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Des pistes pour maximiser l’efficacité du tutorat par les pairs

La communauté des répondantes et répondants de la réussite (réseau Repcar) tenait le 2 octobre dernier une rencontre sous le thème « Les conditions d’efficacité de l’aide par les pairs », animée par Christian Barrette, chercheur et formateur en pédagogie collégiale. Cette journée de réflexion et d’échanges a notamment été l’occasion de présenter le fruit des recherches d’un groupe de travail consacré à cet enjeu. À l’invitation du Carrefour de la réussite au collégial, M. Barrette présente ici quelques pistes d’actions issues de ces travaux, lesquelles visent à maximiser les effets positifs du tutorat par les pairs.

L’apprentissage par les pairs peut s’actualiser de manière spontanée (des élèves qui forment des groupes d’études) ou structurée, et ce, soit à l’intérieur de stratégies pédagogiques impliquant l’ensemble des élèves d’un cours (travail collaboratif ou approche par problèmes, par exemple), soit en tant que mesure d’aide à la réussite ciblant des élèves avec des besoins particuliers.

Le tutorat par les pairs qui se pratique dans la plupart des centres d’aide en français (CAF) de cégeps et de collèges depuis des décennies relève résolument des mesures d’aide à la réussite destinées à des élèves ciblés. Malgré que cette intervention soit très répandue et qu’elle existe depuis longtemps dans les établissements collégiaux et universitaires, on sait peu de choses sur les modalités de sa mise en œuvre et sur son efficacité. Les principales données proviennent de rapports internes et concernent des statistiques de fréquentation ou des sondages de satisfaction des usagers (Cartier et Langevin, 2001). Très peu d’études traitent des effets d’une telle approche sur la réussite scolaire. Claing, Laurier, Lazure et Lefrançois (2005a; 2005b) ont analysé les effets de cette mesure utilisée dans les centres d’aide par rapport à ceux de huit autres mesures. Leur devis de recherche ne permet cependant pas de vérifier si les élèves bénéficiant de cette modalité réussissent mieux que ceux qui n’y ont pas accès. Si Denise Barbeau (2007) avait identifié dans les résultats des deux seules études empiriques sur le sujet une tendance statistiquement significative à un effet négatif sur les résultats scolaires, elle en avait surtout conclu à la nécessité de poursuivre les recherches dans le domaine (Barrette et Lapostolle, 2007), un appel resté sans suite.

Un groupe de travail interordres sur les conditions d’efficacité de l’aide par les pairs

Le contexte décrit précédemment met en lumière la nécessité de mieux connaitre les conditions d’efficacité de l’aide par les pairs afin d’améliorer les pratiques d’intervention au sein des collèges et des universités du Québec. C’est à ce besoin qu’ont voulu répondre, en 2013, l’Association pour la recherche au collégial (ARC), le Carrefour de la réussite au collégial, le Centre de documentation collégiale (CDC), le Centre de transfert pour la réussite éducative du Québec (CTREQ) et le Consortium d’animation sur la persévérance et la réussite en enseignement supérieur (CAPRES) en formant un groupe de travail sur l’aide par les pairs, et plus précisément sur le tutorat par les pairs comme formule d’aide à la réussite. Le groupe poursuivait quatre objectifs :

  1. réaliser un portrait des moyens utilisés pour qualifier et évaluer les mesures d’aide par les pairs dans les établissements postsecondaires;
  2. colliger différents cadres de référence, en français ou en anglais, au Québec ou à l’extérieur du Québec, quant aux conditions d’efficacité de l’aide par les pairs, puis en sélectionner certains pour leur pertinence dans le contexte des pratiques recensées;
  3. faire connaitre le portrait des moyens utilisés pour qualifier et évaluer les mesures d’aide par les pairs de même qu’une sélection de cadres de référence sur les conditions d’efficacité de l’aide par les pairs;
  4. repérer des acteurs intéressés par les résultats du projet et en mesure d’y donner suite en adaptant ou en élaborant un cadre de référence correspondant aux pratiques actuelles en la matière.

