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La révision orthographique, une question de stratégie!

La révision orthographique, une question de stratégie!

Andrée Meilleur est technicienne au Service individualisé de français écrit (Sifé) du Collège de Maisonneuve depuis 1993. Elle expose ici sa façon de guider les élèves afin qu’ils développent une stratégie efficace de révision de leurs textes.

Au Service individualisé de français écrit (Sifé) du Collège de Maisonneuve, nous recevons, en rencontres individuelles, des élèves qui éprouvent des difficultés en français écrit. Plusieurs d’entre eux présentent des difficultés liées à l’orthographe. Ils se désolent de faire beaucoup de fautes, mais ne les voient pas dans leurs textes ou ignorent comment les corriger. Nous remarquons habituellement que les élèves qui font beaucoup de fautes d’orthographe d’usage font aussi beaucoup de fautes d’orthographe grammaticale. Par ailleurs, nous constatons qu’une partie importante de ces élèves possèdent de bonnes connaissances grammaticales : ils ne savent tout simplement pas les utiliser. Mon rôle devient donc de les guider afin qu’ils développent une stratégie efficace pour réviser leurs écrits.

D’abord, dès les premières rencontres, j’insiste sur l’importance de posséder un dictionnaire, une grammaire et un guide de conjugaison, et de garder ces outils à portée de la main pour les utiliser dès qu’un doute surgit. Par ailleurs, puisqu’il est question pour l’élève d’apprendre à faire la révision orthographique de ses textes, le travail s’effectue en grande partie sur les textes qu’il produit ; cependant, à l’occasion, je donne une dictée afin de m’assurer que les règles d’accord sont bien maîtrisées. À chacune des rencontres, l’élève doit apporter un texte de 150 mots relu et corrigé. Parfois, ce texte constitue une partie d’un travail scolaire ; d’autres fois, il s’agit d’un texte personnel portant sur un sujet déterminé.

Laissez-moi vous présenter la méthode que j’utilise afin d’aider les élèves à améliorer leur orthographe. Il ne s’agit pas là d’une théorie, mais plutôt d’une méthode liée à la pratique, que j’essaie de parfaire au fil des ans afin de proposer aux élèves une démarche qui les aide vraiment.

Acquérir une stratégie de révision orthographique de textes

Tout d’abord, il faut savoir qu’il existe trois éléments indispensables en matière de révision orthographique et que la combinaison de ces trois éléments, aussi appelés « facultés orthographiques[1] » par Jean-Paul Simard dans son Guide du savoir-écrire, est essentielle afin de bien réviser ses écrits. Ces trois éléments sont « la mémoire, l’attention et la volonté d’écrire sans faute[2] ».

La mémoire permet de retenir l’orthographe des mots et les règles d’orthographe. Afin de soutenir la mémoire, nous dressons, à partir des fautes d’orthographe d’usage trouvées dans les textes d’un élève, une liste de mots qu’il doit relire plusieurs fois par semaine. J’invite l’élève à considérer cette liste comme personnelle et à y ajouter tous les mots d’usage courant dont il désire retenir l’orthographe.

Pour corriger les fautes d’orthographe grammaticale, l’élève doit bien connaître les règles de base. Si je constate une lacune, nous révisons la règle et nous récapitulons les étapes de l’analyse grammaticale liée à l’accord. Parfois, je remets à l’élève quelques exercices afin qu’il s’entraîne à faire une bonne analyse. Parallèlement, j’insiste sur la nécessité d’apprendre les règles. Je demande d’en rédiger un résumé, si cela est nécessaire.

Même si généralement, les élèves possèdent de bonnes connaissances de base, j’ai constaté que certaines notions orthographiques doivent presque toujours être révisées : l’accord des participes passés, particulièrement les participes passés des verbes pronominaux ; les distinctions homophoniques se/ce, s’est/c’est ; les tout ; les leur .

