmes, de l’élaboration des outils pédagogiques, un réel souci de diffuser une terminologie française de qualité en toute circonstance ? Pourtant, ce serait un acquis considérable pour la francisation dans le milieu de travail, s’il y avait une conjonction d’efforts pour que les propositions faites par l’Office de la langue française soient agréées par les uns et les autres et intégrées, tant dans le matériel pédagogique et les cours des enseignants que dans les normes, procédures et instructions de travail des entreprises.

Le moment privilégié pour établir cette conjonction d’efforts est celui de l’élaboration des terminologies. Les terminologues de l’Office ont de plus en plus le souci de diffuser une terminologie adaptée aux situations de travail, ce qui implique qu’ils doivent établir des liens avec les milieux visés. Ils doivent consulter les usagers cibles, valider les informations qu’ils ont recueillies et adapter la terminologie en y intégrant le point de vue des futurs usagers.

L’activité terminologique de l’Office se trouve donc à une intersection majeure dans un schéma de transmission des connaissances et elle se répercute par la suite dans les milieux de travail. Pourtant, le monde de la formation est resté à l’écart de cette activité stratégique pour l’implantation durable du français dans les entreprises. C’est pourquoi l’Office de la langue française souhaite qu’une concertation s’établisse à différents niveaux avec la Fédération des cégeps. Le Centre collégial de développement de matériel didactique pourrait être plus que tout autre le creuset de cette nouvelle expérience.

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J’ai lu… je réagis ! Prise en considération de la langue de spécialité dans le milieu de formation et diffusion d’une terminologie française de qualité en toute circonstance — préparation des programmes et élaboration des outils pédagogiques y compris — sont-elles nécessaires pour une implantation durable du français dans les entreprises ? Sommes-nous réellement restés à l’écart de cette activité stratégique ? De manière à faire connaître votre réaction, téléphonez au (514) 873-3781.
  1. Le chapitre V de la Charte de la langue française, qui porte sur la francisation des entreprises, définit les modalités de l’attribution du certificat de francisation, dont doivent se pourvoir toutes les entreprises de 50 employés ou plus. Retour
  2. Le rapport du Comité ministériel sur la situation de la langue française, intitulé Le français langue commune — Enjeu de la société québécoise, décrit la certification des entreprises comme un processus qui a tendance à plafonner (voir p. 79 à 93). Le même constat est fait par M. Pierre Bouchard, chef du Service de la recherche à l’Office de la langue française. Il en a expliqué les causes et les détails dans une allocution intitulée La francisation des entreprises au Québec : de la difficulté relative d’hier à la complexité de demain, à l’occasion du colloque de Rabat organisé par le Comité scientifique du réseau sociolinguistique et dynamique des langues de l’Agence universitaire de la francophonie, en décembre 1998. Retour

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