L’enquête que le groupe de travail interordres a menée auprès des collèges, cégeps et universités pour atteindre son premier objectif n’a pas été des plus fructueuses et la documentation recueillie n’a pu faire état de l’utilisation ni de cadres de référence ni de modèles explicites d’aide par les pairs. En revanche, la recension des écrits publiés ailleurs qu’au Québec a conduit le groupe à remplir son deuxième objectif. Le présent article retient quatre éléments provenant de cette recension[1] qui sont susceptibles de déclencher une réflexion sur les pratiques les plus efficaces de tutorat par les pairs en tant que mesure d’aide à la réussite.

Quatre éléments à retenir de la recension des écrits

Les effets positifs de l’apprentissage par les pairs

Un ensemble d’observations provenant des publications parcourues par l’équipe du groupe de travail montre les effets positifs de l’apprentissage par les pairs, tutorat par les pairs y compris. Sont ainsi établies, le plus souvent à la suite de recherches empiriques, des retombées positives de deux types. Le premier est celui d’effets mesurables qui peuvent donner lieu à des analyses statistiques; il s’agit ici de résultats obtenus dans des cours ou des tests, de taux de persistance et d’autres mesures souvent présentes dans les indicateurs de la réussite scolaire. Ces effets s’expliquent par des processus cognitifs reconnaissables dans le passage des connaissances déclaratives aux connaissances conditionnelles, ou encore, de l’apprentissage en surface à l’apprentissage en profondeur.

Le deuxième type d’effets positifs regroupe des phénomènes comportementaux observables dont on peut rendre compte par des calculs de fréquence ou par des échelles d’intensité; il s’agit ici d’améliorations en habiletés sociales et communicationnelles (interrogation, formulation d’hypothèses, écoute, explication), en habiletés pratiques (concentration sur la tâche, gestion du stress, gestion du temps) et en habiletés sur le plan socioaffectif (estime de soi, motivation, juste attribution causale).

Ces effets ne sont cependant pas obtenus dans tous les cas. Dans leur ensemble, les mesures solidement documentées y conduisent modestement, avec des cas de grande réussite et d’autres qui engendrent des effets négatifs. Cela porte à penser que ces effets sont sensibles à certaines conditions. Identifier celles-ci et les faire connaitre font partie des objectifs du groupe de travail et justifient la publication du présent article.

Un panorama de différentes formules d’apprentissage par les pairs

Au cours de sa recherche documentaire, le groupe de travail a repéré d’autres recensions, dont celle de David Arendale (2015). Celle-ci a comme particularité d’être une bibliographie organisée et commentée. L’auteur liste plus précisément les publications à caractère scientifique qui font état de six modèles d’intervention mobilisant l’apprentissage par les pairs – modèles qu’il tient pour particulièrement intéressants en vertu d’un gradient d’efficacité établi par Ruth Keimig (1983). Selon l’échelle de cette auteure, les mesures d’intervention basées sur une approche de remédiation de « problèmes individuels » sont moins efficaces que celles qui s’inscrivent dans une approche de mobilisation de tout le milieu autour d’un problème organisationnel. Conséquemment, Arendale choisit de ne pas examiner les publications relatives à des cours d’appoint ou au tutorat par les pairs, et de porter plutôt son attention sur six programmes d’intervention associés ou directement intégrés à des cours. Pour intéressante qu’elle soit s’il s’agit de présenter des programmes solidement établis et documentés d’aide à la réussite misant sur l’apprentissage par les pairs, la bibliographie raisonnée d’Arendale ne renvoie pas à des recherches expliquant à quelles conditions le tutorat par les pairs, tel que pratiqué dans des CAF, peut bien fonctionner afin de remplir son mandat d’aide à la réussite. Pour cela, le groupe de travail s’est plutôt tourné du côté des travaux de Keith Topping, un professeur, praticien et chercheur de l’Université de Dundee en Écosse.

Un modèle des déterminants de l’efficacité de l’apprentissage par les pairs

À partir de sa propre expérience et de résultats de recherche, Topping a analysé différentes formules d’apprentissage par les pairs, dont le tutorat. Il a observé une grande étendue dans les retombées sur les résultats scolaires inventoriées dans les rapports de recherche, allant d’effets négatifs préoccupants à des effets positifs remarquables (Topping, 1996). En chercheur aguerri, il a reconnu là les signes d’une mesure d’apprentissage très sensible aux conditions de son implantation. En effectuant la métasynthèse de plusieurs études, il a isolé les traits distinctifs des mesures efficaces, puis a proposé un modèle explicatif des déterminants des effets positifs du tutorat par les pairs sur la réussite scolaire. Ainsi, le modèle de Topping établit d’abord cinq ensembles de processus caractéristiques des mesures les plus efficaces et susceptibles d’en expliquer les effets (2005 : 637).