L’attention, quant à elle, permet de faire une relecture à la manière d’un vérificateur orthographique informatisé, c’est-à-dire en analysant un à un tous les mots de la phrase. Nous savons tous que, au cours de la relecture d’un texte, il est dangereux de se laisser prendre par le contenu et de ne plus faire la révision mot à mot. Afin d’éviter de tomber dans ce piège, je propose de réviser le texte en commençant par la fin, c’est-à-dire de la dernière phrase à la première. Je conseille aussi de laisser reposer le texte afin de l’oublier après l’avoir écrit et corrigé, et de le reprendre le lendemain ou quelques jours plus tard pour faire une nouvelle révision orthographique.

Au moment de la révision de texte, afin d’amener l’élève à douter, je lui demande de s’arrêter à chaque mot et de se poser plusieurs questions. En général, au début, nous faisons plusieurs relectures afin d’intégrer graduellement les différentes questions. Lorsque l’élève a développé une certaine habileté, il devient capable de poser toutes les questions au cours de la relecture.

Pour l’orthographe d’usage, il doit se poser les questions suivantes :

  • Suis-je certain de l’orthographe de ce mot ?
  • Sinon, puis-je trouver un mot de la même famille lexicale ?
  • Si oui, comment ce mot s’écrit-il ?
  • Puis-je en tirer une conclusion certaine ou dois-je utiliser le dictionnaire ?

Pour l’orthographe grammaticale, les questions suivantes l’amèneront à faire une analyse adéquate :

  • Quelle est la nature de ce mot ?
  • S’il s’agit d’un nom, le déterminant qui l’accompagne est-il au singulier ou au pluriel ?
  • S’il s’agit d’un adjectif, l’ai-je accordé avec le mot auquel il se rapporte ?
  • S’il s’agit d’un verbe, l’ai-je accordé avec le sujet ?
  • Pour les verbes du 1er groupe, s’agit-il d’un verbe à l’infinitif ou d’un participe passé (truc vendre/vendu) ?
  • S’il s’agit d’un participe passé, quel auxiliaire l’accompagne ? S’agit-il d’un participe passé à la forme pronominale ? Ai-je bien fait l’accord ?

Cette démarche permet à l’élève de repérer et de corriger par lui-même plusieurs fautes d’orthographe. Mais il est vrai qu’elle peut paraître longue et fastidieuse. J’explique à l’élève qu’il faut commencer par là et que, graduellement, toutes ces questions créeront des automatismes qui lui permettront de poser les bonnes questions en même temps qu’il compose un texte ; cela l’amènera à mieux écrire du premier coup et fera en sorte que la révision prenne moins de temps, tout en assurant une meilleure performance au moment des examens et des compositions qui se font en classe.

Finalement, la volonté d’écrire sans faute représente, à mon avis, l’élément le plus important : c’est le moteur qui permet de conjuguer les deux autres éléments. En effet, si écrire sans faute n’est pas une valeur pour l’élève, comment pourra-t-il développer une stratégie de révision de textes ?

Au Sifé, les inscriptions se faisant sur une base volontaire, la majorité des élèves que nous rencontrons sont motivés. Cependant, il arrive parfois que nous devions amener un élève à se demander s’il fait les efforts nécessaires afin d’améliorer son orthographe, d’où l’importance du tutorat. Celui-ci permet généralement d’établir une bonne relation avec l’élève et ainsi, de faire une intervention adéquate et de favoriser le développement de sa motivation.

Normalement, chez les élèves qui combinent habilement les trois éléments indispensables à la révision orthographique, quelques rencontres individuelles d’une demi-heure suffisent pour observer une baisse importante du nombre de fautes et acquérir une méthode de révision de textes efficace. De plus, après quelques rencontres, les résultats de leurs efforts commencent à être perceptibles, ce qui encourage les élèves à poursuivre. C’est pourquoi, lorsqu’un élève me dit vers la fin de la session : « Maintenant, je suis plus à l’aise lorsque j’écris, je me pose plus de questions et je sais quelles questions poser », je suis ravie parce que je sais qu’il est sur la bonne voie et qu’il pourra progresser dans sa maîtrise de la langue.

  1. SIMARD, Jean-Paul, Guide du savoir-écrire, Montréal, Éd. de l’Homme, 1984, p. 39. Retour.
  2. Ibid., p. 39. Retour

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