1. Processus organisationnels ou structurels inhérents à l’apprentissage par les pairs

  • Augmentation du temps consacré et de l’engagement à réaliser une tâche
  • Exigence de se donner des buts et de planifier
  • Individualisation de l’apprentissage et rétro-action rapide
  • Stimulation venant d’une manière différente d’apprendre

2. Processus cognitifs

  • Conflit cognitif (dans la perspective piagétienne)
  • Soutien et étayage de la part d’un pair plus compétent à l’intérieur d’une zone optimale, telle que présentée plus loin dans la figure 1 (à mettre en rapport, dans une perspective vygotskyenne, avec la « zone de développement prochain »)

3. Processus qui développent des savoirs spécifiquement chez l’aidant

  • Gestion et modulation du traitement des connaissances pour maximiser la vitesse de progression de l’aidé à l’intérieur de la « zone optimale »
  • Présentation à l’aidé d’un modèle cognitif de performance compétente
  • Suivi de la performance de l’aidé en détectant, en évaluant, en corrigeant ou en gérant d’une manière efficace ses fausses conceptions et ses erreurs

4. Processus qui développent des habiletés communicationnelles transférables tant chez l’aidant que chez l’aidé

  • Expression claire d’une idée à l’oral ou à l’écrit (enseigner ou reformuler dans ses mots est la meilleure façon d’apprendre)
  • Compétences à écouter, expliquer, questionner, résumer, raisonner et formuler des hypothèses

5. Processus qui ont une incidence sur le plan affectif

  • Une relation de confiance avec un pair qui n’est pas en position d’autorité peut conduire chez l’aidé à l’aveu de son ignorance ou de son incompréhension, améliorant par la suite le diagnostic et la correction.
  • La modélisation par l’aidant de l’enthousiasme, de la compétence et de la possibilité de succès peut influencer la confiance en soi chez l’aidé.
  • Un sentiment de loyauté et de responsabilité mutuelles contribue à motiver les membres de la dyade aidant/aidé et à les garder centrés sur la tâche.

L’apport particulier du modèle de Topping est de considérer ces cinq ensembles de processus non pas comme indépendants les uns des autres, mais en rétroaction, à la manière d’un « cercle vertueux » où les premiers effets engendrent à leur tour des effets (2005: 637-638). Cela indique qu’un service d’aide à la réussite basé sur le tutorat par les pairs doit une bonne part de son efficacité à la mise en place d’un véritable programme qui se développe au fil des séances de façon que les premiers résultats soient réinvestis et deviennent les causes des prochains effets souhaités.

Topping propose ensuite trois points de repère pour suivre le développement efficace d’un tel programme.

  1. Les nouvelles connaissances s’ajoutent à celles déjà acquises sans les modifier (c’est l’assimilation de Piaget), puis déclenchent leur restructuration (c’est l’accommodation, toujours selon Piaget). Les processus cognitifs deviennent progressivement plus efficaces, plus fluides et automatiques. Par généralisation et transfert, les acquis sont mobilisés dans des contextes de plus en plus variés.
  2. Les rétroactions deviennent de plus en plus nombreuses et pertinentes, et celles qui étaient implicites au départ deviennent de plus en plus explicites. Le renforcement initié à l’intérieur de la relation aidant/aidé au moyen d’encouragements verbaux et non verbaux se réalise dorénavant au-delà de la dyade par l’entremise de résultats scolaires, d’une reconnaissance sociale ou de différentes formes de rétribution.
  3. L’aidant et l’aidé deviennent de plus en plus conscients de ce qui se passe au cours de leurs rencontres et capables de suivre et de réguler l’efficacité de leurs propres stratégies d’apprentissage dans différents contextes. L’amélioration des performances cognitives, les rétroactions, le renforcement et la métacognition propulsent certes l’apprentissage, mais ils rendent aussi l’aidant et l’aidé de plus en plus confiants en leur capacité à s’améliorer et de plus en plus conscients que leurs succès sont attribuables à leurs efforts.

Ce modèle explicatif précise certaines conditions à la base de l’amélioration de l’efficacité du tutorat par les pairs tel que pratiqué dans les centres d’aide. Nous exposerons plus loin quelques grands principes qui intègrent ces conditions avec d’autres contributions présentées précédemment. Avant d’y arriver, il importe de « ramener sur terre » les considérations forcément abstraites que tout modèle théorique propose. En d’autres mots, une synthèse de résultats de recherches pose toujours le problème du transfert des connaissances vers les réalités locales.

Un ensemble de considérations organisationnelles

La recension des écrits réalisée par le groupe de travail sur l’aide par les pairs a conduit à relever d’autres contributions, dont celle de Michael Ross et Helen Cameron (2007). Cette dernière éclaire les dimensions organisationnelles de la mise en place de pratiques optimisées en matière de tutorat par les pairs. Quelles sont les dimensions d’un service ou d’un programme efficace de tutorat par les pairs qu’il faut considérer au moment de le concevoir, de l’implanter, de le suivre et de l’améliorer? C’est en répondant à ces questions qu’on peut tenir compte des principes abstraits dans la prise de décision et dans l’action. C’est ce que nous proposons dans la dernière section de notre article.

Quelques principes pour bonifier le tutorat par les pairs

Contrôler l’écart entre le tuteur et le tutoré

Selon Topping (2005), les formules d’apprentissage par les pairs les plus efficaces sont celles qui mettent en présence des étudiants peu éloignés en termes de connaissances et qui peuvent échanger leur place de tuteur/tutoré selon l’état d’avancement des connaissances de chacun d’eux sur différents sujets. Cette inversion des rôles, même occasionnelle, contribue à sortir l’aidé de sa position de strict bénéficiaire et à cultiver chez lui la confiance et l’estime de soi. L’inversion de rôles peut aussi se faire à plus long terme; Topping (2005) rapporte des cas où un élève aidé une année put devenir un excellent élève aidant l’année d’après. Le chercheur recommande d’éviter les deux extrêmes, soit de mettre ensemble des élèves de force ou de faiblesse trop égale, car alors aucun ne va progresser, ou trop éloignée, car alors le tuteur profite peu de la relation et l’aidé peut rapidement être « écrasé » (voir la figure 1).

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Figure 1
Zone optimale d’écart de compétences entre le tuteur et le tutoré

Suivre un programme précis et progressif au fil des rencontres

Toujours selon Topping (2005), les formules les plus efficaces sont celles qui se développent au fil des rencontres selon un programme précis. Ce type de démarche comporte d’abord de l’aide qui porte sur des aspects bien circonscrits de la matière ciblée et vise des résultats observables, notamment dans des examens ou des tests, afin d’en réinvestir les effets. L’expérience du premier succès est cruciale pour la motivation et l’estime de soi de l’élève aidé. Ensuite, à partir de ces gains, la relation porte de plus en plus sur la façon dont on arrive à de tels gains (le « comment »). Les stratégies pour mieux apprendre, mieux gérer son temps, mieux gérer le stress s’ajoutent graduellement aux contenus disciplinaires dans les rencontres.

Évaluer et rendre compte

Selon Cartier et Langevin (2001), il y a prédominance au Québec, dans les centres d’aide par les pairs, d’un suivi qui repose sur des compilations de fréquentation et des questionnaires de satisfaction, et un manque flagrant de recherches évaluatives mesurant les effets réels sur la performance scolaire. Notre groupe de travail n’a pas réussi à dresser un portrait exhaustif des pratiques et n’a pas décelé des processus d’évaluation et de suivi autres que ceux signalés par Cartier et Langevin (2001). Pourtant, personne ne pourrait contester l’intérêt de développer un esprit scientifique à l’égard des mesures de tutorat par les pairs, de formuler des hypothèses et de se donner des moyens crédibles de les vérifier, puis de partager ses résultats.

Travailler en synergie

Selon l’échelle de Keimig (1983), reprise par Arendale (2105), les mesures d’aide les moins efficaces sont celles qui mobilisent des spécialistes ad hoc auprès d’étudiants identifiés comme ayant des difficultés d’apprentissage, de compréhension ou de gestion de leur vie. Les plus efficaces sont celles qui mobilisent plusieurs acteurs « normaux » en leur demandant de jouer leur rôle d’une manière concertée et inclusive pour atteindre un but commun. Établir des liens entre les actions réalisées dans les CAF et les pratiques pédagogiques courantes, notamment dans les cours de renforcement, pourrait faire en sorte que ces mesures deviennent une extension inclusive des activités pédagogiques normales plutôt qu’une intervention exclusive. Des suggestions de pratiques inclusives provenant de la conception universelle de l’apprentissage (CAPRES, 2015) pourraient trouver ici un terrain d’expérimentation.

Réfléchir à ces principes, puis mettre en place des mesures qui s’en inspirent demandent d’apporter des ajustements aux conditions organisationnelles concrètes et propres à chacun des milieux. Chaque situation est unique et il n’y a pas de recette toute faite. Comment articuler grands principes et conditions concrètes? La réponse : « Penser globalement, agir localement ». Les grands principes ont tendance à induire de grands changements, mais ceux-ci engendrent souvent de grandes résistances. Les quatre grands principes précédents devraient donc être considérés comme des points cardinaux pouvant orienter les praticiennes et les praticiens sur les reliefs de leur terrain respectif plutôt que comme des dogmes. La contribution mentionnée plus haut de Ross et Cameron (2007) aide à parcourir les terrains des organisations dans leur spécificité.

Pour transférer ces principes dans des réalités organisationnelles

L’outil développé par Ross et Cameron (voir le tableau 1) revêt la forme d’un questionnaire qui permet de considérer huit dimensions concrètes d’un programme de tutorat par les pairs à tout moment de son cycle de vie, soit au moment de sa conception, de sa mise en place, de son suivi, de son évaluation ou de sa mise à jour. Formuler les réponses aux questions montre comment, de façon pratique, on peut appliquer les principes mentionnés plus haut.

Tableau 1
Tableau-synthèse inspiré de l’outil développé par Ross et Cameron (2007) et permettant de s’interroger sur les différentes dimensions d’un programme de tutorat par les pairs.

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Ce qui importe, c’est de ne pas répondre à ces questions l’une après l’autre sans prendre en considération les relations qu’entretiennent entre elles les réalités concrètes et locales auxquelles ces questions renvoient. Il faut protéger le caractère systémique des réalités locales et des facteurs déterminant le succès d’une intervention faisant appel au tutorat par les pairs.

Chaque établissement a sa réalité et les personnes concernées par les mesures de tutorat par les pairs pourront se doter d’une représentation commune des interactions entre ces dimensions en abordant les questions proposées ci-dessus au cours de séances de mise en commun.

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Beaucoup de travail est accompli dans les CAF, mais on en sait trop peu sur ce qui s’y passe, et les meilleures pratiques ne sont pas suffisamment mises en évidence. Les données disponibles, qui proviennent pour la plupart de suivis de fréquentation et d’enquêtes de satisfaction, n’informent pas suffisamment le milieu des retombées de l’action des CAF sur la réussite scolaire, que ce soit à court, moyen ou long terme.

Il existe plusieurs formules d’aide par les pairs, bien documentées et bien établies. Parmi elles, le tutorat se révèle une approche ayant en moyenne des effets mitigés, mais avec une forte dispersion entre les meilleurs et les pires. Il est impératif d’identifier les conditions qui distinguent les meilleures pratiques des autres. C’est ce qu’a fait Topping en proposant un modèle explicatif de l’efficacité des conditions gagnantes.

Établissement par établissement, il y a lieu de concevoir, de mettre en place, de suivre, d’évaluer ou de réviser les services de tutorat par les pairs, en se laissant guider par les observations et les explications proposées par Topping et d’autres chercheurs. En même temps, il faut sortir de l’isolement des établissements, promouvoir la diffusion des informations sur les meilleures pratiques et développer une véritable communauté d’apprentissage professionnelle.

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  1. La médiagraphie constituée par le groupe est disponible à cette adresse : http://www.capres.ca/wp-content/uploads/2015/05/Version_finale_8_juin_2015.pdf [Retour]

RÉFÉRENCES

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